J'étais un enfant laid
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J'étais un enfant laid
Je n'étais pas bien grand
ou du moins tout autant
que je me trouvais beau.
C’est te dire à quel point,
lorsque j'étais gamin,
tout me semblait si haut,
hissé sur les pointes,
pour atteindre le rêve
d’une vie merveilleuse,
de mes pieds qui s’esquintent
par ces gestes qui saignent
les orteils des danseuses.
Et je voulais grandir,
pour dépasser d’une tête,
le chêne centenaire
que je voyais sourire,
qui depuis ma fenêtre,
me regardait de travers.
Sans doute qu’il jugeait ridicule
qu’un enfant puisse un jour le courber,
je n'étais pas bien grand
ou du moins pas tellement
lorsque l’arbre est tombé.
J'étais un enfant laid
ou du moins tout autant
que peut l'être le monde
qui fait des champs de blé,
des champs du néant
sous le bitume sombre.
C’est te dire à quel point,
lorsque j'étais gamin,
je n’avais pour passion
que de fuir l’humain,
enfermé dans l’écrin
de l’imagination.
La tête dans la lune et mon ciel étoilé
éclairant les images
qui dissipaient la brume,
faisaient glisser la plume
sur tant et tant de pages.
Sur des tapis de neige,
au royaume des proses,
les pensées se reposent…
J'étais un enfant laid
ou du moins imparfait
comme le sont tant de choses.
Je n'étais pas bien fort
ou du moins tout autant
que je me trouvais grand,
que tu saches à quel point,
lorsque j'étais gamin,
tout me semblait pesant.
C'était le dos voûté
que je trainais des pieds
et usais mes godasses,
quand le poids d'être né
venait à m’imposer
cette vie dégueulasse.
Et je voulais partir,
comme on prend un bateau,
pour aller voir la mer.
Ne jamais revenir,
et puis suivre l’oiseau
qui deviendrait ma terre.
Sur mon ile au trésor,
y déposer ce corps
que j’avais en fardeau.
Je n'étais pas bien fort
ou du moins pas encore
quand le navire a pris l’eau.
J'étais un enfant laid,
ou du moins tout autant
que peut l'être l’amour
qui se plait à briser
le cœur des aimants
depuis l’aube des jours.
C’est te dire à quel point,
lorsque j'étais gamin,
je n'avais de tendresse
qu’envers la solitude,
qui s’donne un mal de chien
pour tenir ses promesses.
Et c’est dans les nuages
valsant avec le vent
que je passais mes heures,
tentant de reconnaître,
dans leurs formes abstraites,
un semblant de bonheur.
Quand se ferment paupières
sur des gouttes de sel,
le ciel se fait silence.
J'étais un enfant laid
ou du moins imparfait
comme sont tant de croyances.
Je n'étais pas bien grand
ou du moins tout autant
que je me trouvais fort.
C’est te dire à quel point
lorsque j'étais gamin
tout me semblait si mort.
Le chêne centenaire, le bateau à voile,
l’amour et le monde
se donnaient des airs
d’inaccessibles étoiles
pour une tête blonde.
Mais quand l’arbre est tombé,
que l’bateau a coulé,
qu’aurais-je bien pu faire ?
Quand l’amour s’est pointé
et que le monde a tourné
trop vite et de travers.
Je n'étais qu’un enfant,
et en un court instant,
l’enfant s’est perdu.
Je n'étais pas bien grand
ou du moins pas tellement
quand l’adulte est venu…
Auteur, compositeur, interprète, guitare/piano et montage vidéo : Oren le conteur
Texte à retrouver dans "Nous n'irons plus voir la mer"
- Lire en mode PRIME (abonnement à la creative room prime ''œuvres complètes et textes inédits'' requis)
Marianne Thioux il y a 1 mois
Touchée…
L’adulte que je suis versé une larme en vous écoutant
À moins que ce soit l’enfant qui se cache à l’intérieur…
Merci 🙏
Oren Le Conteur il y a 1 mois
Merci infiniment, autant à l'adulte qu'à l'enfant
Aline Gendre il y a 4 mois
des mots qui nous prennent par la main jusqu'à la fin...
Oren Le Conteur il y a 4 mois
🌹😘