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L'enfant de Rosporden - 6/6

L'enfant de Rosporden - 6/6

Publié le 25 déc. 2022 Mis à jour le 25 déc. 2022 Culture
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L'enfant de Rosporden - 6/6

Une nouvelle  publiée dans mon recueil "Adagio Affetuoso"

Chapitre 6

            Lorsque Stéphanie reçut le coup de téléphone de l’inspecteur de police de Rosporden lui annonçant à la fois la terrible nouvelle et la dernière volonté de la mère du petit Cédric, elle fut tellement émue qu’elle pleura sans savoir si c’était de joie ou de tristesse. Elle se sentit tout d’un coup responsable de cet enfant comme si c’était le sien. Aussitôt elle appela son amie Sandra qui la félicita : « une femme qui va mourir ne peut pas se tromper », lui avait-elle dit. Sandra lui conseilla aussi d’appeler Marc pour lui annoncer la nouvelle. Peut-être pourrait-elle obtenir maintenant quelque assouplissement des règles d’adoption compte tenu de la lettre d’adieu de la mère désignant Stéphanie pour prendre soin de ce bébé.

Marc décrocha le téléphone. Cela faisait deux jours qu’il n’avait pas eu de nouvelles de Stéphanie alors qu’il n’avait cessé de penser à elle. Son cœur s’accéléra. Il lui proposa de la revoir le soir même.

— Chez mon amie, alors. Je quitte mon travail à 20h. Nous vous attendrons.

Marc arriva à la station Villiers vers 19h30. Il passa au Monoprix où il savait que Stéphanie travaillait. Discrètement il s’approcha du rayon maternité/bébé pour observer Stéphanie sans être vu. Il pouvait la regarder à travers un stand présentant des rideaux et voilages. Il la trouvait belle. Sa façon de parler à la clientèle, ses gestes arrondis, son joli profil, ses petits rires brefs : tout cela le comblait de bonheur. Il remarquait qu’elle s’attirait de la gentillesse de la part des clientes qui lui posaient des questions ou lui prodiguaient des conseils. Elle était habillée d’un jeans recouvert d’une chasuble blanche froncée sous la poitrine et dont les plis se terminaient par une bordure en dentelle. En voulant s’approcher pour mieux l’admirer, il accrocha le présentoir qui tomba avec un grand bruit métallique. Aussitôt Stéphanie se tourna vers lui et vit Marc à terre empêtré dans les voilages. Elle éclata de rire et vint l’aider à remettre de l’ordre dans le rayon.

            — Qu’est-ce que vous faites là ?

            — Euh, rien. J’étais un peu en avance, alors, je me suis dit que… peut-être.

         — Mais, Marc, je quitte mon travail dans 20 minutes. Attendez-moi à côté au café. Je n’en n’ai pas pour longtemps.

            Marc sortit du magasin sous le regard amusé de quelques clientes et se rendit au café tout proche où il commanda un chocolat. Il ne se sentait pas très fier de l’attitude qu’il avait adoptée au magasin. Il venait de terminer sa tasse lorsque Stéphanie entra dans le café. Elle lui fit la bise – c’était la première fois. Il lui proposa quelque chose mais elle refusa, pressée de rentrer chez son amie Sandra. Tous deux se retrouvèrent quelques minutes plus tard dans le petit appartement de la rue de Tocqueville où Sandra les accueillit chaleureusement. L’ambiance était au beau fixe.

            — Si on allait au restaurant pour fêter la nouvelle, proposa Sandra.

            — Bonne idée, répondit Marc.

            — Vous croyez ? Fêter le suicide d’une femme, je ne sais pas si c’est très approprié. Il vaudrait mieux prier pour elle, ajouta Stéphanie.

            — Mais, ma chérie, elle t’a désignée. On ne peut plus rien pour elle de toute façon. C’est sa volonté et tu dois en être fière et la respecter. Elle t’a transmis son amour pour son bébé.

            — Oui, seulement avec l’ASE et tout ça, reprit Stéphanie…

            — Ne t’inquiète pas. On a quelque chose maintenant si tu veux adopter ce bébé.

Au restaurant, vers la fin du repas, Sandra se leva disant qu’elle allait aux toilettes et convia Stéphanie à l’accompagner.

            — Steph ! Dis-moi, tu l’aimes bien, Marc ?

            — Heu, oui… Il est très gentil avec moi, très prévenant. Je pense qu’il est un peu timide, répondit-elle les joues rosies.

            — Non mais ce n’est pas ce que je veux dire. Évidemment qu’il est fou amoureux de toi. Ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Crois-moi, je ne me trompe pas. Et toi, tu n’aurais pas…

            — Non, je t’assure…

           — Steph, tu mens. Je t’ai vue. Tu as rougi. Ne me dis pas que tu es encore amoureuse de ton courant d’air du lycée qui s’est barré à toutes jambes.

            — J’y pense parfois mais c’est vraiment fini. C’est un lâche.

            — Hé bien, voilà. Marc peut te rendre heureuse. J’ai vu à son regard qu’il adore te voir enceinte. Une grosse envie d’enfants. Allez, débrouille-toi.

Marc commençait à trouver le temps long.

            — Nous voilà, dit Sandra avec un petit signe de la main. Excusez-nous, Marc. Mais les filles sont comme ça !

Marc avait déposé de l’argent sur la coupelle de l’addition. Stéphanie tendit la main pour prendre la note dans un souci de partage. Marc réagit immédiatement et sa main rencontra celle de Stéphanie. « Non, non ! Laissez. ». Il ne lâcha pas la main de Stéphanie. Instinctivement, comme si elle lui était familière, il la porta à sa bouche et y déposa un baiser. Sandra observait, muette. Stéphanie, qui était assise à côté de Marc, pencha sa tête sur son épaule. Il lui caressa les cheveux et s’adressa à Sandra.

            — Dites Sandra, si on se mariait, Stéphanie et moi, vous croyez qu’on nous empêcherait de l’adopter, ce bébé ?

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