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saut à l’élastique

saut à l’élastique

Publié le 1 mai 2022 Mis à jour le 1 mai 2022 Culture
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saut à l’élastique

Vidéo de la grue et des sauts lors de Solidays en 2018.

Mon saut est beaucoup plus vieux.

Septembre 2003, fête des associations.

Je vis à Evry depuis un an, en région parisienne. « Accidenté » de la vie, je suis divorcé et en recherche d’emploi. J’ai plus de quarante ans et cette situation est déstabilisante, mes enfants adolescents Fanny et Nicolas me manquent plus que tout.

Je me suis impliqué dans des associations caritatives pour avoir un minimum de vie sociale. Grâce à la présidente de l’une d’elles, grande réseauteuse, j’ai pu lors d’une soirée côtoyer le jeune maire d’Evry de l’époque, Manuel Valls futur premier ministre. Il était bien différent de ce qu’il est devenu.

Donc, ce dimanche 28 septembre, je déambule sans but précis entre les stands de la fête des associations installée sur une grande esplanade le long de la Seine. Il y a beaucoup de monde, je dois rejoindre en fin de journée le stand de l’association où je suis bénévole formateur bureautique et internet. J’arrive devant une attraction hyper spécifique qui attire une longue file de jeunes. Il s’agit de sauter à l’élastique, mais pas au dessus d’un pont. On est en ville et il y a un énorme camion qui sert normalement à assembler les grues de chantier. Il est équipé d’une petite nacelle qui monte à 60 mètres de haut. Il y a une cinquantaine de jeunes qui font la queue, et un saut toutes les minutes. Je m’estime un peu « déséquilibré » dans ma tête car mon futur n’est pas serein, je décide de faire cette expérience de « bravade de la mort ». On paye 10€, on signe une déclaration sur l’honneur dégageant l’association ’’Une idée en l’air’’ de toute responsabilité en cas de problème suite au saut (accidentel, physique, psychique…).

Je suis seul, je ne cherche aucune esbroufe, au contraire des autres jeunes autour et qui sont en groupe et qui se prennent en photo (les téléphones portables ne sont pas encore des ordiphones qui filment). On est censé sauter en individuel sauf ceux qui veulent sauter en double. C’est bientôt mon tour après une dizaine de personnes et ils annoncent qu’ils ont pris du retard et que tous les prochains sauts seront en double. Comme je suis inscrit, ils incitent les autres personnes de la file à se mettre en doublon et un jeune me rejoint gagnant ainsi une dizaine de places.

C’est à nous dans quelques places et deux jeunes filles amorcent leur montée, le temps passe sans qu’elles sautent, 3 puis 4 minutes et la nacelle redescend avec les 2 filles qui n’ont pas osé sauter. Les animateurs les mettent de coté et font passer d’autres jeunes. Il y a bien évidemment un animateur avec les candidats au saut dans la nacelle. Alors juste avant que ce soit notre tour, un animateur chevronné, près de la soixantaine, cheveux gris et longs avec une petite queue de cheval, d’allure très sportive style forain monteur de chapiteaux de cirque prend la place du jeune animateur dans la nacelle et accompagne les deux jeunes filles qui avaient eu peur. Elles remontent et l’animateur arrive a les convaincre de sauter. Elles vont crier 10 fois plus que les autres, pas d’émotion ou de bravade comme dans les manèges à sensation des fêtes foraines, mais vraiment de peur et d’effroi. C’est notre tour, je fais presque 90Kg et mon compagnon de saut, inconnu il y a 15 minutes est plus petit et moins costaud que moi.

Photo ticket « Bon pour harnachement »

On nous équipe sans problème (il faut absolument vider toutes nos poches et enlever tout ce qui ne tiendrait pas bien), on a chacun un harnais mais l’élastique nous lie chacun par une de nos jambes qui sont donc jointes. On monte dans la nacelle, avec le jeune animateur. Je peux le dire tout de suite, c’est cette lente montée qui est la plus impressionnante. On se retrouve au dessus de la cime des arbres, puis les gens et les objets rapetissent très vite et on se retrouve bien vite bien haut. 60 mètres, il y a forcément un peu de vent, la nacelle bouge et on ne doit pas sauter comme un plongeon dans la piscine, on voit bien qu’il va y avoir une chute vertigineuse et rectiligne. L’animateur nous a fait croiser nos bras qui se cotoyent en attrapant chacun dans le dos une sangle de l’harnais du partenaire, on lève l’autre bras, l’animateur ouvre la petite porte de la nacelle et on saute sans un quart de seconde d’hésitation. Mentalement et psychologiquement, c’est du suicide, j’estime que ce n’est possible sereinement la première fois que si on est un peu prêt à mourir. La montée dure 30 secondes, le saut moins de quatre, c’est presque consternant. Je n’ai pas fermé les yeux mais mon cerveau n’a rien enregistré, c’était trop imprévu et inhabituel et trop bref (j’ai le souvenir de manèges à sensation où j’avais aussi gardé les yeux ouverts et bien mémorisé les scènes). Il y a encore 3 ou 4 secondes de rebonds, on se redresse en attrapant le haut de l’élastique et on est au sol (je pense qu’à la tension maximale de l’élastique on approche de moins de 5 mètres du sol).

Si vous êtes tenté par cette expérience du saut à l’élastique, je vous suggère de le faire comme moi en ville plutôt qu’au dessus d’un pont car la montée est autrement plus stressante que la chute (au moins elle dure 30 secondes).

À l’issue du saut, on a une sorte de certificat, je ne sais plus où je l’ai rangé, j’étais un peu déçu des sensations. J’ai rejoint le stand de mon association sans le moindre sentiment de fébrilité, je trouve que les rapports humains sont hautement plus significatifs et enrichissants.

Je me souviens de François Montenegro, un jeune collègue à France-télecom qui se vantait d’avoir pris l’avion sans presque jamais atterrir. Il faisait des sauts en parachute, prescrits par son médecin 6 fois par an pour soigner son hypophyse qui ne sécrétait aucune dose d’adrénaline en « temps normal ».

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