Les Chatouilles (Andréa Bescond, 2018)
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Les Chatouilles (Andréa Bescond, 2018)
"Les Chatouilles", film coup de poing, comme "Chaos" (2001), résonne comme un cri, celle d'une voix longtemps muselée. Tellement d'ailleurs, qu'elle n'a d'abord été qu'un corps de poupée mis à disposition du voisin pédophile à qui des parents savamment manipulés par celui-ci ouvraient aveuglément leur porte. Les mécanismes sociaux et individuels de l'emprise sont parfaitement décortiqués. Gilbert (Pierre DELADONCHAMPS) est un parfait piège à c..., entre sa réussite sociale qu'il exhibe aux parents d'Odette dont il fait ses obligés et sa vitrine familiale exemplaire derrière laquelle se cache le viol de sa propre soeur. A cela s'ajoute un père (Clovis CORNILLAC) faible et naïf, incapable de jouer son rôle et une mère (Karin VIARD) tellement aliénée par ses propres traumatismes qu'elle finit par en devenir la complice inconsciente du bourreau en lui livrant sa fille pieds et poings liés puis en s'enfonçant dans la haine et le déni une fois le secret révélé. C'est donc par le corps que Odette (Andréa BESCOND qui joue en réalité son propre rôle) exprime sa souffrance. Son rêve d'être danseuse étoile se transforme une fois devenue adulte en soubresauts d'une âme torturée par le silence. Et lorsque les mots sortent enfin devant une psychologue (Carole FRANCK) qui au départ a bien du mal à y faire face, c'est de façon désordonnée, comme le film l'est lui-même: brut de décoffrage, pas aimable, maladroit parfois sur le plan formel mais "who's care?" à part quelques critiques trop esthètes pour apprécier ce flot généreux à défaut d'être toujours parfaitement maîtrisé. Mais de beaux objets polis et vides de contenu, il y en a plein les tiroirs. Le cri de colère de Andréa BESCOND est lui d'une absolue sincérité et à chaque instant elle se donne à la caméra. On sent que ça vient des tripes et du coeur. Son témoignage marque un jalon important de la reconnaissance des souffrances des anciens enfants abusés, leur parole semblant enfin être entendue. Et sa réconciliation avec elle-même, plus exactement avec la petite fille qu'elle a été est bouleversante tant Andréa BESCOND irradie de joie et de larmes mêlées.