Episode 6 : Mensonge
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Episode 6 : Mensonge
Ysak n'eut pas le temps de fuir. Il fut soulevé et bâillonné avant d'être jeté sur l'épaule de ce monstre. Quel idiot. Pourquoi avait-il fallu qu'il panique et déserte cette maison douillette ? Au loin, il pouvait percevoir la voix sourde de Jean qui l'appelait. Qui rouspétait. Mais il ne pouvait lui répondre. Pas avec cet épais morceau de tissus dans la bouche. Ysak se débattait comme un diable, mais son assaillant tenait bon. Impossible de le faire lâcher prise. Alors, après plusieurs minutes de lutte acharnée, il abandonna. La voix de Jean s'était éteinte dans les bois. La lumière éclatante du soleil avait disparu dans une terrible tempête de neige. Il était seul. Il était fichu.
- Désolé, mon garçon. Je ne voulais pas t'effrayer, mais je n'avais pas le choix.
La voix rauque et chaude de l'inconnu surprit Ysak. Elle était bien différente de ce qu'il s'était imaginé. Elle était bien différente de celle d'un être sanguinaire et sombre. Elle lui semblait étrangement familière. Pourquoi ?
Le prédateur ralentit le pas avant de s'arrêter à l'entrée d'une immense clairière. Il posa Ysa au sol et lui défit son bâillon.
- Bienvenue chez toi, mon garçon.
Soudain, le paysage devint flou et apparut devant les yeux ébaïs d'Ysak un magnifique village, semblable en bien des points à Ysaldore : ces courbes délicates, les jeux de lumières et cette délicieuse odeur de myosirelles. Comment était-ce possible ?
Une main puissante incita Ysak à avancer. Les rues étaient pleines de vie : des enfants jouaient à la marelle, couraient après de pauvres poules, des marchands remplissaient leurs étales de merveilleux mets aux parfums exquis et des passants se promenaient. Aucun chuchotement curieux à son passage, seulement des "bonjours" polis. Personne ne se moqua de son allure robuste, de sa mâchoire carrée et de ses grands yeux bleus. Personne ne le traitait en paria. Pas comme à Ysaldore...
Lorsqu'ils arrivèrent devant une immense bâtisse, le prédateur s'arrêta et frappa à la porte. Celle-ci s'ouvrit dans un grincement strident sur une femme d'une beauté éblouissante. Lorsqu'elle les aperçut elle se jeta au cou de l'homme sans même prêter attention à Ysak. Après un long baiser, elle posa les yeux sur le jeune garçon avant de crier de joie :
- Ysak. Mon chéri. C'est bien toi...
Les yeux emplis de larmes, elle le prit dans ses bras et le serra très fort. Comment pouvait-elle le connaître ? Qui était-elle ? Pourquoi lui semblait-elle si familière ? Son parfum, son sourire, le doux son des battements de son cœur... Ysak avait l'impression d'être chez lui, une sensation qui lui avait été étrangère durant toute son enfance.
Après plusieurs minutes sans bouger, l'homme nous invita à entrer. La femme desserra son étreinte sans lâcher Ysak. Elle l'embrassa sur la joue et lui proposa de s'installer au salon. Son contact était doux et réconfortant. Ysak ne voulait pas voir ce sentiment cesser. Il ne voulait qu'elle s'éloigne de lui, qu'elle le laisse seul. Heureusement, elle choisit un long canapé, s'y assit et lui fit signe de venir à côté d'elle. Ysak ne se fit pas prier. Il était comme un enfant refusant de quitter les jupons de sa mère.
L'homme prit un siège juste en face. Il les observa en souriant. À l'abri de tout danger, Ysak osa enfin poser les yeux sur lui. Sur le prédateur qui l'avait enlevé... Il ne put étouffer un hoquet de surprise : c'était comme regarder dans un miroir. Les grands yeux bleus, le nez un peu large, la mâchoire carrée et ce médaillon... L'inconnu aurait pu être son jumeau s'il n'avait pas une vingtaine d'années de plus que lui.
- Qui...
- Nous sommes tes parents, Ysak. Les véritables Anciens de la cité Ysaldore..., répondit l'homme.
Il avait l'air las et triste, comme si cette vérité lui pesait. Une vérité qui fit l'effet d'un électrochoc à Ysak. Tout était si confus dans son esprit. Comment pouvaient-ils être ses parents ? Ysak n'avait toujours connu que les rues d'Ysaldore. Et comment pouvaient-ils être des Anciens de la cité ? Jamais il n'avait vu leur visage, ni sur les portraits qui habillaient les murs de la grande bibliothèque, ni dans les livres qui en peuplaient les étagères.
Devant le silence d'Ysak, l'inconnu continua :
- Il y a de cela des années, nous avons découvert le passage pour Luna, une planète enchanteresse où il faisait bon vivre. Avec l'aide d'autres voyageurs de l'univers, nous avons bâti Ysaldore. Nous avons apporté notre magie et eux leur technologie. C'était parfait. Un véritable paradis, que nous avons voulu partagé. Grave erreur...
Malgré l'intensité du moment, Ysak s'endormit. Bercé par les caresses de la jeune femme, il n'avait pu lutter contre le sommeil. Ses parents l'observèrent tendrement quelques minutes, avant de l'installer dans une petite chambre décorée d'or et de bleu.
- Nous aurons tout le temps de lui expliquer... souffla la mère d'Ysak. De tout lui dire sur cet horrible mensonge qu'est devenu Ysaldore.
Image créée par Cédric GERARD à l'aide de l'IA Midjourney.
Texte de L. S. Martins (60 minutes chrono, sans relecture).