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Chapitre 12

Chapitre 12

Published Jun 8, 2022 Updated Jun 24, 2022 Culture
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Chapitre 12

Chapitre 12

Florence, 22 septembre

Nous sommes mercredi et en Belgique, les enfants n’ont pas cours l’après-midi. C’était l’occasion pour Clara d’inviter sa meilleure amie, Célia, au Hayon. Le ciel est bleu et les températures assez agréables. Les feuilles tombées font un beau tapis ocre orangé dans le parc des chevaux. Je me suis installée pour peindre et tandis que j’observe Théo qui partage sa passion avec les fillettes, je ne peux m’empêcher de détailler ce trentenaire qui ne me laisse pas indifférente. D’un physique agréable à regarder, cet homme svelte et musclé porte toujours une salopette en jean à bretelles, dont l’une des deux pend dans son dos, et une chemise à carreaux. Je le trouve très sexy avec sa queue de cheval et sa barbe rousse qu’il ne rase jamais. J’estime qu’elle dépasse les dix centimètres de longueur sous son menton, mais ce n’est pas sa barbe qui m’attire le plus chez lui. J’aime me perdre dans la profondeur de ses yeux quand il me parle de sa passion pour ses chevaux. Il en possède trois : une vieille jument toute calme, un cheval de trait ardennais imposant et un jeune hongre fougueux de trois ans. Théo est aussi doux avec ses animaux qu’avec les fillettes. Il parle posément et s’exprime avec aisance. Il impose naturellement le respect sans jamais hausser la voix. J’apprécie beaucoup sa compagnie et je crois que c’est réciproque même s’il ne discute pas beaucoup. Parfois, lorsque je peins un tableau, il vient s’allonger dans l’herbe près de moi et lit des bouquins sur le bien-être animal. Nous pouvons passer des après-midis entiers sans parler, perdus dans nos pensées respectives. Théo ne parle jamais de lui, de sa vie d’avant ni de ce qui l’a amené à vivre ici. Je n’ose pas le questionner, même si ça me coûte de me taire. Un jour, j’ai eu le malheur d’effleurer son bras de ma main et il s’est brusquement écarté, comme s’il s’était brûlé. J’ai fait mine de ne rien remarquer pour ne pas l’embarrasser davantage, mais j’en ai été secouée. Depuis, je me tiens à distance, de manière à ne plus le toucher.

  • Venez voir les filles !

Clara et Célia qui étaient en train d’ajuster leurs bombes, se dirigent vers lui.

  • Vous voyez, le principe de mon paddock-paradise est d’obliger les chevaux à bouger pour se nourrir, pour boire et pour se mettre à l’abri, tout en empruntant des chemins dont le sol varie tout au long du parcours.
  • C’est pour ça qu’il y a une clôture à l’intérieur du pré, alors ? l’interroge Célia.
  • Exactement, une clôture à l’extérieur et une à l’intérieur, à environ quatre mètres l’une de l’autre afin de matérialiser un chemin qu’ils doivent emprunter pour aller boire. A votre avis, pourquoi quatre mètres de largeur ?
  • Pour que les chevaux puissent se retourner quand ils arrivent au bout, répond aussitôt Clara sans même laisser à Célia le temps de réfléchir.
  • C’est exact. Il y a une autre raison, pratique pour moi. Célia, tu sais ?

La gamine a beau chercher, elle n’en a aucune idée. Clara qui lève son doigt bien haut et sautille sur place aimerait bien que Théo lui donne la parole.

  • On t’écoute Clara.
  • Pour passer ton tracteur.
  • Exactement ! Et selon toi, Célia, à quoi servent les autres séparations dans le rectangle du centre ?
  • Comme je vois que les chevaux peuvent accéder à une zone et pas aux autres, j’imagine que c’est pour éviter qu’ils n’abiment l’herbe partout en même temps.
  • Oui, et comme tu peux le constater, pour accéder à la zone enherbée, ils sont obligés de faire tout le tour.
  • Et c’est quoi l’intérêt ? demande Clara.
  • C’est pour entretenir leur condition physique. Dans les pâtures traditionnelles, les chevaux paresseux peuvent s’ankyloser et devenir trop gras. Ici, ils n’ont pas le choix. Pour se nourrir, ils doivent bouger.
  • Et ça sert à quoi de mettre différents matériaux au sol ?
  • Le sable, c’est pour leur plaisir, tout comme la mare de boue. Ils adorent se rouler dedans. Les grandes allées en cailloux quant à elles servent à renforcer leurs pieds. Il leur faut aussi des surfaces plus douces, comme de la terre ou de l’herbe pour galoper ou se reposer. Tous ces sols de natures variées améliorent naturellement la corne de leurs pieds.

Equipé de brosses, d’un cure-pied, de licols, de deux selles et d’un seau d’avoine, le trio prend la direction de la cabane. Olgane, la femelle Haflinger s’approche d’eux.

  • Viens-là, ma belle, l’appelle Théo.

Il lui passe le licol puis l’attache à un piquet.

  • Voilà les filles, c’est à vous !

Célia entreprend aussitôt de la brosser tandis que Clara lui cure les pieds. Elle commence à avoir l’habitude puisqu’elle le faisait tous les jours avec Théo, pendant les vacances scolaires. Tout en peignant, je continue à les observer. Théo appelle Marquis et Texan en agitant son seau d’avoine et en avançant vers eux. Il revient vers les gamines, avec un grand sourire aux lèvres et Marquis au bout de son licol.

  • Voilà ta monture, Célia ! Tu peux le brosser pendant que je lui cure les pieds.

Après quelques minutes, Théo rompt le silence dans lequel ils ont tous plongé, appliqués à bien faire leurs tâches respectives.

  • Et pour terminer mes explications de tout à l’heure, les filles, vous voyez les rondins de bois là-bas ? A votre avis, à quoi servent-ils ?
  • Je crois que je sais ! Ca me fait penser à un parcours de santé pour les sportifs, dit Célia.
  • Oui, c’est un peu ça. Les chevaux peuvent les éviter, les enjamber au pas ou même les sauter tous en une fois comme un obstacle, en fonction de leur envie du moment.
  • Moi, ajoute Clara, j’ai remarqué autre chose : que tu déplaces les sacs de foin et le sel de temps en temps. Je suppose que ça aussi, c’est un moyen de les faire bouger.
  • Oui, exactement. Parfois aussi, je leur mets des surprises sur leur parcours comme des carottes ou de l’avoine. Ça stimule leur curiosité et ça égaie leur quotidien.
  • C’est le paradis pour les chevaux ici, en fait, commente à son tour Célia.
  • Oui, on peut dire ça. Le seul inconvénient, c’est pour moi, dit-il en riant fort. Mais mes chevaux le méritent. Je dois ramasser quotidiennement les crottins dans les allées, ce que les éleveurs traditionnels ne doivent pas faire dans les grandes pâtures. Sinon, ça deviendrait très vite des chemins sales.

Maintenant que les filles ont chacune un cheval à brosser, elles discutent de leur exposé.

  • Pourquoi tu as choisi de parler du renne, demande Célia ? Ce n’est pas courant comme sujet.
  • Oui, c’est vrai. En fait, avant ma naissance, mon papa m’avait acheté un doudou. Comme tu t’en doutes, c’était un renne. Mon papa est mort dans un accident de moto il y a quelques mois et ce doudou, ça me fait un souvenir de lui que je peux serrer fort contre moi. Du coup, tous les soirs, je m’endors avec mon renne.
  • Comme c’est triste ! Il doit beaucoup te manquer, ton papa !
  • Oui, c’est vrai. Il n’était pas souvent à la maison. Il partait souvent, mais quand il était là, il me prenait dans les bras, me pressait bien fort contre lui et disait que j’étais son petit renne préféré.
  • Je comprends encore mieux ton intérêt pour les rennes.

Tout le petit groupe rejoint la partie enherbée où Théo a installé des petits obstacles. Célia a l’honneur de monter sur Marquis, le cheval de trait ardennais. De là-haut, elle est assez impressionnée. C’est un animal imposant avec un dos très large qui donne à Célia l’impression de faire un grand écart sur son dos. Elle n’a pas besoin d’étriers puisque Théo précède le cheval et le tient à la longe pour une balade au pas. Clara, elle, comme chaque jour monte Olgane dans la carrière. Elle commence à bien se débrouiller. Je n’en perds pas une miette grâce à mon appareil-photo qui mitraille. Je filme aussi de temps en temps avec mon téléphone. Je veux garder le plus de souvenirs possibles. Alors que le soleil se couche sur notre petit coin de paradis, je donne les derniers coups de pinceau à ma toile. Ma petite cavalière a fière allure, le dos droit et les cheveux au vent sous sa bombe parfaitement ajustée. Son rire crée un feu d’artifice dans ma tête, et des étincelles dans chacune de mes veines.

 

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