40. La Légende de Nil, Jean-Marc Ferry, Livre 2, L'Utopie de Mohên, Chapitre 3, Le Projet "Ohlan"
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40. La Légende de Nil, Jean-Marc Ferry, Livre 2, L'Utopie de Mohên, Chapitre 3, Le Projet "Ohlan"
— J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle… La bonne, c’est que votre principe est juste. La mauvaise nouvelle, c’est que la mise en œuvre est un casse-tête. Nous avons cent fois désespéré de transmettre aux gyroscopes l’énergie utile, si l’on veut atteindre la vitesse de rotation requise pour compenser la gravitation autour de Nil. La dynamique ellipsoïdale des aéroglisseurs nous a sauvés. Sinon, on piétinait : les forces répulsives se contrariaient au lieu de se cumuler. On a opté pour les bains de mercure. C’est le mieux pour réduire les frottements. Le mercure, c’est notre or. Enfin la machine est en bonne voie, ça nous met la tête hors de l’eau. Le rendement n’atteint pas 66%, vu que déjà un tiers du mouvement hélicoïdal est inutile. Mais on a réalisé le circuit d’accélération continue, c’est l’essentiel. Reste à trouver une solution pour stabiliser l’engin au décollage. Il faut plus de puissance au départ. Pareil à l’arrivée, car ça vaut pour l’atterrissage sur Ohlân comme pour le décollage de Nil : plus de fusées en central sous le ventre, et plus en latéral. Une fois en l’air, le pilotage sera facile… en principe.
C’est ainsi que l’ingénieur en chef de la Cellule scientifique basée à Sarel-Jad accueillit Nïmsâtt à son retour de Syr-Massoug. Mais la scientifique désire en savoir davantage sur ce « en principe ».
— Avez-vous pu obtenir vos champs magnétiques ?
— Oui, ils sont très intenses. Ça n’a pas été facile. Arrivé à un certain seuil, on ne pouvait plus amplifier, sinon on endommageait le matériel. Alors, on a eu l’idée d’étaler dans le temps les composantes de fréquence et d’allonger les pulsations. Ça diminue leur intensité et on peut les amplifier sans saturation. Ensuite, on recomprime les pulsations amplifiées. Vous pigez la ruse ? Le gain réalisé en intensité est énorme. Bon ! Maintenant, la décharge électrique nous permet d’ioniser le bord d’attaque. Cela créera une couche de plasma autour de l’engin. De la sorte, il deviendra complètement furtif, pénétrera dans l’air dense comme dans du beurre, et sans bruit !
Nïmsâtt venait d’effectuer le voyage de nuit, accompagnée de Rus Nasrul qui, à peine arrivé, cherche son fils des yeux. Elle devança la question :
— Nous verrons Ferghan, ce soir, si vous voulez bien. Nous aurons toutes chances de le voir au village des Sils, avec Ôm. Il nous reste la journée. Je propose que nous allions découvrir l’engin. Je souhaiterais recueillir des informations sur le maniement de l’astronef, son pilotage, les risques… Pour cela je fais autant confiance aux techniciens qu’à l’ingénieur-chef. Il y aura aussi des points à discuter avec mes collègues scientifiques. S’il nous reste un peu de temps avant de gagner le village, j’aimerais que vous acceptiez de vous rendre avec moi dans la région des cénotes. Voulez-vous bien ? Ce n’est pas un grand détour sur la route du village.
Nïmsâtt lit l’incompréhension sur le visage de Nasrul.
— Oui, les cénotes… Ce sont — comment vous expliquer ? — des cavités rocheuses, rondes, profondes, ouvertes à fleur de montagne en terrain calcaire. Les cénotes se présentent comme des bassins naturels remplis d’eau. Il s’agit de fosses à ciel ouvert. Ils constituent des points d’entrée vers des rivières souterraines. Nous en rencontrerons plusieurs sur les plateaux que vous pouvez apercevoir, là-bas, un peu plus au Sud et à l’Ouest, vers l’océan. J’aimerais que nous y allions ensemble. Je vous expliquerai mon idée : c’est en rapport avec le « projet Ohlân ». De là-haut nous pourrons avoir une vue directe sur le village des Sils. Nous le rejoindrons sans peine. Je connais un chemin de descente presque agréable.
Nïmsâtt eut l’impression d’être traversée par le regard de cet homme, comme s’il voulait voir sa personne au-delà de l’image. Mais elle n’y ressent rien d’offensif ni de réducteur. Elle y décèle plutôt un désir de la comprendre, d’entrer dans ses perspectives. Cependant, Nasrul n’est pas convaincu par la pertinence du programme :
— Ne serait-il pas plus simple, Nïmsâtt, de commencer par la visite des cénotes ; de descendre ensuite au village, pour trouver Ferghan et son amie ; de là, nous rendre avec elle et lui à la base scientifique ? Autant que vos entretiens avec les chercheurs et techniciens aient lieu devant mon fils. La concertation comme la décision auraient à y gagner.
— Vous avez raison, c’est le bon plan. Commençons par les cénotes, et allons-y maintenant, si vous n’êtes pas fatigué… Peut-être souhaiteriez-vous prendre un peu de repos avant que nous nous mettions en route ?
Pour toute réponse, Rus Nasrul la regarde avec un sourire aussi discret qu’étonné : Nïmsâtt comprit qu’il en faudrait plus pour qu’il réclame une pause. Il leur fallut la matinée pour atteindre la région des cénotes. Nïmsâtt et Nasrul ont d’abord escaladé un sommet d’où l’on domine le site. Ils se tiennent debout, face à l’Ouest. L’air est vif et une brise vigoureuse rejette leur chevelure en arrière. Sous leurs yeux s’étendent les cénotes, des trous d’eau bleu saphir entourés d’une bordure vert émeraude. Ils eurent hâte de descendre pour aller voir ces formations de près. Nasrul n’a jamais vu chose semblable. C’est un défi pour lui : mettre au jour les secrets que recèle encore la nature. Un puissant motif où se lient l’émerveillement et la curiosité le pousse à presque courir vers les premiers points d’eau, lesquels, en effet, sont bien des points d’entrée vers des rivières souterraines dont on entend l’écoulement en résonance dans les cavernes.
— Des rivières forment un réseau souterrain qui rejoint l’océan. C’est une merveille, n’est-ce pas ?
Nïmsâtt, elle aussi, est émue par la beauté de ces puits naturels. Mais son intérêt n’est pas qu’esthétique : les cénotes pourraient offrir une cachette idéale pour des astronefs à venir, à commencer par le prototype en voie d’achèvement. Il faut sans attendre le mettre à l’abri de tout regard, lui trouver un garage naturel tenu secret. Nïmsâtt se demanda si elle peut mettre Nasrul au fait de ce projet. Elle aimerait partager avec lui. Il lui faut décider et elle n’a d’autre élément que les impondérables de la personnalité : attitudes, expressions, le timbre de la voix, ses intonations. On dit de ces indices qu’ils sont à la base de nos intuitions des autres. Il s’agit d’une intelligence sensible, intelligence des signes qui mettent sur le chemin du jugement. Nïmsâtt est placée pour comprendre cela ; mieux encore, pour se fier à ces données sensibles. Pourquoi chercher plus loin par quelque ratiocination ?
Nïmsâtt résolut de faire confiance à Rus Nasrul.
— Je pense à cacher l’astronef et les autres à venir à l’intérieur de ces puits. Ils conduisent à des rivières souterraines, et celles-ci mènent à l’océan. Nos astronefs auraient ainsi des garages naturels d’où ils gagneraient la mer ; de là, ils pourraient prendre leur départ vers d’autres planètes. En attendant, notre objectif sera Ohlân.
— Vous n’avez donc pas choisi Âsel ? C’est pourtant notre premier satellite, beaucoup plus proche de Nil. Ohlân est très loin…
Nasrul ne doute pas que Nïmsâtt ait ses raisons, mais il aimerait comprendre.
— Âsel est proche de Nil, en effet. Mais elle est très petite. Il est certain qu’elle n’offre pas les conditions requises pour la vie telle que nous la connaissons, celle des plantes, des animaux… Elle ne peut pas avoir de couche atmosphérique. Tout porte à penser qu’elle est un désert. Ohlân, en revanche, est une planète de masse conséquente. Nil a de la chance de l’avoir pour satellite…
— Pourquoi, de la chance ? Est-ce parce que nous aurions ainsi un autre habitat possible à portée ?
— Pour cela, mais pas seulement. Nil a de la chance, parce qu’Ohlân exerce sur Nil un effet bénéfique pour les êtres qui y vivent. Si nous n’avions pas Ohlân pour satellite, Nil subirait des changements d’inclinaison beaucoup plus amples sur son axe de rotation autour du soleil. Les variations saisonnières seraient extrêmes, et la civilisation de pourrait alors éclore que sur une bande étroite, à l’équateur. Surtout, nous serions soumis à une plus lourde attraction. Notre développement physiologique en aurait été affecté. Au fond…
Nïmsâtt s’interrompit subitement. Elle réfléchissait.
— … Au fond, rien ne prouve qu’Ohlân soit un satellite de Nil. Tout dépend du centre de masse… Oui, le centre de masse : c’est le point de l’espace autour duquel orbitent les deux planètes. Si ce point est placé entre Nil et Ohlân, alors on peut supposer avoir affaire à ce qu’on nomme une planète double. Pour savoir, le mieux serait de déterminer qui du soleil ou de Nil exerce la plus grande force sur Ohlân… Ce doit être calculable…
Rus Nasrul sentit, pour la deuxième fois de sa vie, monter en lui le plus grand trouble face à une femme. Il eût été incapable de dire ce qui l’emporte, de l’admiration ou du désir. S’y adjoint une volonté, à son avis, moins noble : la volonté qu’elle soit à lui. Il en serait fier. Nïmsâtt s’était interrompue. Elle leva les yeux vers Nasrul, se sentit regardée comme jamais elle ne l’avait été. Le trouble de l’homme se transmit à elle. Mais, tandis qu’il demeure calme, elle laisse transparaître ses émotions. Voyant que Nïmsâtt n’était plus en état de parler, Nasrul décida de faire tomber la tension :
— Nous devons savoir si le puits communique avec une rivière souterraine ; et si c’est le cas, nous assurer que la rivière mène à l’océan. Je vais plonger…
— Non, Nasrul ! C’est moi ! Je vais le faire. J’ai appris des Sils à demeurer en apnée plus longtemps que quiconque de nos races. Je te supplie de me croire. Je l’ai fait déjà plusieurs fois. Sans jurer que j’ai l’habitude, j’ai une expérience de ces plongées dans les cénotes. Je sais pressentir les issues. Je ne crains pas de m’engager dans des boyaux étroits. Fais-moi confiance !
Sans s’en rendre compte, elle venait de tutoyer son compagnon. Nasrul se garda de relever ce changement. Son amour ne faisait que monter. Presque malgré lui, un lent mouvement de tête révéla qu’il refusait de tout son être l’idée de laisser cette femme aller ainsi, seule, à l’aventure.
— Je ne peux te laisser aller, Nïmsâtt. Je ne vivrais pas, tant que tu n’aurais pas réapparu.
— Si, tu vivras ! Et tu ne te tourmentes pas. Je reviens vite.
Et Nïmsâtt plongea. Elle choisit le cénote tout proche, de large diamètre, entouré de plus petits. Elle s’était prestement dévêtue et Nasrul eut à peine le temps de la voir disparaître. Il restait aux aguets. Une minute s’était tout juste écoulée, qu’il commença de s’inquiéter. Puis trois minutes, et Nïmsâtt ne revenant pas, Nasrul ne voulut plus attendre. L’eau est fraîche, transparente, le puits est vertical, d’abord. Nasrul nagea jusqu’à ce qu’il estimât en être le fond. Parvenu à ce fond, il constata que le couloir fait un coude à angle droit, parallèlement donc à la surface. Pourquoi n’a-t-il pas déjà rencontré Nïmsâtt ? Nasrul n’avait, depuis son adolescence, jamais subi la peur. Mais l’idée d’avoir perdu Nïmsâtt lui est insupportable. Arrivé à l’endroit du coude, il commençait à désespérer, quand il vit, face à lui, Nïmsâtt qui venait à sa rencontre, excitée et joyeuse. Rus Nasrul lui fit signe de remonter. Mais Nïmsâtt l’invita au contraire à la suivre dans l’autre direction. Elle nageait devant lui, très vite, dans le couloir horizontal. Puis tous deux parvinrent à un coude, également à quatre-vingt-dix degrés. Elle lui indiqua alors de lever les yeux, et il vit le ciel : l’entrée d’un autre cénote, plus petit et relié au grand par la rivière souterraine.
Ils remontèrent à l’air libre, l’un et l’autre au bord de la suffocation. Nasrul se demanda, un instant, comment Nïmsâtt avait pu tenir si longtemps immergée ; et il comprit qu’elle avait dû remonter une première fois jusqu’à la surface, puis revenir pour le rejoindre. Elle aurait supposé qu’à son tour il avait plongé, et elle voulait le rassurer.
Nasrul, cette fois, ne pouvait plus dissimuler son émotion. Tous deux étaient maintenant debout, se faisant face, et Nïmsâtt crut voir des larmes dans ses yeux. Elle en fut si touchée qu’elle se jeta dans ses bras. Il la serra longtemps contre lui, la dévisageant avec passion. Elle parvint à se dégager, car elle avait une annonce à lui faire :
— Nous devons retourner, mon chéri.
Elle ne lui laissa pas trop de temps pour assimiler la nouvelle :
— … Oui, il nous faut vraiment savoir si le cénote nous donne accès à l’océan. C’est toi-même qui l’as dit.
— Mais nous n’avons rien vu, pourtant. Apparemment, le couloir horizontal ne mène qu’à la sortie d’un autre cénote.
— Non, je ne pense pas. Juste à l’endroit du premier coude en venant du grand cénote, j’ai cru voir un passage. Il n’est pas large. Mais, normalement, il devrait déboucher sur un autre couloir ; et celui-ci pourrait conduire à la mer.
— « Normalement » ?
La question de Nasrul la fit pouffer.
— Oui, normalement pour moi ! C’est mon intuition… Et puis, j’ai deux indices.
— Lesquels ?
— L’eau est saumâtre, indice de présence d’eau de mer, et j’ai senti un courant d’aspiration à hauteur du coude. Ce pourrait être un effet de marée.
— Alors, qu’attendons-nous ?
Ils plongèrent à nouveau, mais, cette fois, de conserve. Tous deux se tinrent en même temps le même raisonnement : descendre le couloir vertical au plus vite ; emprunter l’entrée supposée de la ramification, tout en veillant à ce que l’exploration n’excède pas la moitié du temps d’apnée dont ils sont capables. Nasrul se faisait un défi de pouvoir rester immergé aussi longtemps que Nïmsâtt.
Or, celle-ci avait vu juste. Le couloir secondaire mène directement à l’océan. Heureusement, ils purent s’en apercevoir de loin. À peine avaient-ils franchi le goulet étroit qui débouche sur un bras de la rivière souterraine, qu’en effet ils entrevirent la lumière au bout du canal d’accès. Raisonnablement, ils n’auraient pas dû prendre le risque de s’y rendre. Mais l’envie fut trop forte. Déjà à mi-chemin Nasrul allait suffoquer, et c’est à ce moment que Nïmsâtt lui désigna, juste au-dessus d’elle, une grande cavité vide. À son « plafond » on devine, chose étrange, comme des racines d’arbres. Le couple se dépêcha d’émerger pour aspirer un air un peu vicié, mais tellement bienvenu !
Ils se faisaient à nouveau face, comme s’ils prenaient un bain. Ils se regardèrent dans la pénombre, débordants du bonheur que seule peut offrir la rencontre amoureuse. Là, ils vinrent l’un contre l’autre, leurs visages se touchaient. Nïmsâtt ôta le peu de vêtement qu’il lui restait et elle fit de même pour Nasrul. Il y a si longtemps qu’elle n’avait fait l’amour ! Nasrul, de même. Il prit appui sur un défaut de la paroi rocheuse et, saisissant de ses deux mains les fesses de son aimée, il la ramena fort contre son sexe, étourdi par le désir, lorsqu’il sentit le ventre doux contre le sien. Il la pénétra doucement, s’adjurant de ne pas aller trop vite, d’attendre la venue de son plaisir à elle. Ce n’est pas la première fois qu’il gérait ainsi le temps. Mais, jusqu’alors, il avait vécu cela comme une ascèse. Or il voyait maintenant son plaisir investi sans réserve dans la communion des corps, tandis qu’elle, Nïmsâtt, se sentit revivre. Son désir montait encore jusqu’à lui donner à éprouver un moment plein qui l’éleva à un état de béatitude. Puis brusquement le désir la reprit, explosa en un orgasme qui faillit lui faire perdre connaissance. Nasrul la serrait fort contre lui, ses lèvres appliquées aux siennes, et lui-même ressentit comme un éblouissement. Il sentait battre le cœur de Nïmsâtt contre le sien. Ils attendirent plusieurs minutes avant de se détacher l’un de l’autre. Sans se donner le mot, ils nagèrent alors, l’un contre l’autre, jusqu’à la mer, et sitôt sortis de l’eau, ils s’allongèrent sur une plate-forme rocheuse, au soleil, à contempler le ciel sans parler. Nïmsâtt rompit le silence :
— Comment allons-nous faire ? Aide-moi à trouver une solution !
— Tu parles de l’aéronef, n’est-ce pas ? Tu te demandes comment trouver le passage vers l’océan ?
— Tu m’as devinée. Le goulet d’entrée vers le « bon » couloir est beaucoup trop étroit pour l’engin, évidemment !
Nasrul réfléchit, mais il avait trouvé la solution. Il voulait seulement s’accorder un temps pour contrôler mentalement la cohérence de son idée.
— Tu te souviens de la caverne souterraine, Nïmsâtt ?
Elle ouvrit des yeux immenses :
— Comment ne m’en souviendrais-je pas ! Si je devais me rappeler une seule chose, c’est bien cette caverne.
— Pardonne moi ! J’avais en tête une observation. As-tu remarqué le plafond de la caverne ?
Le visage de Nïmsâtt se figea. Elle vient de comprendre :
— Oui, il y a un entremêlement de racines. Tu es un génie, Nasrul !
— Allons quand même vérifier : je te propose de retourner vers notre cénote, mais par la terre, cette fois. Nous tâcherons de bien estimer l’endroit en surface où l’on devrait faire l’excavation pour mettre la caverne à ciel ouvert. Si nous trouvons, si nous ouvrons la cavité, nous aurons assez de diamètre, j’espère, pour laisser passer l’engin. Qu’en penses-tu ?
— Oui, largement, à mon avis.
Ils se mirent debout, gravirent le cap rocheux jusqu’au sommet d’où ils purent deviner, un peu plus loin, le plateau des cénotes. Ils eurent vite fait de s’entendre sur le lieu probable où il faudrait creuser pour déboucher sur la cavité souterraine. Nasrul marqua d’une grosse pierre le point choisi.
Le soleil allait maintenant se coucher sur l’océan. Le couple se retourna pour admirer le crépuscule dont ils prenaient la couleur. Comment un tel amour est-il possible ? L’un et l’autre parvenaient malaisément à réaliser ce qui leur arrive. Sans un mot ils entreprirent de descendre la montagne, accélérant le pas, afin de gagner le village des Sils avant la nuit.