Les Fleurs de Shanghai (Shang haï hua, Hou Hsiao-hsien, 1998)
On Panodyssey, you can read up to 10 publications per month without being logged in. Enjoy9 articles to discover this month.
To gain unlimited access, log in or create an account by clicking below. It's free!
Log in
Les Fleurs de Shanghai (Shang haï hua, Hou Hsiao-hsien, 1998)
Le film dont s'est inspiré Bertrand BONELLO pour "L Apollonide, souvenirs de la maison close" (2010) présente les mêmes qualités mais aussi les mêmes défauts que sa version française. Côté qualités, "Les Fleurs de Shanghai" est une merveille d'esthétisme. Huis-clos situé dans un bordel de Shanghai à la fin du XIX° siècle, il se déroule dans seulement trois décors où ont été filmé une suite de plans-séquence composés comme des tableaux ce qui permet au spectateur d'en admirer chaque détail. Le passage d'une séquence à l'autre se fait par un fondu au noir ce qui donne l'impression que l'on éteint et rallume une lanterne. Les couleurs et lumières sont travaillées à l'extrême avec des dominantes rouges, vertes et jaunes et le tout baigne dans la fumée d'opium. Dans ce qui peut s'apparenter à un théâtre, on observe le jeu de dupes qui s'instaure entre les habitués (des hommes hauts placés, plus ou moins jeunes qui viennent là pour se distraire de leur vie toute tracée parmi lesquels se détache M. Wang joué par Tony LEUNG Chiu Wai) et les courtisanes aux noms de fleurs, de métaux ou de pierres précieuses, des filles orphelines ou abandonnées achetées au berceau et formées par des mères maquerelles qui attendent d'elles un retour sur investissement. Tous jouent le jeu de la séduction, se montrent jaloux de leurs rivals/rivales, promettent ou espèrent le mariage alors que tout cela ne s'avère être qu'un simulacre dissimulant un monde où règne la seule loi du rang et de l'argent. La seule fille qui semble parfaitement lucide est Emeraude qui utilise ses gains pour racheter sa liberté à sa patronne et fonder sa propre maison de passe. Un tel film n'est pas sans résonance avec ceux de Kenji MIZOGUCHI, notamment "La Rue de la honte" (1956). Mais là où Mizoguchi réalisait un film coup de poing pour dénoncer la condition de ces femmes, HOU Hsiao-Hsien se contente d'un bel exercice de style abstrait et répétitif dans lequel on ne ressent aucune espèce d'implication personnelle. D'ailleurs le paradoxe est que non seulement il n'y a aucun commerce charnel visible à l'écran mais que les personnages semblent privés de libido. On les voit tout au long du film causer, jouer au mah-jong, dîner, fumer de l'opium, se regarder en chiens de faïence et c'est à peu près tout. Autrement dit un court-métrage de 15 minutes aurait suffi plutôt que ce bien long exercice d'auto-contemplation. Autant j'aime les films autobiographiques de HOU Hsiao-Hsien, autant je n'arrive décidément pas à adhérer à ses films en costume, même si celui-ci est plus lisible et intéressant que "The Assassin" (2015). L'art pour l'art, très peu pour moi!