Mega fuite de X et Meta vers Bluesky ou comment tomber de Charybde en Scylla

Les petits ruisseaux font les grandes rivières. Une maxime banalisée que l’on entend surtout lorsque nous trouvons, dans la poussière de notre planète, une petite pièce de quelques centimes. Une maxime qui justifie que l’on se penche pour la ramasser et la ranger soigneusement dans notre porte-monnaie de plus en plus vide. Mais aujourd’hui, cette maxime trouve sa place dans notre quotidien numérique. Les petits internautes réalisent qu’ils peuvent grandir quand ils se rejoignent, et que leur insignifiante goutte d’eau devient une gigafuite quand ils suivent le même courant. Cependant, dans leur ruée vers le ciel bleu de l’ouest, c’est un monstre tout aussi vorace qui les accueille. Bluesky se frotte les mains pour le plus grand bonheur de ses investisseurs.

Gigafuite chez Meta

Las de n’être qu’un suiveur, Mark Zuckerberg a jeté l’éponge européenne chargée d’absorber le déversement de haines, d’informations fallacieuses, de discriminations et autres insanités de l’internet sauvage. En regardant du côté obscur, il a vu un Elon Musk s’affranchir de toutes les règles de bonne pratique, envoyer des paquets de merde en Europe, arpenter les couloirs de la Maison-Blanche et, récemment, saluer la foule d’un geste que l’on ne peut pas nuancer tant il est identique, à la seconde près, à celui d’un autre personnage de l’histoire.

Et moi et moi et moi ! s’est mis à pleurnicher le petit Mark. Alors, jaloux et envieux de Musk, le patron de Meta s’est mis à licencier son personnel, à cesser la modération de contenu, à discriminer et imposer sa vision masculiniste. ZuckerMusk est né dans le sillage d’Elon. En route pour la Trump Attitude qu’il s’est mis à soutenir en bloquant les messages de ses adversaires politiques.

À l’instar du patron de X, ce changement radical n’est pas passé inaperçu chez les internautes, mais, cette fois, les grenouilles ne sont pas restées à attendre que l’eau se mette à bouillir. Qui plus est, l’ego de Zuckerberg, perché dans les étoiles de Starlink, n’a pas vu le #HelloQuiteX prendre de l’ampleur. Ainsi, tant qu’à fuir le cadavre de l’oiseau crucifié sur X, autant fuir aussi ce que s’apprête à devenir Meta. Et force est de constater que la fuite sporadique devient massive. Mastodon et Bluesky enregistrent des inscriptions massives, de grands noms quittent le navire et MetaMark devient plombier, en tentant n’importe quoi pour colmater la gigafuite de Meta.

De mon côté, je n’ai jamais reçu autant de messages d’encouragements, venant des équipes marketing de Meta, pour vanter ma page, à deux clics de devenir une référence.

De Charybde en Scylla

Elon avait déjà pas mal tiré sur la corde, alors, lorsque le pauvre Mark a voulu faire pareil, elle a cassé. Facebook est devenu une vitrine de la publicité et de l’appel au sexe déguisé. Pour voir le billet d’un ami, il faut avoir un pouce sacrément musclé et faire défiler les messages à l’écran. Finalement, on passe plus de temps à appuyer sur une croix, pour masquer une publication, qu’à aimer le billet d’un proche. Quant à Instagram, si vous l’avez encore, vous avez forcément constaté que les publicités sont désormais équipées d’une barrière de lecture. Ainsi, pendant votre défilement à l’écran, vous êtes soudainement bloqué et devez attendre que la publicité passe avant de poursuivre.

Et n’allez pas penser que le modèle économique d’un abonnement va éviter ce flot publicitaire. Pour la « modique » somme, revue à la baisse, de 5,99 € mensuel pour l’un et 4 € de plus pour avoir les deux réseaux Facebook et Instagram, vous aurez moins de pub, c’est tout. Faites le calcul, 9,99 € par mois et ramenez cela à un abonnement TV plus distrayant ou à un abonnement presse plus enrichissant.

Les sacs pour vomir sont situés dans la poche du siège devant vous.

Allez, essuyez-vous la bouche, prenez un verre d’eau, et regardez un peu en dehors du système imposé par MuskErberg et ZuckerMusK. Je vous ai parlé plus haut de Mastodon, et accessoirement de Bluesky, car ce dernier est massivement gagné par un flot d’utilisateurs qui illustrent brillamment le proverbe : tomber de Charybde en Scylla.

Scoop : Bluesky n’est pas un ciel bleu.

Le hashtag (ou mot-clic en français) #HelloQuitteX fait fureur (oui, vous pouvez y voir une allusion au geste d’Elon Musk), et, dans son sillage, beaucoup en ont profité pour prendre la poudre d’escampette de Facebook et d’Instagram. Ainsi, sur Mastodon comme ailleurs, est apparu dans l’ombre de #HelloQuitteX le mot-clic #HelloQuitteMeta.

Hélas, la vision des réseaux sociaux reste très étriquée. Loin d’aller sur Thread de Meta qui ne cache pas sa volonté de devenir un support publicitaire comme Instagram, la majorité des gouttes d’eau, sous le prétexte résolument fallacieux d’une complexité désespérément inexacte, a pris le conduit Bluesky. Une véritable fausse bonne idée. Bluesky est un appel au ciel bleu, mais derrière l’image alléchante se cache la glu du papier tue-mouche.

Le réseau Bluesky a été créé par un certain Jack Dorsey. Oui, c’est lui, le même qui a donné naissance à Twitter, qui a vendu son oiseau bleu et qui a claqué la porte du ciel de la même couleur à peine mis en ligne. Bluesky qui reprend les mêmes travers que Twitter est déjà épinglé par l’Europe pour ses défauts envers ses utilisateurs. Ce réseau qui, sous couvert de technologie responsable, décentralisée, n’est en fait qu’une machine à pomper les données de ses utilisateurs : ça ne vous rappelle pas un certain discours ? Forer, forer, forer.

Illustration édifiante de ce que peut cacher un joli nuage blanc dans un ciel bleu : à gauche, en moyenne, après environ dix minutes de navigation, uBlock affichera 100 à 150 traqueurs différents bloqués. L’auteur @mastodonmigration a vu le nombre dépasser 300. À droite, Mastodon qui affiche zéro traqueur.

La petite souris Mastodon

Chassez le naturel, il revient au galop. Ainsi, lorsque quelques années caniculaires d’hiver seront passées, nous assisterons probablement à la naissance du mot-clic #HelloQuitteBS. Les appels de ceux fuyant X et Meta se feront pressants, las de ne pouvoir débattre, invisibilisés par les algorithmes présents ou à venir. C’est exactement ce qu’il s’est passé sur X, ce qu’il se passe sur Meta et ce qu’il se passera sur Bluesky.

Meta tente déjà de dissuader ses utilisateurs de partir. Sur Mastodon les captures d’écrans pullulent de ces entraves mises en place pour freiner les migrations. Un certain Dave R. S’est retrouvé limité dans ses désactivations sur Instagram, un billet de Julie a été supprimé par Meta parce qu’il renvoyait à un billet de blog parlant de Mastodon.

Il n’est donc pas concevable de rester sur des plateformes comme X, Facebook, Instagram, Bluesky. On voit clairement que l’excuse selon laquelle, en restant sur X par exemple, on peut débattre avec les uns et les autres ne tient pas. Leurs algorithmes cachent les messages allant à l’encontre de leur bonne parole, celle des dieux Trump, Musk et Zuckerberg. Lors de l’investiture du 47e président, vous aviez toutes les figures de la cène du Christ, Judas en moins.

S’inscrire sur Mastodon ne prend pas plus de clics que s’inscrire sur n’importe quel site. Il suffit de choisir une instance, il en existe pour tous les goûts. Et puis, même si vous vous trompez, si finalement vous ne vouliez pas aller sur toot.portes-imaginaire.org, ou pialle.fr, ça n’est pas un problème, car vous pouvez changer d’instance à tout moment. J’ai commencé sur mastodon.top et j’ai migré sur les portes de l’imaginaire pour coller à ma passion pour l’écriture, l’imaginaire, le jeu de rôle.

Cette précision est importante, et sans doute c’est celle qui vous permettra de choisir votre instance ou de migrer sur une autre. Sur Mastodon, vous n’aurez pas de suggestion d’algorithme. Votre fil sera celui de celles et ceux qui vous voulez suivre. Ainsi, au fil de vos rencontres, vous aurez un flux correspondant aux personnes que vous suivez, qui vous suivent, au flux de votre instance.

Un internet sain, éthique et responsable

Mastodon, le Fedivers de manière plus générale, est la preuve qu’un internet plus éthique, plus responsable existe. Hélas, l’Europe comme la France ont cette fâcheuse tendance à ne jamais sortir du cadre, à voir plus loin. Où est l’Europe dans les systèmes d’exploitation ? Où est l’Europe dans les suites bureautiques ? L’Europe se contente de subir l’hégémonie des géants américains, notamment celle de Microsoft qui vient de lancer de belles augmentations pour les particuliers, allant de 30 à 43 % selon la formule personnelle ou familiale. L’Europe se contente d’appliquer des correctifs, de mettre du sparadrap au lieu d’innover.

Quelques rares exceptions toutefois voient le jour, très difficilement. Ce n’est pas Alexandre Leforestier qui dira le contraire, lui qui se bat chaque jour contre ses semblables pour démontrer qu’il existe des alternatives aux forages dans les libertés et aux pompages dans les données personnelles. Sa dernière chronique dans le Journal du Net témoigne de ce possible. Certes, Panodyssey a reçu une subvention européenne, mais que peut-on penser de cette aumône dès lors que, dans les discours, dans les usages, l’Europe et la France continuent de mettre en avant les arbres qui cachent Panodyssey et Mastodon ?

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Crédit couverture : Lisa Fotios.

Pour fuir X : #HelloQuitteX

Pour me suivre de manière générale, ou plus particulièrement sur Panodyssey ou Mastodon.