Jo Wedin & Jean Felzine, la suédoise et le français. Jean Felzine, c’est l’un des membres de Mustang, ce groupe français incroyable et je pèse mes mots. Il faudra bien un jour tout de même qu’on leur rende justice et que l’on place leur œuvre à la hauteur qu’ils méritent.  Mais c’est une autre histoire que je conterais peut-être, ici même.

Jo et Jean donc : Un duo étonnant, détonnant et époustouflant. C'est leur deuxième opus, le précédent, était déjà un coup d'essai réussi sur toute la ligne.

Pique-Nique  2017

Jo & Jean 2021

D'entrée de jeu, j'ai eu l'impression d'entendre Abba avec Jag vill inte höra (Je ne veux plus entendre) et chaque titre épouse au mieux la pop que ce titre explore avec délice.  La variété est au rendez-vous, cela pourrait être un vilain mot pour certains, mais je rassure chacun, ici, la variété, c’est la richesse des chansons, du parfum qu’elles savent à chaque fois faire exploser dans leurs fragrances multiples.

Jo et Jean n'ont pas peur, ils font monter la musique avec leurs voix conjuguées et réunies, mais sans jamais la faire dérailler, où sans que le sucre ne provoque chez nous une glycémie fatale. Et cela c’est rare. Enfin, voilà un album qui sait marier la chanson française au rock, à la pop, et où l’électro s’y glisse parfois avec délice ; l’anglais s’en vient chantourner au détour de certaines plages sans que cela dérange, faisant monter le plaisir des sens, cela dans l’écoute subtile qui s’ensuit, avec le mariage des mots, des consonances et des sonorités qui s’y emmêlent.

Ce qui est rare aussi c’est que sur chaque morceau, la surprise est au rendez-vous et ils vous font monter, avec eux, sur les sommets qu'ils atteignent ensemble, où les mélodies, qu’ils font jaillir, s'entrechoquent, sur des paroles, si profondes, qu'elles se glissent, pour ma part du moins, au plus intime de l'être.

Les mots ne s'essoufflent jamais et en réécoutant tous ces morceaux, on découvre dans leurs sonorités d'autres sens encore, d'autres exaltations. Avec l’excitation et le plaisir renouvelé d’une redécouverte assurée.

Jo et Jean pour notre plus grand plaisir, donc, développent, à tour de rôle, des personnages, où défilent avec eux des résonances parfois fébriles et d'autres fois, plus désenchantées, sur les jeux de l'amour et de la cruauté qu'il peut entrainer.  

Ils nous racontent, en chansons, le désamour qui nous guette parfois, en ces relations qui s'useraient, mais aussi tous ces hauts et ces bas, du quotidien et du banal qui survient alors et qui rompt si souvent l'enchantement.

L'air de rien, sur leurs petits airs et leurs belles chansons, si simples, Jo avec Jean fait se dérouler tout le long du fil de leur album les troubles que provoquent toutes ces équations inconnues et ces mystères qui lient une femme avec un homme...  ce qui nous rassemble ou nous désassemble.

Ce qu’ils nous chantent et ce dont ils témoignent, le faisant passer au travers du tamis de leurs chansons. C’est tout cela. Et leurs paroles communes déroulent avec  un esprit et une finesse qui pourrait parfois paraitre acerbe, notre quotidien et notre banalité ; et ce qui est plaisant, c’est qu’ils demeurent tous les deux, sur le bord, révélant également cette fragilité qui est la leur comme la nôtre.

C) Louis Teran

Mais point de misérabilisme en tout cela, bien au contraire, la jouissance est aussi au rendez-vous car leurs chansons sont pareilles à des rondes endiablées qui, dans les parfums que leur musique distille se conjuguent et se marient avec une aisance incroyable.

photo de couverture C) Astrid Karoual