Chapitre 5 : Le Titan

Au beau milieu de la nuit, l’atelier de l’Orfèvre est plongé dans la lueur de

quelques bougies. Cinq chaises, au lieu de quatre, trônent au milieu de la pièce mais

deux d’entre elles sont inoccupées. Une nouvelle recrue vient tout juste d’arriver.

Jack, un berger allemand imposant qui a la réputation d’être le meilleur pilote d’aéroniche de la Révoltruffe. C’est un allié de poids pour ce groupe de résistants, qui

atteint désormais le nombre de cinq. Chaque membre est d’une grande importance,

dans ce petit comité. Il faut dire que, s’ils étaient plus nombreux, le secret serait plus

difficile à tenir…

Depuis plusieurs heures, l’Orfèvre attend nerveusement l’arrivée de Lisa et du

Général Cocker en imaginant déjà le pire. Il s’en veut terriblement de ne pas avoir

retenu l’Amiral Cabos plus longtemps lorsqu’il faisait diversion. Le teckel ne

pouvait rien faire face à l’impatience du chef de la Révoltruffe, qui est déjà assez

furieux comme ça… Malgré tout, l’Orfèvre espère que ses associés n’ont pas eu trop

d’ennuis et qu’ils vont lui apporter une bonne nouvelle.

Des petits coups donnés dans la porte résonnent. L’Orfèvre bondit de sa chaise

pour aller ouvrir, à la fois excité et anxieux.

Le visage déçu de Lisa est le premier à apparaître à la lumière des bougies. Puis

le Général Cocker franchit le seuil, droit comme un piquet, avec un air stoïque qui

lui est propre. Le teckel aimerait leur poser une myriade de questions mais, avant

même que quiconque ne prenne la parole, Cocker tape dans ses pattes et s’éclaircit

la gorge.

– Chers alliés, cette mission ne s’est pas déroulée comme prévu. Cabos nous a

surpris en train de fouiller son bureau. (Billy et l’Orfèvre retiennent leur respiration.)

Pas la peine de vous préciser que ça ne lui a pas trop plu… J’étais déjà dans son

collimateur et, cette fois-ci, il n’a pas hésité à me proférer des menaces. S’il

s’aperçoit de ce que nous préparons, je finirai à coup sûr dans la prison des félins.

Tâchons d’être plus discrets à l’avenir. Mais sachez que je ne regrette rien : j’étais

conscient du danger. Je souhaite simplement m’excuser auprès de toi, Lisa, pour les

risques que je t’ai fait courir.

– C’était mon choix, répond Lisa en secouant la tête. J’étais volontaire dans cette

mission.

L’Orfèvre s’apprête à retourner s’asseoir tristement. « Un échec, se dit-il. C’est

à cause moi. J’ai échoué ! »

Le Général Cocker, quant à lui, reprend avec le sourire :

– Comme je vous l’ai dit, cette mission ne s’est pas déroulée comme prévu. Mais,

malgré cette mauvaise rencontre, je vous annonce que l’objectif a été atteint !

Le cocker s’approche fièrement de la table centrale et pose un objet familier, sous

des regards stupéfaits. Jack est le plus surpris d’entre eux.

– Le … livre des Cinq Mondes ?! s’exclame l’Orfèvre, avant de se mettre à

bégayer. Saperlicroquette !

– Nous avons pris des risques mais cela a payé… se réjouit Cocker en s’asseyant.

Maintenant, prenons place et réfléchissons. Le temps est compté. Nous avons le

livre, c’est un bon début, mais nous devons trouver un texte qui nous renseignera sur

les projets de Férus.

Lisa s’assied à son tour. L’ambiance qui baigne l’atelier est bien plus agréable et

propice à la concentration. Seul le bruit des pages tournées les unes après les autres

se fait entendre. Tout en feuilletant ce précieux ouvrage, le Général Cocker propose

des pistes de réflexion :

– Férus est une panthère de feu. Nous avons déjà émis l’hypothèse qu’il se repose

actuellement dans un endroit chaud. Son objectif est de ravager Ethélys par le feu.

Et, justement, je viens de retrouver la fameuse Légende de Férus, elle est devant mes

yeux.

Cocker tient le livre des Cinq Mondes en évidence, pour que tout le monde puisse

le voir, et le tourne dans tous les sens comme si un objet pouvait se cacher à

l’intérieur.

– C’est curieux… souffle l’Orfèvre en plissant ses petits yeux. J’ai l’impression

qu’il manque une ou deux pages à la Légende de Férus. Qu’en dis-tu ?

– Hmmm… tu as raison, confirme le cocker. Cela ne m’étonne guère : ce livre

est si vieux qu’il tombe en miettes. Il a dû perdre des pages avec le temps. Ce texte

ne nous apprendra rien de plus, j’en ai bien peur… Cherchons ailleurs. (Le Général

tourne quelques pages.) Voici la carte globale d’Ethélys, elle pourrait nous être utile.

D’après vous, qu’est-ce qui serait capable de réduire notre monde en cendres ?

Tous les yeux sont rivés sur la carte. Aussi peu précise soit-elle, elle permet au

moins de rendre une vue d’ensemble des différents territoires : les Montagnes de

Glace, le Hurle-Bois, les Plaines de l’Ouest, le Canyon rouge, la Vallée volca…

– Les volcans ! s’exclame Lisa en sautant de sa chaise. Il n’y a que les volcans

qui possèdent une telle puissance. Peut-être que Férus cherchera à les réveiller, ou

quelque chose comme ça.

– Tu as sûrement raison, Lisa ! acquiesce le Général Cocker. Je cherche le

premier mythe qui parle de volcans…

Après quelques minutes de recherche, il semble enfin soulagé et annonce :

– Le Titan ! J’ai trouvé le récit du Titan. (Billy ne semble pas connaitre le Titan.)

Il s’agit du plus grand volcan de notre monde, il se situe au Sud. S’il y a un volcan

que Férus cherchera à réactiver, c’est le Titan. Seulement, il y a un petit problème…