Ma famille
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Ma famille
20 Mars 13
Ici, j’ai trouvé une famille. Ici, j’ai trouvé des frères. Le F.B Stars. Six rastas mans congolais qui étaient là. Je les ai vus. Je me suis approché. Nous avons échangé. Ils m’ont fait asseoir à leurs côtés. Depuis, j’ai parmi eux ma place attitrée.
« Charles Kongo ! » « Kongo Man ! ».
C’est ainsi désormais qu’ils me surnomment. Ils me considèrent comme un des leurs. Ils me présentent comme leur frère. Ils disent que seule la couleur de peau diffère, mais il ne s’agit là que d’apparence extérieure. Ce genre de propos me touche vraiment. Je sais bien que je me suis quelque peu congolisé. J’ai appris leurs codes, leur façon de parler, leurs expressions. J’ai appris à regarder les choses avec leurs yeux. Je crois qu’ils ont particulièrement apprécié cet intérêt que je leur ai porté, cette intégration congolaise que j’ai cherchée, cette adaptation à laquelle je me suis attelé pour passer 6 mois au Congo parmi les Congolais.
Kitio
Un blanc parmi les noirs. Un mundelé parmi les mundombis. Ce n’est pas évident ! Ici la très grande majorité des blancs vivent entre blancs. Ils côtoient les noirs, travaillent avec eux, commercent avec eux. Mais l’écart culturel est trop grand, et il fait bon, voire il est vital de se retrouver entre compatriotes pour retrouver des repères sécurisants et réconfortants. Avec toute sa bonne foi, un ami blanc me disait : « ils ne sont pas comme nous, ils ne fonctionnent pas comme nous ; quand tu es ici depuis longtemps, tu ne peux pas vivre avec eux, tu as besoin de te retrouver entre blancs et de vivre une vie à l’européenne. »
C’est vrai, la difficulté est grande ! Les incompréhensions sont nombreuses, les efforts d’adaptation épuisants, beaucoup de choses sont sujettes à agacement voire à exaspération ; et surtout il y a facilement de quoi se décourager face à cette vision qu’ils ont du blanc. Non, pas de racisme, pas d’agressivité, mais plutôt quelqu’un dont on va toujours essayer de soutirer un peu d’argent.
Magic
Moi, ici, j’ai eu la chance de trouver ma famille du F.B Stars. Et grâce à eux je suis resté un blanc parmi les noirs. Alors c’est vrai qu’ils sont assez à part par rapport aux autres congolais. Ce sont de vrais rastas, dans leur aspect comme dans leur tête. Ils ont des valeurs, des valeurs qu’ils défendent, chose rare face à cet opportunisme ambiant qui domine. Ils ont un état d’esprit tranquille, une philosophie de paix et de respect des autres, ils sont souriants, accueillants et ouverts à tous. Ils sont surtout désintéressés dans la relation, la qualité de la rencontre prime avant tout le reste, et ça c’est particulièrement plaisant. Tellement désintéressés qu’ils passent leurs week-ends dans un resto, à jouer 6 à 8h de suite sans s’arrêter pour une misère, sans jamais broncher. Alors que par leur présence ils permettent au restaurant de réaliser 90% du chiffre d’affaire, attirant une foule de gens toujours plus grande, ils n’ont que la cagnotte à leurs pieds pour pouvoir se rémunérer. Les journées sont pourtant difficiles pour trouver l’argent pour se déplacer, acheter de quoi manger, faire vivre une famille, payer le loyer à la fin du mois. Mais les priorités ne sont pas là. La musique est le sens de leur vie, au sacrifice de tout le reste. Et ils le disent eux mêmes : leur condition de vie simple, c’est aussi ça qui fait leur valeur, ou tout du moins leur mérite.
Moise
Mais tout ça va changer. Ils ont un véritable talent, je vous assure. Ils sont très complets. Leur musique mêle reggae et mélodies folkloriques locales. Les instruments tournent entre les frères, les micros aussi. Chacun chante à son tour dans des compositions très différentes. Magic c’est le reggae. Kitio les ballades locales. Kaiser se rapproche plus des airs de la RDC. Papito assurément ragga. Et Balladeur à la batterie assure les chants en écho. Tout ça donne un répertoire très varié, des chansons aux mélodies très prenantes et très dansantes, des morceaux qui durent dix à quinze minutes sans jamais se lasser.
Kaiser
Avec leur sélection aux jeux de la francophonie, à Nice au mois de septembre, ils espèrent enfin trouver des contacts, se faire connaître, rencontrer des gens qui vont les aider à promouvoir leur musique. A sortir de la galère où même lesimple enregistrement de leur disque est un combat sans fin. Où leur talent va enfin être reconnu à sa juste valeur. Et où ils vont enfin pouvoir vivre dignement de leur musique. C’est tout ce qu’on leur souhaite. Et moi j’y crois vraiment.
Balladeur
Papito