Episode 55 : La grosse artillerie
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Episode 55 : La grosse artillerie
Ils avaient prévu la grosse artillerie. Juste pour moi. Ils avaient même sorti l’unique hélicoptère du commissariat pour un assaut spectaculaire. De quoi me sentir flatté. Pourtant ce n’était pas du tout ce que j’éprouvais à ce moment précis. Voir mes anciens collègues me pourchasser comme ça, ça me rendait fou. Il ne leur avait pas fallu longtemps pour me considérer comme un psychopathe. Comme la cible à abattre. Et comment leur en vouloir ? J’aurais réagi pareil. Je l’avais bien fait avec Gram… et puis, je restais le petit bleu, malgré mes mois de service à leur côté. Le dernier arrivé. Celui qu’on ne connaît pas bien et dont on se méfie plus facilement. Putain !
Avec l’aide de Joe, j’avais réussi à pirater leur fréquence. Je pouvais suivre leur raid en direct. Et même si je savais que Léila faisait semblant pour donner le change, impossible de ne pas me foutre en colère à chacune de ses phrases : « Une fois à l’intérieur, laissez-le-moi les gars ! » , « Je vais me le faire, cet enfoiré de bleu-bite », « il va me payer tout ce qu’il m’a fait subir, ce connard », etc. Assis sur le sol dégueu du bureau que j’avais investi, les yeux dans le vague, j’enrageais de les entendre me cracher dessus. Une belle brochette d’ordures !
– Bon, on y est les gars. Vous voyez la baraque, en face. L’entrée du bunker se trouve au sous-sol. Rappelez-vous, Moridan est à moi. Et pour l’autre, Florigan nous a dit de nous méfier. C’est un fou furieux qu’il est préférable de ramener mort plutôt que vif ! Compris ? Maintenant, silence radio. Et bonne chance à tous !
Dernier contact avant qu’ils ne disparaissent. Derniers ordres de Léila avant qu’ils ne engouffrent dans la maison. Bientôt, ils allaient découvrir ce tableau incroyable qui m’avait fasciné avant de parcourir le dédale de couloirs qui amenait à la porte blindée de l’abri. Mais je ne pouvais plus les voir, ni les entendre. J’étais complétement aveugle et sourd. Fait chier !
– Vous avez eu des nouvelles de Léila ?
Joe ! Je ne l’avais pas entendu arriver. Perdu dans ma tête, au sens littéral, j’étais déconnecté de mon corps et de tout ce qu’il se passait autour de moi. Quel con !
– Oui, elle dirige l’opération. À croire qu’on est de vrais supers méchants ! Et c’est votre clone qui est aux commandes. Il veut notre peau à tous les deux.
– Pas vraiment étonnant… Il risque gros. Si jamais les mecs de haute sphère découvrent qui je suis en réalité, il sera débranché dans la seconde.
– Pas sûr ! Mon père a le bras long. Et je suis pas certain qu’il laisserait faire une chose pareille.
– Pourquoi ? Ça résoudrait tous ses problèmes et effacerait les preuves de sa folie.
Il n’avait pas vraiment tort, j’en étais convaincu. Même si cela, à priori, pouvait lui sauver la peau, il ne mettrait jamais hors service ce synthé de malheur.
– Au fait, j’ai réussi à rétablir le courant. Par contre, pour l’eau, je ne peux rien. Je pense que nous allons devoir encore une fois déménager…
– Génial ! Et on fait comment pour savoir à l’avance si on peut avoir les options électricité et eau courante ?
– Ne soyez pas si négatif, Moridan… J’ai aperçu une vieille machine sur laquelle je vais effectuer quelques recherches. Ça devrait pas me prendre trop longtemps. Si vous avez des nouvelles de Léila, prévenez-moi.
Avant que Joe n’ait pu franchir le seuil de mon bureau, tout se mit à trembler. Un bruit alarmant résonna dans tout le bâtiment. Une plainte métallique qui ne laissait présager rien de bon. Le plafond se fendit et avant qu’il ne nous tombe dessus, je plaquai Joe au sol le protégeant avec mon corps bionique.
Nous étions dans le noir, couverts de gravats. Je pissais le sang, mais étrangement, je n’avais mal nulle part.
– Merci, mon ami. Sans vous, je serais mort.
– Sans moi, vous ne seriez pas mêlé à cette putain d’histoire…
Je crus entrevoir un pâle sourire se dessiner sur le visage de Joe. Mais quelque chose clochait dans son regard. Ses yeux avaient perdu de leur éclat. Comme si la vie le quittait peu à peu.
– Vous êtes blessé, Joe ?
– Je le crains…
Il toussota avant de perdre connaissance. Merde ! Je devais le sortir de là rapidement. Je devais impérativement l’aider. Il ne pouvait pas crever ici. Pas maintenant. Pas comme ça…
Texte de L.S. Martins (35 minutes chrono, sans relecture).
D'après l'image par Pete Linforth de Pixabay : Forces Spéciales Soldat Militaire - Image gratuite sur Pixabay