CHAPITRE 7
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CHAPITRE 7
Un valet est inquiet – Réflexion sur la magie – Rassurer n’est jamais aisé.
Plusieurs jours s’écoulèrent avant que je n’eusse la moindre nouvelle du corps retrouvé au sanctuaire, plusieurs jours qui me laissèrent le loisir de songer à mon enfance et à ce lien étrange entre les créatures qui l’avaient bercée et la mort. Car il me semblait qu’elles avaient été présentes à chaque instant où la mort venait me chercher. M’avaient-elles sauvé ou au contraire étaient-elles là pour prendre ma vie et avaient-elles échoué ?
Même durant le conseil des ministres, j’avais du mal à les chasser de mon esprit. Il me semblait que si quelque créature qui soit attentait à la vie du roi, c’était une affaire royale. Bien sûr, ce n’était l’avis de Bontemps qui, me voyant soucieux et n’ayant rien raté de mon échange avec Perrette, m’observait depuis d’un œil vigilant.
À de nombreuses reprises, au détour d’une conversation tout à fait banale, il me posait une question qui semblait anodine afin de s’enquérir de ma santé. Je n’aurais su lui en faire le reproche. Si ces créatures, imaginaires ou pas, me détournaient des affaires de l’État, il était dans son devoir d’agir. Je lui avais demandé de faire ainsi lors de la prise de ses fonctions : pas une femme, pas un membre de ma famille, pas une passion, rien ne devait me détourner de mon devoir, car l’État c’était moi.
La troisième fois qu’il me posa la question, nous étions alors en train de parcourir les jardins d’un pas vif, je me tournais vers lui brusquement.
— Bontemps, je sais qu’il est de votre devoir de vous soucier de mes capacités à gouverner et de mon dévouement à mes fonctions de roi, mais je vous assure qu’il s’agit là d’une affaire d’État.
Mon fidèle serviteur qui me suivait en chaque instant et anticipait le moindre moment de ma journée m’observa avec une vive inquiétude. Je secouais la tête en m’approchant de lui et posais ma main sur son bras.
— J’ai conscience de l’impression que je peux vous donner à évoquer des fantasmagories comme si elles étaient réelles. Mais supposons que ce ne soit pas des fantasmagories, supposons que ces créatures qu’enfant j’avais vues existent. Qu’elles aient toujours été là, dans l’ombre, suivant chacun de mes pas. Le fait qu’elles apparaissent au moment où la mort rôde me laisse à suspecter qu’elles ne sont pas bienveillantes. Et si elles voulaient ma mort, ne s’agirait-il pas d’un complot qu’il faudrait ourdir ?
Aucun de mes mots ne semblait faire mouche, mais je ne comptais m’arrêter en si bon chemin. Il me fallait convaincre Bontemps, ne serait-ce pour me convaincre moi-même qu’il ne s’agissait pas là de folie. Je n’avais nullement le temps pour chasser des chimères.
Nous étions en guerre, il me fallait décider des stratégies à suivre, nous avions un pays à moderniser, de nombreuses infrastructures devaient être établies, et enfin, j’avais un palais à construire. Versailles était loin d’être fini. Les travaux avaient bien avancé, mais si je voulais que toute la Cour puisse s’y installer il me faudrait encore de nombreux appartements ainsi qu’une chapelle et peut-être même un opéra ! En tout cas assurément un théâtre. Je ne pouvais pas décemment faire jouer Molière et sa troupe indéfiniment dans les jardins.
Mes doigts serrèrent un peu plus le bras de mon fidèle serviteur qui posa ses yeux sur ma main avant de revenir sur mon visage.
— Le fait est que ces créatures hantent bel et bien mes nuits. J’en ai encore rêvé, toujours ce corps qui s’anime et se métamorphose devant mes yeux comme dans les œuvres d’Ovide. À l’exception que la créature que j’ai sous les yeux tient plus de la chimère.
L’idée se fit un chemin, galopa dans mes pensées, et se nicha au creux de ma psyché agitée.
— Alchimique, il me faut un alchimiste ! Peut-être pourrait-il me répondre ! Ou quelqu’un étudiant la magie et les créatures mythiques.
La pauvre tête de Bontemps s’agita, il était désespéré de m’entendre parler ainsi, continuer cette quête qui à ses yeux était tout aussi inutile que folle. J’avais voulu le rassurer et je le plongeais dans la perplexité et l’inquiétude. Je relâchais son bras et inspirais, essayant de calmer mes humeurs. J’étais bien trop empressé dans cette affaire, je me laissais bien trop dominer par mes émotions. Comment un corps dans les bois pouvait-il m’agiter ainsi ? Je soupirais en tournant les talons pour reprendre notre marche, ne voulant faire trop attendre Le Nôtre.
— N’ayez cette expression, Bontemps, j’ai bien conscience de la folie que je pourchasse, mais mon instinct, qui me trompe rarement, me dit qu’il s’agit là d’une affaire d’importance et que l’ignorer serait tout aussi risqué que stupide.
Je ralentissais le pas afin de ne pas le distancer. Nous n’avions que quelques années de différence, mais j’étais doté encore de la fougue de la jeunesse que cette chimère fantastique semblait alimenter.
— Je me dois de vérifier, Bontemps, qu’aucune cabale ne se tisse contre ma Cour.
Peut-être que les croire décidées à me tuer était par trop égoïste, mais n’était-ce pas vraisemblable que des personnes pratiquent la magie noire ? Si cela eut été crédible dans la campagne bretonne, c’était plus surprenant ici, à deux pas de mon Palais.
Pourtant l’Empereur Rodolphe n’avait-il pas rassemblé des alchimistes dans sa fameuse rue d’Or à Prague ? La grande reine Élisabeth en avait accueilli dans sa Cour et les avait protégés. Encore aujourd’hui, nombre de mes sujets consultaient sorcière, rebouteux et alchimistes pour se soigner de toutes sortes de maux.
Et quand je voyais mes médecins procéder à des saignées même lorsqu’il s’agit d’une femme enceinte, je me demandais si les guérisseurs ne feraient pas un meilleur travail. Et si la magie n’avait pas disparu, pas complètement, et que ces créatures fantastiques dont parlaient nos ancêtres étaient furieuses justement d’avoir été oubliées ?
Bontemps soupira.
— Qui dois-je appeler Sire ?
Toute la question était là, comment joindre les mystiques que j’avais exclus de ma Cour ? J’avais choisi de régner sans l’aide des astrologues et reléguer ces questions à de la superstition. Nous étions dans le Grand Siècle où dans les salons les discussions éclairées portaient sur la science, les dernières découvertes sur la terre, l’humanité et son histoire. La magie n’y avait plus de place hormis peut-être dans les boudoirs. Mon regard étincela, je connaissais parfaitement, même intimement, quelqu’un qui croyait en tout cela et consultait encore médium et sorcières.
— Personne Bontemps, je verrais cela avec la marquise de Montespan.