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Chapitre 5

Chapitre 5

Published Jun 8, 2022 Updated Jun 24, 2022 Culture
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Chapitre 5

Chapitre 5

Timéo

Il est pratiquement seize heures. J’ai bien envie de voir comment Maman gère le retour des enfants après l’école. Tifanie et Titouan préfèrent rester au royaume pour écouter les blagues de Dimitri. Je choisis donc d’aller en salle de cinéma pour ne pas retourner seul sur Terre.

La tablette s’allume juste au moment où ma famille sort de la voiture. A peine le seuil de la maison franchi, Jérémy commence par évacuer la pression de la journée en se mettant à pleurer pour une broutille. Maman lui tend les bras.

  • Viens là, mon cœur.

Jérémy se précipite vers elle et ne cache pas sa joie de se pelotonner contre elle en enfouissant sa tête dans le cou de Maman. En le berçant doucement de gauche à droite puis de droite à gauche, elle lui murmure une chanson. Parfois, elle esquisse un petit pas de danse pour le plus grand bonheur de Jérémy qui rit à gorge déployée. Les larmes n’auront pas duré longtemps. Je m’imagine à sa place et me dis que ça doit être aussi tendre que dans les bras de Séraphine. Comme mon frère, à mon tour, j’ai envie de rigoler. C’est fou comme le rire est contagieux et comme ça fait du bien de voir sa famille dans cet état. Frédéric n’a pas l’air du même avis que moi. Serait-il jaloux que Maman le délaisse pour s’occuper de notre grand-frère ? En tout cas, il a décidé de manifester bruyamment son mécontentement. Maman est bien obligée de lui accorder de l’attention à lui aussi parce que, comme le rire, les pleurs peuvent se transmettre à toute la maisonnée. Maman pose Jérémy pour aller chercher un anneau de dentition dans le frigo, sans doute pense-t-elle que Frédéric a mal aux gencives. Frustré de quitter les bras de Maman, Jérémy s’agrippe à une de ses jambes. Comment consoler ses deux garçons en même temps ? Maman s’installe sur le canapé pour pouvoir les cajoler ensemble, un sur chaque cuisse. Finalement, elle ne s’en sort pas trop mal…enfin, jusqu’au moment où Alice, à son tour, vient à réclamer de l’attention. Aïe, aïe, aïe, on dirait bien que les choses se compliquent pour elle. Elle est très forte Maman, mais malheureusement, gérer les pleurs d’un troisième enfant relève de l’impossible. Elle appelle Célia à la rescousse pour prendre soin de sa petite sœur. Ouf, le calme revient dans la maison, mais une accalmie de courte durée parce que Célia a des devoirs à faire. Dès qu’elle repose Alice, les pleurs de notre petite sœur reprennent, au plus grand désespoir de Maman. Avec toute la meilleure volonté du monde, elle ne peut rien faire de plus. Chaque fois qu’elle pose un garçon, il se remet à geindre. Il ne reste plus qu’à attendre le retour de Papa en espérant que les pleurs finissent par s’estomper à moins que... Maman a soudain une brillante idée. Elle appelle Mamie à la rescousse. Heureusement, elle n’habite pas très loin. A son arrivée, le silence se fait instantanément et dure jusqu’au retour de Papa. Quand ce dernier franchit le pas de la porte, il est loin d’imaginer ce qui vient de se jouer ici durant les deux dernières heures. Mamie prend congé en promettant de revenir chaque soir. Je vois bien que Maman accueille cette sage décision avec enthousiasme. Je suis moi aussi rassuré de me dire que les débuts de soirées des prochains jours seront plus sereins.

**

J’ai bien envie de passer la soirée avec les ados maintenant. Ça fait un moment que je n’ai pas été leur rendre visite et j’aimerais bien savoir quelle nouvelle invention ils sont en train de mettre au point. Dimitri est avec eux. Je repense au jeune garçon très affecté, arrivé il y a quelques mois, suite à son suicide et je me dis qu’il a bien évolué. Il a pris beaucoup d’assurance depuis qu’il est ici. Malgré la souffrance de sa maman qui le hante, il a réussi à trouver son équilibre et ses talents d’humoriste sont grandement appréciés. Il a un véritable fan club auprès des tout-petits depuis qu’il leur raconte des blagues et leur fabrique des monstres tous plus déjantés les uns que les autres. Souvent le soir, il donne vie à tous ses personnages pour des spectacles animés et ça se termine toujours en franche rigolade. Je suis ravi pour lui, même si son regard restera à jamais triste, comme celui de sa maman. Je le découvre assis sur une moto volante avec Justin à côté de lui, l’adolescent trisomique qui s’était brisé les ailes en suivant un papillon lors d’une mission terrestre. J’ai cru comprendre que les ados du royaume souhaitent produire des motos volantes à grande échelle pour permettre à des adultes de faire des sorties dans l’espace et que c’est Stéphane, le papa de Clara qui en a eu l’idée. Depuis qu’il a quitté la Terre, sa moto lui manque trop, tout comme ses sorties. Il dit suffoquer au royaume parce que sans ailes comme tous les adultes du royaume, impossible pour lui de sortir dans l’espace. Alors à cet amoureux de liberté, aucun des postes du royaume ne lui convient. Je le comprends car moi-même je n’imagine pas ma vie sans mes sorties sur la Terre. J’ai remarqué que Stéphane est devenu très proche de Séraphin. Je ne sais pas ce qu’ils manigancent ces deux-là. Ils partent souvent pour des expéditions ultra-secrètes hors du royaume. J’aimerais bien en apprendre davantage, mais il y a beaucoup de cachoteries ici et ça commence sérieusement à égayer ma curiosité. En voici une nouvelle fois la preuve avec Carole qui, à mon approche, referme à toute vitesse un dossier sur lequel elle était en train de travailler avec Sébastien et Julie. J’ai juste eu le temps de lire « opération KINGO ». Pas la peine de leur demander des explications, j’ai bien compris qu’ils ne me diront rien. Ça m’énerve. Je bous intérieurement, mais essaie de me contenir pour que personne ne le remarque. Pourtant, ici plus que dans les autres départements du royaume, je sais qu’il y a de véritables empathes, des jeunes hypersensibles qui sont capables de lire en moi comme dans un livre ouvert. Comme Justin, par exemple, qui m’invite à tester le simulateur de vol. Mais aussi Mattéo, qui m’observe du coin de l’oeil. Tous deux sont capables de ressentir les émotions des autres. Nul doute qu’ils ont détecté mon trouble quand Carole a refermé le classeur. Pourtant, ils n’y font pas allusion et essaient au contraire de détourner mon attention de la colère qui gronde en moi.

  • Viens voir Timéo. Ça te tente une petite sortie dans l’espace sur notre bolide ? me lance Justin.

Mattéo nous rejoint tandis que je m’installe sur l’engin. Je me tiens au guidon de la moto volante et fixe l’écran juste devant moi tandis que Dimitri, lui, programme la machine. Je me retrouve rapidement propulsé au milieu d’étoiles que je tente d’éviter, en bifurquant à droite, à gauche ou en montant ou descendant au gré des oscillations de mon bassin. Visuellement, j’ai l’impression d’être assis sur une moto, mais au niveau des sensations, j’ai plutôt l’impression de me trouver sur une fusée tellement ça va vite. Dans cette course effrénée, je percute des étoiles qui se transforment en poudre, récupérée par des chérubins portant des seaux. Le réalisme est bluffant. Je suis tout pâle et tout tremblant lorsque le simulateur s’immobilise enfin.

  • Ça va Timéo ? me demande Dimitri. Tu es aussi blanc que tes ailes !

Des éclats de rire étouffés par des mains, résonnent dans mes oreilles. Mes joues y répondent en s’empourprant. Je suis gêné de me sentir aussi mal, mais au moins, leurs moqueries me redonnent des couleurs. Pour une fois que ce n’est pas la frustration qui l’emporte sur mes autres sentiments.

Durant mon vol virtuel, beaucoup d’ados se sont amassés autour de nous, tels des corbeaux dans un champ de maïs qui vient tout juste d’être ensemencé. Je les observe un à un en me disant qu’ils sont nombreux à ne pas me connaître et réciproquement. Que de malheurs sur Terre, mais en même temps, s’ils sont ici, c’est bien parce qu’ils ont un rôle à y jouer. Heureusement quand même qu’avec d’autres chérubins qui ont le même pouvoir que moi, je compense en recréant de la vie. En reprenant la parole, Justin interrompt mes états d’âme. J’atterris au sens propre comme au figuré en l’entendant crier :

  • C’est puissant, hein Timéo ? La première fois que je l’ai essayé, j’ai bien cru que j’allais m’évanouir.

Il vient de déclencher l’hilarité générale. Je triture mon doigt dans l’oreille en lui répondant :

  • Tu n’es pas obligé de crier, je ne suis pas sourd. J’ai l’impression que tu m’as perforé le tympan.
  • Pardon Timéo ! C’est l’excitation ! C’est de la bombe cette moto volante ! Encore mieux qu’un jeu vidéo.

Je confirme en hochant de la tête. Pas sûr que je trouve facilement le sommeil après toutes ces émotions. Mes jambes en tremblent encore quand je descends du bolide.

 

 

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