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David Bowie - Une folle fraternité

David Bowie - Une folle fraternité

Publié le 15 mai 2020 Mis à jour le 29 sept. 2020 Musique
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David Bowie - Une folle fraternité

18 septembre 1996, 15 heures : je suis à mon bureau à Décines. Le téléphone sonne : c’est Carole qui me dit en substance : « C’est pour maintenant. Tes parents sont en route pour Sérézin ».

Je passe avertir le secrétariat du service, et je file à la maison. Quand j’arrive, mes parents sont sur le point de repartir avec mes deux petites chéries et nous nous retrouvons tous les deux.

« Ya pas le feu », me dit Carole, « Je te dirai quand on partira ».

Pour patienter, je décide d’écouter quelque chose. Je choisis l’album « The Man who sold the world » de David Bowie. Je nous revois encore assis sur le canapé, un peu anxieux. Au bout de quelques minutes, Carole se lève et suggère d’y aller. La dernière chanson entendue avant de partir est « All the madmen ». Je prends le volant avec cette musique dans ma tête.

Deux heures plus tard, nos deux garçons font connaissance avec le monde extérieur. Ils sont nés avec de bonnes vibrations musicales dans le liquide amniotique. Nos filles étaient nées trois ans plus tôt avec du « Château Montrose » dans les veines. Deux bons départs dans la vie...

“The man who sold the world ”, sorti en 1970, est le troisième album de David B. Dans l’album précédent, la superbe chanson “Space Oddity” l’a fait connaître du grand public. Ici, son génie continue à s’affirmer, son esprit provocateur aussi : sur la pochette, il pose allongé, en robe (on est en 1970, ne l’oubliez pas. Boy George n’a rien inventé, que ce soit du point de vue musical – ça on le savait - ou vestimentaire). Cette pochette a du reste été censurée aux États-Unis à la sortie de l’album.

David Bowie avait un demi-frère, Terry Burns, plus âgé que lui. Ils se fréquentent beaucoup pendant l’adolescence de David. Terry Burns souffrait de schizophrénie et passa de plus en plus de temps en hôpital psychiatrique. En 1985, il mit fin à ses jours.

Dans la chanson « All the madmen », Bowie se met dans la peau d’un personnage enfermé dans un asile. Ses docteurs le pensent guéri et vont lui proposer de sortir.

Day after day

They tell me I can go

They tell me I can blow

To the far side of town

Mais il ne veut pas y aller

Because I'd rather stay here

With all the madmen

Than perish with the sad men roaming free

And I'd rather play here

With all the madmen

For I'm quite content they're all as sane as me

On ne peut s’empêcher de faire un parallèle avec ce que vit son demi-frère. D’autant plus qu’au final il entonne une litanie a priori incompréhensible en psalmodiant (en français) :

Zane, Zane, Zane, ouvre le chien

 Dans le livre “David Bowie, une étrange fascination” de David Buckley (2004), l’auteur avoue ne pas savoir à quoi cela correspond. Jérôme Soligny, dans « David Bowie ouvre le chien » (2015), cite l’artiste :

« Ouvre le chien » est un coup de chapeau à « Un chien andalou » de Buñuel. Mon frère avait des visions à cette époque, et je sentais une sorte de relation entre le film et l’état d’esprit dans lequel il se trouvait.

Le moins qu’on puisse dire, c’est que Bowie avait de la suite dans les idées : il reprend ce refrain 23 ans plus tard dans la chanson « The Buddah of suburbia ». Lors de sa tournée « Outside » de 1996, un panneau lumineux est placé au-dessus de la scène où l’on peut lire, en lettres rouges : « Open the dog ».

 L’album « 1. Outside » sorti en 1995 a la particularité d’avoir été écrit suite à un séjour d’une semaine de Bowie et Brian Eno (son producteur) dans une institution autrichienne, la maison des artistes de Gugging. Cette maison a été fondée en 1981 par le psychiatre Leo Navratil, qui avait fondé à la fin des années 50 l’hôpital psychiatrique voisin. Elle mêle patients et artistes et pratique l’art-thérapie. Ensuite, lors des sessions de « 1. Outside », Bowie peignait dans le studio et composait en même temps. La pochette de l’album en témoigne.

De ” The man who sold the world ” à ” 1. Outside”, la boucle est bouclée. On ne m’enlèvera pas de l’esprit que l’œuvre immense de Bowie entre ces deux jalons a été en partie guidée par le rapport qu’il entretenait avec son frère, sa maladie et sa disparition.

Côté musical (ça a son importance, quand même !), « All the madmen » est à mes oreilles une chanson magnifique, une de mes préférées du Spaceboy, au cours de laquelle Bowie varie aussi bien les rythmes que les timbres de sa voix. De toute évidence, il tente de reconstituer l’univers d’un enfant perturbé – ce que Buckley qualifie de « childlike dementia » : on en est convaincu à l’écoute de ces quelques vers parlés, avec paroles d’enfants en bruit de fond :

Where can the horizon lie

When a nation hides

Its organic minds

In a cellar, dark and grim

They must be very dim

Quel est l’avenir d’une nation qui cache ses esprits dérangés dans des caves sombres et tristes ?  

La ligne de basse est très bien travaillée par Tony Visconti. Pour ce qui est de la guitare, ça commence acoustique (Bowie), puis le puissant Mick « Ronno » Ronson prend le relais et nous électrifie tout ça. Il prend soin de nous jouer une partition superbe, tout en laissant au chanteur la place qui lui revient.    

C’est ici : Bowie - All the madmen

En un peu plus de cinq minutes, et un peu plus de 25 ans ensuite, Bowie a illustré la douleur et le manque liés à la disparition d’un être aussi proche. Il a eu son génie pour pouvoir l’exprimer, ce qui l’a sûrement aidé.

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