Madame Di Bacco vivait dans une de ces petites maisons en pierres qui font le charme des villages ardéchois. L’intérieur, meublé modestement, semblait entretenu avec soin, tout comme sa personne. Elle reçut les deux représentants de la loi avec la résignation d’une mère qui sait bien que son fils n’aura jamais la vie qu’elle souhaitait pour lui.

— Ça faisait longtemps que je n’avais pas reçu la visite des gendarmes. Il s’est mis dans quels ennuis cette fois ?

Le Commissaire et le Gendarme étaient mal à l’aise. Annoncer à une mère que son fils est mêlé à un quadruple meurtre. Vous le feriez comment vous ?

— Plutôt graves, Madame Di Bacco…

Emile semblait s’adresser au jeu de poupées russes qu’il ne quittait pas du regard. Puis il releva la tête pour croiser le regard fatigué de la vieille dame qu’une bouffée d’angoisse gagna à l’évocation de meurtres.

Le Brigadier l’aida à s’asseoir tandis que le Commissaire lui porta un verre d’eau.

— Madame Di Bacco, parlez-nous de Ralph.

— Il a toujours été un garçon difficile. Je l’ai appelé Ralph comme le philosophe américain. Mais mon Ralph n’a jamais été très brillant. Dès l’école élémentaire, nous ne savions pas vraiment quoi en faire. Les choses ont dégénéré quand il a découvert que son père se travestissait. La suite, vous l’avez sûrement dans vos dossiers. Il a eu de mauvaises fréquentations qui l'ont poussé à faire de mauvaises choses.

Elle s’interrompit, ajusta son chignon et plongea à son tour son regard dans la contemplation des poupées russes.

— Mais des meurtres…

— Votre mari vivait encore avec vous quand Ralph a fait cette découverte ?

— Non. Il nous a abandonnés quand le petit avait trois ans.

Le Commissaire ouvrit la première poupée et en sortit celle qu’elle contenait. La peinture de celle-ci était légèrement écaillée.

— Ces poupées sont charmantes.

— Oui, répondit la vieille dame. Il aimait beaucoup jouer avec. Il inventait des histoires.

— Intéressant… Quel genre d’histoires ?

Un nuage, là-bas dans le ciel, s'invita dans la petite cuisine par des jeux d'ombres qui métamorphosaient complètement la scène. Les escaliers qu’on apercevait par l’embrasure de la porte semblaient se mouvoir. Et pendant que la vieille dame décrivait des histoires racontant à leur manière le drame familial, le temps semblait ralentir pour Emile. Il n’écoutait pas vraiment mais voyait son intuition prendre des contours très nets, l’étape avant qu’elle ne devienne une certitude. Mais il lui faudrait du concret pour prouver tout ça.

— Commissaire ? Ça va ?

Les deux hommes avaient déjà regagné la voiture et Demesy était encore plongé dans ses pensées. Si bien qu’il ne répondit pas à la question du Brigadier.

Photo couverture de Craig Whitehead sur Unsplash

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Jouez avec l'Egorgeur

Mots placés dans ce chapitre :

Poupées russes

Jeux d'ombres

Mots restant à placer :

Mise en scène

Honnête / ment

Avocat

Escaliers

Pizza à l’ananas

Poulet qui fait “pouet”

TDAH, handicap, invisible, préjugés, étiquette

Surprise