JUILLET
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JUILLET
Complainte amoureuse
Oui, dès l’instant que je vous vis,
Beauté féroce, vous me plûtes ;
De l’amour qu’en vos yeux je pris,
Sur-le-champ vous vous aperçûtes ;
Mais de quel air froid vous reçûtes
Tous les soins que pour vous je pris !
Combien de soupirs je rendis !
De quelle cruauté vous fûtes !
Et quel profond dédain vous eûtes
Pour les vœux que je vous offris !
En vain je priai, je gémis :
Dans votre dureté vous sûtes
Mépriser tout ce que je fis.
Même un jour je vous écrivis
Un billet tendre que vous lûtes,
Et je ne sais comment vous pûtes
De sang-froid voir ce que j’y mis.
Ah! fallait-il que je vous visse,
Fallait-il que vous me plussiez,
Qu’ingénument je vous le disse,
Qu’avec orgueil vous vous tussiez !
Fallait-il que je vous aimasse,
Que vous me désespérassiez,
Et qu’en vain je m’opiniâtrasse,
Et que je vous idolâtrasse
Pour que vous m’assassinassiez !
Alphone Allais
Reconnaissons que ce texte d'Alphonse Allais (1854-1905) à la tonalité gutturale frise l'outrecuidance , le décalage, l'absurdité voire l'incompréhension. Par sa complexité il atteint le comique, ce qui était le vouloir de l'auteur. Mais il a aussi pour mérite d'être écrit en vieux mais bon français avec une saine ponctuation pour reprendre haleine, écartelé entre le passé simple et l'imparfait du subjonctif -celui que nos jeunes générations n'ont jamais su poser sur leurs tablettes d'écoliers-. Il heurte le bon sens, fleure la décadence mais restaurera -un temps soit peu- dans les esprits, les générations pendant lesquelles il aura été usité dans la compréhension générale. Texte des passés donc, mais riche de modernité comme une reconnaissance éperdue du parler de nos anciens, ou clin d'oeil narquois à cette postérité décadente qui aura relégué les délices de notre si belle langue dans les poussières de l'oubli ?
Avec l'espoir que ce poème vous plût (ou bien plussent que celà)...
Le premier de chaque mois, un poète méconnu ou oublié se rappelle à votre bon souvenir.