CHAPITRE 57
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CHAPITRE 57
Les retrouvailles avec la marquise – La tendresse d’une étreinte – Cachotteries féeriques.
Athénaïs m’entoura de ses bras, m’attira contre elle.
— Tu m’as manqué, souffla-t-elle.
Son front collé contre le mien, le souffle de ses lèvres caressant les miennes. Elle m’avait manqué, elle aussi. Mon esprit avait été si accaparé par les créatures qui envahissaient la moindre de mes pensées jusqu’à mon sommeil, que je n’étais plus vraiment présent pour la marquise ni pour la Reine. Je percevais leur inquiétude tout autant que leur affection pour moi, et cela m’attristait de les délaisser ainsi.
— Ne m’abandonne plus de la sorte, ordonna-t-elle.
Ses lèvres câlines cherchèrent les miennes, les capturèrent et les gardèrent dans la chaleur des siennes. Ses mains se nouèrent derrière ma nuque et elle réduisit la distance entre nos deux corps. Je brûlais de sentir sa peau contre la mienne. Un violent désir m’élança, tout à la guerre, j’avais négligé mon besoin de tendresse. La retrouver me redonnait de la vitalité, chassait l’ombre menaçante des marais et de ce qui s’y trouvait. Je frissonnais contre elle, non d’inquiétude, mais de désir et de plaisir. Son corps appelait le mien à s’unir dans la passion.
Sa sur-robe fut presque arrachée tant j’étais fiévreux et elle eut peu d’égards elle aussi pour mon gilet qui vola dans les airs. Nos chemises, son corset et nos culottes disparurent tout aussi vite. Mes collants elle m’en débarrassa avec une impatience fébrile. Il n’y avait plus de place pour la sensualité, la passion dévorait tout. Ses lèvres retrouvèrent les miennes, ses bras entourèrent mon corps et mes mains cherchèrent ses formes si généreuses.
J’étais un homme comblé et je comptais légitimer tous les enfants qu’elle me donnerait. Je les aimais comme s’ils avaient été légitimes. J’aimais la Marquise également, notre relation, son esprit, et plus encore, nos unions passionnées. Malgré la jalousie dont elle faisait preuve, je n’avais de désir pour personne d’autre qu’elle.
Je la soulevai pour la déposer délicatement sur le lit, aussi impatients fussions-nous, je tenais à l’honorer. Je voulais la voir onduler sous mes caresses, frémir et gémir, donner de la voix, elle chantait divinement. C’était ce que j’aimais chez elle, Athénaïs n’avait pas peur de montrer son plaisir, elle pouvait hurler, déchirer les draps, malmener les oreillers, elle avait quelque chose de fauve en elle qui rendait nos ébats d’autant plus ardents.
Je l’observais et lui souris doucement. L’on dit que mes sourires sont rares, je ne souris inutilement, ni pour plaire ; s’ils sont rares, c’est parce qu’ils sont sincères. À cet instant, tout mon amour pour elle se dévoila dans le regard que je lui jetais et dans ces commissures relevées.
Ses bras m’attirèrent et elle m’embrassa. Je glissai mes doigts dans ses cheveux blonds comme les blés. Elle battit des cils en m’observant, rose de plaisir, les yeux brillants de désir. Je caressai sa nuque, ses joues, son front, déposant des baisers papillon sur chaque parcelle de sa peau chaude, laissant l’empreinte humide de mon passage sur chair laiteuse et délicate.
— Mon amour, soufflai-je, lui délivrant les secrets de mon cœur qui lui appartenait déjà tout entier.
Après avoir laissé la passion nous embraser, encore rompus par la fureur nous ayant étreints, nous frissonnions dans la brise fraîche se glissant par la fenêtre ouverte par laquelle le parfum des orangers nous parvenait. Nous gisions, enlacés l’un contre l’autre dans les draps du lit servant d’écrin à nos amours.
— Tu te prépares au combat, n’est-ce pas ? me demanda-t-elle en se tournant vers moi.
Allongée sur le ventre, sa croupe rebondie était attirante, j’y aventurais ma main négligemment alors qu’elle continuait à m’interroger. Je devais cette question aux oreilles traînantes qui finissaient par savoir bien plus de choses que je ne lui en révélais. À moins que Philippe n’ait vendu la mèche.
— Aux festivités de la victoire, tu m’as abandonnée bien trop vite, personne ne s’en est rendu compte, mais moi je sais que tu ne m’aurais délaissé sans une excellente raison. Et cette attention que tu as eu pour la musique, les aliments, jusqu’à nos tenues… c’était un piège pour les attirer n’est-ce pas ?
Je caressai ses boucles blondes, toujours aussi étonné de l’intelligence clairvoyante de ma favorite. Elle avait donc déduit tout cela toute seule rien qu’en observant mon attitude. Parfois je me disais que si les femmes pouvaient être ministres, elle aurait pu servir brillamment la France.
— Rien ne t’échappe, murmurai-je.
Elle fronça son petit nez en secouant la tête.
— Louis, je sais que tu aimes t’occuper seul des affaires du royaume…
Je m’approchai d’elle pour l’embrasser, mais elle esquiva mon baiser devinant que je souhaitais la faire taire.
— Tu m’as abandonné au bal ! Plus encore tu m’as chargé d’une tâche, tu nous as tous employés pour mener cette guerre contre ces créatures sans rien nous dire !
Elle était indignée par mon comportement, je pus le voir à son air et à son ton.
— Et maintenant tu fais déménager la Cour ! Je te connais Louis, tu essaies de nous protéger en ne nous disant rien, tu penses pouvoir t’en occuper seul, mais tu ne peux pas te défier ainsi de tous ceux qui t’aiment.
Sa main glissa contre ma joue, ses doigts glissèrent sous mon menton qu’elle releva afin que je la regarde dans les yeux. Je n’aimais ce geste impérieux.
— Tu as besoin de nous.
Je secouai la tête en échappant ainsi à ses doigts inquisiteurs. Elle avait raison, je l’avais toujours tenue écartée des affaires de l’État, je ne l’avais mise au courant que lorsque j’avais eu besoin de son accointance avec les sorcières, mais je ne souhaitais l’impliquer davantage.
— Tu n’as pas besoin de savoir ni de t’inquiéter, je fais ce qui est nécessaire.
Athénaïs roula sur le dos, et m’observa de ses grands yeux bleus.
— Louis, je m’inquiéterais toujours. Surtout lorsque je te vois ainsi. Tu m’as confié tes tracas et tout d’un coup le silence. Tu as peur de ce que je pourrais en penser, mais ne t’ai-je point aidé ?
— Je t’ai déjà trop impliqué dans cette affaire, je préfère que tu demeures dans l’ignorance plutôt que d'encourir le moindre danger. Si tu souhaites m’aider, assure-toi que nos enfants soient à l’abri, je ne veux m’inquiéter pour vous. Je n’ai pas besoin de ton aide, amour, j’ai besoin de te savoir hors de tout danger.
— Tu ne peux pas me demander de simplement aller me cacher en ignorant la menace. Si je ne sais quel est le danger, comment pourrais-je l’éviter ?
Évidemment, j’avais oublié à quel point son esprit était affûté, à quel point elle était maligne, à quel point rien ne lui échappait. Allais-je continuer à la laisser dans l’obscurité ? Elle en avait trop deviné, mieux valait tout lui dire. Je lui révélais alors que lors du bal nous avions capturé une créature, et qu’effectivement cela avait été grâce à son aide, à celle de Philippe, mais aussi de la Reine. L’évocation de celle-ci lui fit hausser un sourcil.
Je lui parlais également du Seigneur des Marais, lui contant de ce que j’avais appris à son sujet sans négliger le Songe. Athénaïs accueillit la nouvelle avec inquiétude, un léger tressautement de son œil droit m’indiqua qu’elle était anxieuse en entendant ce récit.
— Louis, tu penses vraiment que cela fonctionnera ? Vous courrez un grand risque, Philippe et toi. Je ne veux pas vous perdre.
Je me penchai vers elle, l’embrassai, cette fois-ci, elle ne s’esquiva et me rendit même mon baiser, sa main glissa derrière mon dos. Elle s’accrocha à moi, avec une pointe de désespoir, comme si c’était un baiser d’adieu.
— Je ne compte pas perdre cette guerre pas plus que celle contre Guillaume d’Orange.
Athénaïs me sourit à travers les mèches de cheveux tombant entre nous.
— Je te fais confiance, rends-moi cette confiance s’il te plaît. Ne me cache plus rien de ce combat.
Je ramenai ces mèches derrière son oreille.
— Je suis désolé de te tenir éloignée, je dois me concentrer sur cette bataille. Mais j’aurais besoin de toi pour mon mouvement suivant.
Je lui racontai mon plan, affaiblir la créature des marais et inviter la Reine des fées à la Cour. Elle approuva d’un mouvement de la tête.
— Tu peux compter sur moi, nous les éblouirons.
Ses lèvres capturèrent les miennes, sa main glissa dans mes cheveux, nos corps s’enlacèrent alors que nous goûtions une nouvelle fois à la chaleur en émanant.