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Théorème (Teorema, Pier Paolo Pasolini, 1968)

Théorème (Teorema, Pier Paolo Pasolini, 1968)

Published Mar 24, 2021 Updated Mar 24, 2021 Culture
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Théorème (Teorema, Pier Paolo Pasolini, 1968)

"Théorème", mon film préféré de Pier Paolo PASOLINI a gardé intact son pouvoir de fascination plus de cinquante ans après sa sortie. Son titre souligne sa rigueur mathématique implacable. Le film se compose de deux parties d'une durée équivalente. Dans la première partie, un jeune homme qui s'avère être l'incarnation divine vient "visiter" tour à tour les cinq membres d'une famille de la grande bourgeoisie milanaise. Puis il disparaît brusquement au milieu du film. La seconde partie explore le bouleversement que cette rencontre entraîne sur chaque membre de la famille. Elle fait exploser les faux-semblants et met chacun face à lui-même ou plutôt pour la plupart, face à un vide insupportable. C'est le père qui se dépouille de tous ses biens et part errer et crier dans le désert, c'est la mère qui d'étreinte en étreinte cherche en vain à retrouver le moment de plénitude qu'elle a vécu avec le visiteur, c'est la fille qui n'a plus goût à rien et sombre dans la catatonie et le fils qui tente d'exprimer ce qu'il a ressenti par la peinture sans y parvenir. Seule la bonne, retournée dans son village et réfugiée dans une pose méditative parvient à trouver Dieu en elle ce qui se manifeste par des interventions surnaturelles dans la plus pure tradition évangélique: elle opère des guérisons miraculeuses, elle lévite, elle fait jaillir une source de larmes.

Pier Paolo PASOLINI a réussi un film qui démontre que la vraie foi, la vraie spiritualité est incompatible avec les institutions, qu'il démolit méthodiquement. Logique pour quelqu'un qui se situait dans les marges du monde. De ces institutions (l'Eglise et ses dogmes castrateurs mais aussi le capitalisme et son culte de l'argent, la bourgeoisie et sa domination de classe), il en fait littéralement table rase, ne laissant plus à l'image que les étendues désertiques des pentes de l'Etna qui reflètent l'état réel de dénuement des membres de cette famille aisée (en plus de revenir aux sources du christianisme). Et il démontre de manière éloquente et provocante que l'acte sexuel lorsqu'il est don de soi ("ceci est mon sang [...] ceci est mon corps") est l'expérience mystique suprême là où l'Eglise catholique a décrété que la chair n'était que péché, divisant et coupant l'être de toute possibilité de transcendance. Voilà pourquoi un tel film put quasiment en même temps recevoir le grand prix de l'Office catholique et être condamné par le Vatican, faire scandale et porter encore aujourd'hui la mention (sur le DVD que j'ai emprunté à la médiathèque) "interdit aux moins de 18 ans"* alors que n'importe quelle grosse comédie familiale grand public bourrée d'obscénités passe crème.

* Au niveau des images, ce qu'on voit de plus scandaleux, ce sont des gros plans d'entrejambes d'hommes (vêtus) en posture "manspreading" servant à exprimer par l'image le désir sexuel que les membres de la famille ressentent pour le visiteur. Cette soudaine pudeur dans une société saturée de consommation sexuelle a quelque chose de pathétique, de risible. De plus, Pier Paolo PASOLINI alterne ces plans avec ceux des visages en gros plans, beaux comme des icônes. Que ce soit celui de Terence STAMP dans le rôle du messager de l'amour divin, de Silvana MANGANO dans le rôle de Lucia la mère, de Anne WIAZEMSKY dans celui de la fille Odetta ou encore de la sublime Laura BETTI dans celui d'Emilia la bonne, chacun s'est imprimé durablement sur ma rétine.

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