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Mon voyage en enfer. Ma descente dans l’obscurité.

Mon voyage en enfer. Ma descente dans l’obscurité.

Publié le 11 mars 2021 Mis à jour le 1 juil. 2021 Culture
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Mon voyage en enfer. Ma descente dans l’obscurité.

Tout s’est écroulé le 13 juillet 2019. Mon corps m’avait abandonnée depuis plusieurs mois. Je le maltraitais à coup de morphine et d’opium. Je serrais les dents et souriais à tout le monde. Tout allait bien. Ma vie était parfaite. Une belle maison qui était mon cocon. Un mari que j’aimais profondément. Un travail, des responsabilités et des étudiants que j’adorais. Je leur étais totalement dévouée. Jour et nuit. Corps et âme. Poussée par le besoin de toujours être parfaite, de toujours faire mieux et surtout de faire plaisir aux autres. Je m’étais oubliée. Je m’étais perdue.

Tout s’est écroulé le 13 juillet 2019. Encore un rapport à lire. Encore une remarque. Encore un message sur mon téléphone personnel. Je ne travaillais plus pour vivre, mais je survivais pour travailler. Pour être au service de. Mon esprit s’était éteint. Je n’étais plus que l’ombre de moi-même. Le fantôme de Laure GERARD, responsable pédagogique. Je ne contrôlais plus rien, pas même mes larmes.

Entre deux sanglots, j’ai appelé à l’aide. J’ai crié pour que l’on vienne me sauver. Entre deux sanglots, j’ai aperçu le sourire chaleureux mais quelque peu décontenancer de mon homme. Son ancre venait de couler !

Il m’a tenu si fort pour m’empêcher de sombrer totalement. Me retenant pour que je n’entame pas mon dernier voyage. Même à demi-consciente, je sentais sa présence. Il était là pour moi. Chaque jour. Chaque minute. Chaque seconde. Il veillait sur moi, vivait pour nous deux. Il était devenu mon repère, mon point d’ancrage dans cette réalité.

Les semaines passèrent. J’étais devenu un véritable légume. Incapable de tout. A peine levée que j’étais déjà emmitouflée dans le plaid en position couchée sur le canapé. J’observais le silence ou les conneries qui défilaient à la télé.

1 neurone sur 5. Voilà tout ce qui fonctionnait là-haut. La machine était passée en mode survie. Avec, en guise d’alarme, ce haut-parleur infatigable qui me harcelait. C’est ta faute ! Tu es vraiment nulle. Dégonflée ! T’avais un super boulot et tu as tout gâché ! Abrutie par les médicaments, je me laissai bercer par ce bruit entêtant. J’étais convaincue qu’il disait vrai. Que j’avais pris la fuite. Que j’avais échoué.

Les mois passèrent. Le confinement fit son apparition. Contrairement à de nombreux français, il fut pour moi salutaire. Le brouhaha chaotique se dissipa peu à peu, laissant place au silence. La présence de mon mari me soulagea. M’imposa un rythme. À ses côtés, je me suis reconstruite. Je me suis relevée. Je me suis écoutée. Pas à pas. De rendez-vous en rendez-vous : médecin, psychologue, canapé. De pleur en pleur. De révélation en révélation. Sur moi. Sur les autres… Scientifique pragmatique, je suis devenue une artiste intuitive.

Le 13 juillet 2019, j’ai entamé un long voyage. Brumeux. Pénible. Douloureux et salvateur. Un voyage vers celle que j’avais étouffée, tuée, toutes ces années. À cause d’injonctions. Pour répondre aux attentes d’une société qui ne me comprenait pas. Pour rentrer dans une case et ne plus me sentir différente.

À présent, je sais qui je suis. Je me bats tous les jours pour l’accepter. Pour m’autoriser à être moi. Ce zèbre indomptable qui utilise les mots pour soulager ses propres maux.

Mon voyage n’est pas encore terminé, mais il est bien amorcé. Puisqu’un voyage de 1000 kilomètres commence toujours par un premier pas.


Texte de L.S.Martins

Image par Noupload de Pixabay 

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