Retour lecture : La Disparition de Josef Mengele
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Retour lecture : La Disparition de Josef Mengele
Comme lors les spectacles de magie, il n’existe pas réellement de disparition. Tout l’art du magicien est de savamment orchestrer sa présentation, pour désorienter le spectateur, afin qu’il ne perçoive pas la manipulation. La disparition de Josef Mengele, le sombre docteur d’Auschwitz, est un cruel spectacle de magie, orchestré par des États complices et financé par des adeptes, ou des proches.
La disparition de Josef Mengele, par Olivier Guez, chez Grasset.
Lors d’une réunion en club de lecture, une personne a demandé la raison de lire un livre pareil. Ne serait-ce pas lui faire de la publicité que de parler de Mengele ? Est-ce malsain que de lire un livre sur ce triste personnage ? À la lecture de l’ouvrage d’Olivier Guez, la question ne se pose plus. La réponse est évidemment oui. Oui, car l’auteur ne dresse pas l’inventaire de ses horribles méfaits, il relate, comme le titre l’indique, sa disparition de la scène internationale, et surtout, surtout, comment ce bourreau a-t-il pu disparaitre.
Pour faire son deuil, il est important de retrouver un corps, et de comprendre pourquoi ? Chacun, en principe puisque de nos jours des personnalités sont toujours dans le déni, chacun connait donc désormais les crimes contre l’humanité que les nazis ont perpétré durant la Seconde Guerre mondiale. Difficile de retrouver tous les corps. Reste à comprendre. Comprendre pourquoi, et comprendre comment faire pour que cela ne se reproduise pas. Même si l’actualité nous démontre, malheureusement, que cela se reproduit, toujours.
Josef Mengele (au milieu), entouré de Richard Baer et Rudolf Höss, Solahütte, 1944. Album Höcker.
Le Personnage
À la manière dont on essaie de se glisser dans la tête d’un tueur en série pour en capturer d’autres, se glisser dans la tête de Mengele se fait en lisant ce genre de livre.
La pitié est une faiblesse : d’un mouvement de badine, l’omnipotent scellait le sort de ses victimes, à gauche la mort immédiate, les chambres à gaz, à droite la mort lente, les travaux forcés ou son laboratoire.
C’était donc le premier contact avec Mengele pour ceux que l’on sortait des wagons. Ne sachant pas, bien entendu, que derrière ce tri se cachait l’horreur absolue que dépeint de façon effroyable Olivier Guez :
Les chambres à gaz tournaient à plein régime ; Irène et Josef se baignaient dans la Sola. Les SS brûlaient des hommes, des femmes et des enfants vivants dans les fosses ; Irène et Josef ramassaient des myrtilles dont elle faisait des confitures. Les flammes jaillissaient des crématoires ; Irène suçait Josef et Josef prenait Irène.
Ce genre de réalité crue qui s’oppose est une mise en garde : on ne soigne pas ce genre d’individu par de jolies phrases. On ne peut pas discuter, négocier avec quelqu’un comme cela. Inutile de s’installer au bout d’une table de 10 mètres en espérant qu’il retrouve la raison.
Complicité
Comment Mengele a-t-il pu passer entre les mailles du filet ? Après le moment de la révélation vient celui de l’après-guerre, qui en est une autre. C’est le moment de la traque par le Mossad, mais également celui de la complicité d’anciens nazis, d’hommes et de femmes cupides, d’États corrompus. C’est le moment des opportunités, de l’ambition, de l’enrichissement, de la politique.
Panache, autorité, discipline : le génie militaire allemand fascine tant le jeune Perón qu’il écrit une thèse… et s’endort rarement sans consulter ses stratèges prussiens favoris.
L’Allemagne et l’Italie défaites, l’Argentine va prendre la relève et Perón réussir là où Mussolini et Hitler ont échoué.
Toute la première partie du livre montre à quel point le modèle nazi était source d’inspiration pour les dictateurs d’opérette et le fanatisme. On retrouve ainsi en Argentine les noms les plus sombres de l’histoire du Troisième Reich. Même celui d’Eichmann : Eichmann est alors chargé de tous les trains qui transportent les Juifs vers les camps d'extermination en Pologne et se vante du sentiment d’avoir exterminé 5 millions de juifs.
L’éveil et la traque
Les consciences ne se sont éveillées que tardivement, grâce à la culture que l’on tente de faire taire encore de nos jours :
- Le festival de Cannes « Nuit et brouillard » d’Alain Resnais, 1956
- Le journal d’Anne Frank, 1947 aux Pays-Bas, 1950 à Paris
On parle alors ouvertement de crimes contre l’humanité, de solution finale, de six millions de juifs assassiné. Avant l’enlèvement d’Eichmann par le Mossad, l’Argentine et le Paraguay étaient quasiment des lieux de villégiature plus que de refuge. La chasse aux anciens nazis commence réellement à ce moment-là et c’est un peu la seconde partie de ce livre. Une partie plus dure que la première, puisque Mengele va montrer toute l’étendue méphitique de sa pensée profonde, lui qui « avait eu le courage d’éliminer la maladie en éliminant les malades. ».
Rolf, découvre tardivement qui était son père, il prend alors ce chemin que veulent emprunter ceux qui veulent comprendre, ce chemin que nous empruntons en lisant ce livre.
Rolf doit savoir, pourquoi, comment, les sélections, les expérimentations, Auschwitz. Le vieux n’éprouve-t-il aucun regrat, aucun remords ? Est-il la bête cruelle que les journaux décrivent ? Est-il à ce point malfaisant et dégénéré ? Peut-il l’aider à sauver son âme ? Et lui, Rolf, est-il un être mauvais par sa faute ?
Le Quatrième Reich
La fin de ce livre est dure, non pas par les citations et les rares exemples, bien qu’il faille les digérer malgré leur pudique sobriété : « des yeux punaisés comme des papillons », mais parce qu’elle révèle l’ancrage indélébile de la pensée nazie. La fin de ce livre est dure, car elle est frappée de plein fouet par l’actualité qui démontre que l’histoire se répète.
Mengele, ou l’histoire d’un homme sans scrupules à l’âme verrouillée, que percute une idéologie venimeuse et mortifère… Toutes les deux ou trois générations, lorsque les mémoires s’étiolent et que les derniers témoins des massacres précédents disparaissent, la raison s’éclipse et des hommes reviennent propager le mal.
Crédits photographiques :
- Couverture : le tristement célèbre médecin nazi Josef Mengele, encore jeune docteur, et la "rampe" du camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau en mai 1944, quand Mengele choisissait parfois des prisonniers pour la vie, la mort ou l'expérimentation. (Crédit : Domaine public) . Source The Times of Israel
- Domaine public.