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Wilt 1

Wilt 1

Published Jun 18, 2022 Updated Jun 18, 2022 Culture
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Wilt 1

Plutôt adepte de l’humour à l’anglaise, celui qu’on trouve habituellement juché quelque part entre le burlesque et le politiquement incorrect, j’étais à la recherche d’un petit livre qui me ferait marrer, mais avec bon goût, comme savent si bien le faire certains auteurs britanniques.

Aussi quand j’ai entendu parler de la série des Wilt par Tom Sharpe, je me suis intéressé de plus près à ce que ça raconte en quatrième de couverture. Et puis ce sous-titre irrésistible « Comment se sortir d’une poupée gonflable et de beaucoup d’autres ennuis encore » aura fini de me convaincre de me lancer dans la lecture. Avec en ligne de mire la possibilité qu’une belle petite série de romans amusants s’offre à moi par la suite (il y a 5 tomes actuellement dans la série des Wilt).

 

Dans Wilt 1 on suit les aventures, ou plutôt les mésaventures, de Henry Wilt, 34 ans, qui enseigne la culture générale dans un lycée professionnel. Ses élèves sont de futurs bouchers, plâtriers ou mécanos. Autant dire qu’ils s’en tamponnent de la littérature et de tout ce que Wilt tente de leur inculquer. C’est simple, ses élèves le désespèrent au plus haut point. Professeur d’une matière considérée comme mineure (pour ne pas dire inutile), il n’est pas du tout considéré par sa hiérarchie qui lui refuse depuis 10 ans la moindre promotion, le maintenant encore et toujours dans un poste d’enseignant assistant. C’est simple, sa hiérarchie l’énerve au plus haut point. À la maison ce n’est pas mieux. Son épouse Eva lui reproche son attitude de loser, son manque d’ambition, sa bedaine de buveur de bière, sa tiédeur sexuelle et sa virilité en berne. En même temps il a des circonstances atténuantes le Wilt, sa mégère fait moyen envie, et c’est la façon polie de le dire. Oisive et influençable, Eva ne travaille pas mais vit ses hobbies avec une implication sans limite, tout du moins avant de passer à autre chose. C’est ainsi que de lubies en coups de têtes, elle imposera à Wilt sa passion pour la composition florale, le tantrisme ou le trampoline. Après sa rencontre avec un couple d’américains riches et très libérés dont la femme est autant féministe que nymphomane, Eva entraîne donc Wilt dans une soirée un peu particulière, au terme de laquelle Wilt va se retrouver, suite à un malencontreux quiproquo, en fâcheuse posture avec une poupée gonflable… C’est peu de le dire, sa femme l’insupporte au plus haut point. Alors Wilt décide de réagir, de passer à l’action. Chaque soir, pendant la promenade du chien il imagine pour passer le temps des stratagèmes pour se débarrasser de sa femme, mais cette fois il ne va pas en rester à de vaines rêveries. Mais il n’est pas fou le Wilt, il va d’abord s’entraîner à exécuter son plan « à blanc » pour s’assurer qu’il fonctionne. Tiens, avec cette poupée gonflable qui lui aura causé tant de tort, ce sera parfait ! Sauf que suite à un autre malencontreux quiproquo (oui, Wilt est aussi collectionneur de malencontreux quiproquos à ses heures), il va être accusé du meurtre de sa femme qui a mystérieusement disparu, alors qu’il n’a pourtant encore déversé ses intentions criminelles que sur cette infortunée poupée en plastique… Le statut de loser interstellaire d’Henry Wilt n’est pas près de disparaître de sitôt…

 

Je dois l’avouer, c’est plutôt le genre d’intrigue de départ qui me plaît de prime abord. C’est drôle, impertinent, et j’adore quand le sort s’acharne, quand c’est à la fois drôle et cruel, méchant et maladroit. Sauf que… sauf qu’à la lecture, j’ai trouvé ça beaucoup moins bien qu’en résumé. Et croyez bien que je suis le premier à trouver cela dommage. Il m’a manqué quelque chose, du rythme, de la personnalité, je ne sais pas exactement, mais il m’a manqué un ingrédient pour que la mayonnaise prenne comme il faut. Oh il y a bien des scènes qui m’ont fait rire, mais rien d’hilarant, rien d’irrésistible, rien d’exceptionnel. Or, malheureusement, pour je ne sais quelle raison, c’est à ça que je m’attendais. Alors j’ai été déçu tout du long. Ce roman m’a laissé sur ma faim.

 

Il y a certains points que j’ai notés et qui peuvent peut-être en partie expliquer cette sensation. D’abord le personnage de Wilt lui-même, qu’on peine à apprécier. Certes on comprend que sa vie n’est pas bien folichonne et on compatit sincèrement. Ses élèves, sa hiérarchie et sa femme me font le même effet qu’à lui : c’est juste insupportable des gens pareils. Mais force est de constater qu’il ne donne pas trop envie de le plaindre. Sa personnalité, ses schémas de pensée, tout tend à montrer qu’on a aussi à faire à un beau blaireau. Et que finalement ce qui lui arrive colle bien avec ce qu’il est. D’ailleurs le fait de savoir qu’il a 34 ans donne un tout autre aspect au personnage que si le même bonhomme avait été quinqua par exemple. Parce que ses réactions et ses réflexions sont celles d’un homme bien plus âgé que 34 ans. Un vieux (dans le mauvais sens du terme) avant l’heure. Comme si Wilt avait été démodé et dépassé toute sa vie.

 

D’ailleurs d’une manière générale, j’ai trouvé le style de Tom Sharpe daté. Pas forcément désagréable, mais clairement marqué temporellement. Ce qui m’a éloigné aussi du récit. Le roman date de 1976, et cela se ressent fortement à la lecture j’ai trouvé. Du coup, la mécanique du livre paraît un peu prévisible aussi. Un peu comme ces gags des caméras cachées des années 60 ou 70 : c’est téléphoné, il n’y a pas vraiment d’inattendu, de réactions imprévisibles. Et donc pas de réelle surprise à la lecture. Ça ne suffit pas pour en faire une lecture désagréable, mais ça lui donne un aspect un peu trop plat, limite fade, là où on attendait un feu d’artifice. D’où ma déception.

 

Dernier point qui m’a tenu à distance de ce roman, c’est l’enchaînement des péripéties, qu’on pourra qualifier de burlesque, de fantaisiste. En soi, pas de problème, j’en ai déjà lu des histoires de ce style, où si l’on prend cinq minutes pour considérer le récit d’un œil réaliste on ne peut que se dire que ce n’est pas possible. Et pourtant, certains arrivent à faire passer la pilule malgré tout, ils trouvent la formule qui fait accepter sans trop sourciller ce qu’en temps normal on n’accepterait pas au nom de l’objectivité. C’est aussi un peu ce qui m’a manqué ici. Il y avait un petit parfum de « trop ». Trop gros, trop loufoque, trop délirant. Pas « beaucoup trop », mais « un peu trop » quand même. Et cette sensation m’a suivi durant toute ma lecture. Si bien que j’étais plutôt content d’arriver à la fin, trouvant que ça se tirait un peu trop en longueur, alors que d’habitude ce genre de bouquins, quand j’accroche, je suis plutôt triste d’en arriver trop rapidement à la fin parce qu’en gros gourmand que je suis, j’en veux « toujours un peu plus ».

 

Alors au final, je dois bien dire que j’ai été déçu par cette lecture, pas parce que le livre est mauvais, mais parce que j’en attendais beaucoup plus. Déception doublée par le fait de voir s’envoler la perspective de lecture d’une chouette série de romans… Je n’ai donc pas été plus convaincu que ça par l’humour de Tom Sharpe. Et pour finir comme j’ai commencé, en parlant de comédies britanniques et d’humour so british, je préfère vous diriger plutôt vers un bon David Lodge ou un Joseph Connolly.

Cet article a été initialement publié sur mon blog : www.moleskine-et-moi.com

 

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