Tout est dans la tête
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Tout est dans la tête
Tout est dans la tête est un premier roman, celui d’Alastair Campbell, qui a été journaliste au Daily Mirror, puis directeur de la stratégie et de la communication du Premier Ministre britannique Tony Blair de 1997 à 2003. Pas totalement déconnecté de la sphère politique puisque l’un des personnages secondaires est secrétaire d’État à la santé, ce roman narre l’histoire d’un psychiatre face à ses patients mais aussi confronté à ses propres doutes, ses propres démons.
Pendant un peu plus d’une semaine on suit le Docteur Martin Sturrock, une sommité dans son domaine, chef de service d’un grand hôpital londonien, un homme dévoué à son métier tant et si bien que sa famille l’accuse de l’avoir sacrifiée au nom de sa vocation. On assiste à son quotidien entre vie personnelle difficile (les reproches de sa femme et de son fils s’accumulent) et consultations avec les patients dont il s’occupe et dont les cas lui tiennent à cœur. Parmi ces derniers il y a David, un jeune dépressif bipolaire qui vit avec sa mère et est incapable d’avoir une vie sociale et amoureuse normale, Emily une jeune femme gravement défigurée suite à un incendie, Arta une mère de famille réfugiée kosovar qui a été violée en présence de sa petite fille, Ralph Hall le ministre de la santé complètement sous l’emprise de l’alcool et Hafsatu, une ancienne prostituée qui a vécu un enfer avant de se sortir du réseau de prostitution dont elle était l’esclave. Le professeur Sturrock suit chacun d’entre eux personnellement et s’investit beaucoup dans leur thérapie. Mais le psychiatre est lui-même de plus en plus en proie au doute et au défaitisme, convaincu de ne plus parvenir à aider correctement ses patients, pire même, persuadé d’avoir commis de graves erreurs avec certains, et par ailleurs conscient de son échec personnel en tant que père et mari.
Difficile d’en dire beaucoup plus sans en raconter trop… toujours est-il que ce roman aborde de nombreux sujets qui touchent tous aux blessures de l’âme. Par les histoires secondaires des différents patients, on entre véritablement dans la tête de ces personnes en souffrance psychologique, et l’histoire principale, celle du psychiatre lui-même, nous incite à réfléchir à ce que vit un homme dont le métier est de venir moralement en aide aux autres. Est-on exempt de faiblesses, de remords, de vices, de contradictions quand on est censé être un spécialiste de la psychologie humaine, quand on est celui qui aide les autres à guérir de ces maux ?
Très facile à lire, Tout est dans la tête n’en est pas pour autant superficiel et dénué de profondeur. On vit et on ressent ce qui anime les personnages, et c’est une des qualités du roman, tout est fait pour que le lecteur se sente en empathie avec les différents personnages. En tout cas pour moi ça a très bien fonctionné (mais je suis plutôt bon public c’est vrai aussi…), et j’ai retrouvé par la suite le même type de ressenti à la vision de la très bonne série HBO En thérapie avec Gabriel Byrne en psychanalyste qui doute aussi de lui-même et de la pertinence de son impact réel sur ses patients. Si vous connaissez la série télé vous aurez une assez bonne idée du ton employé dans ce livre (bien que les pathologies abordées soient elles très différentes).
Fluidité, sensibilité, intelligence, le tout avec une dose d’humour (malgré l’aspect grave des sujets traités, Campbell parvient à se ménager la place pour quelques traits d’humour bienvenus), je trouve que pour un premier roman c’est déjà plus que pas mal ! Et la fin recèle un moment d’émotion assez intense qui finit de prouver le talent de l’auteur. Un bon bouquin, à lire si une plongée dans les sentiments humains ne vous fait pas peur.
Cet article a été initialement publiée sur mon blog : www.moleskine-et-moi.com