Une question de synchronicités
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Une question de synchronicités
Laissez moi vous narrer lez circonstances de mon arrivée à la Réunion.
Laissez moi vous parler de synchronicités, ces troublantes coïncidences qui semblent relier différents évènements par un sens qui nous saute aux yeux, sans qu'elles n'aient pour autant de relation causale identifiable. Laissez moi vous étonner par ces curieux hasards, ces signes que la vie semble nous déposer sous les yeux pour nous orienter vers là où nous pressentons devoir aller, pour qui prend le temps de les recevoir et de les considérer. Laissez moi ouvrir la possibilité que tout ce qui régit ce monde n'est pas rationnellement compréhensible, que tout n'obéit pas aux lois du monde visible et tangible. Laissez moi vous rappeler que contrairement à ce que nous voudrions croire de nous mêmes, nous sommes avant tout des êtres subjectifs et irrationnels, que ce n'est pas une tare mais au contraire une autre voie intelligente de rencontrer le monde invisible qui nous entoure, plus inconsciente, intuitive et spirituelle, et que c'est peut-être justement là que l'Homme parvient à poser du sens et à raconter de jolies histoires, à réenchanter le monde et le rendre poétique. Qu'il ne s'agit pas de sacrifier la raison à la naïveté ou à l'incrédulité, mais peut être simplement de reconnaitre qu'il puisse y avoir des manifestations sur lesquelles notre raison n'a pas d'emprise. Comme une invitation à sortir de la volonté de tout contrôler du mental, et d'aller vers un peu plus de laisser être et de lâcher prise...
Nimes a été pour moi un étape transitionnelle. Trois mois exactement, quasiment au jour près, le temps de vendre la maison et de fermer les portes qui avaient besoin d'être fermées. Trois mois pour me mettre en mouvement, quitter cet entre-deux où je survivais sans me sentir réellement vivant, comme un coup de pied au cul de la vie pour aller de l'avant. Trois mois pour continuer de descendre et d'explorer ces zones d'ombre de moi-même, dans le prolongement de ce travail introspectif entrepris avec les chamans en Amérique du sud, qui, aussi inconfortable et remuant soit-il, a pour visée de déconstruire, nettoyer, panser et dépasser ce qui a besoin d'être laissé ou changé. « Mourir pour renaître ». Telle est leur devise qui m'a accompagnée sur ce chemin, sans que je ne comprenne trop ce qui m'arrive. Y suis-je parvenu ? Je ne saurais trop dire, mais ce que je sais c'est que des choses ont bougé ; ça c'est sûr.
Au retour d'Equateur, tout s'était pourtant aligné très vite : une annonce pour un poste dans un service d'oncologie-soins palliatifs parfaitement dans l'esprit de ce que je recherchais, une rencontre qui se passe bien et leur souhait que je commence très rapidement pour pallier aux congés d'un des médecins, un logement dans un co-living -sorte de colocation tout équipée de haut standing- trouvé dès le lendemain... En tout juste dix jours, tout était plié, les bagages faits, la maison mise en vente, avec deux propositions à prix comptant dès le lendemain... La mise en mouvement s'imposait à moi avec une fluidité et une rapidité déconcertantes, que je n'avais qu'à suivre ; et je partais ainsi sur Nîmes pour ouvrir un nouveau chapitre, en passant par l'écovillage de Sainte Camelle en Ariège pour découvrir les danses de la paix universelles.
Toutefois, l'expérience professionnelle ne fut clairement pas à la hauteur de mes attentes, et je me retrouvais dans une structure regroupant 3 entités différentes sous un même toit, à l'organisation et à la coordination extrêmement complexe et peu fluide, et cette lourdeur fut majorée d'autant en période estivale où tous les dysfonctionnements sont amplifiés par les absence et une organisation en dégradé. En tout cas un fonctionnement qui ne me correspondait vraiment pas, qui m'a rapidement fragilisé dans ma pratique et ma confiance en moi. Et dès le premier jour, cette petite voix intérieure qui me dit une nouvelle fois avec insistance que je ne suis pas à ma place ici...
« Ce que la tête ne veut pas entendre, le corps l'exprime ». me plais-je régulièrement à rappeler à mes patients... Sans que je ne sache toujours bien comment le gérer moi-même. Chez moi, quand ça parle, ça parle fort. Le sommeil en est toujours la première victime, point de départ de manifestations que je considère comme très archaïques et sur lesquelles je n'ai aucune emprise. J'ai du rapidement mettre fin à cette expérience professionnelle. Entreprendre à nouveau tout un travail en profondeur, par des méthodes conventionnelles et non conventionnelles, pour tenter d'accueillir et d'explorer ce qui une nouvelle fois se manifestait et ne demandait qu'à s'exprimer. J'ai mené un ardent combat de la confiance face au doute, en moi autant qu'en la vie. Lutter contre l'absurdité apparente pour trouver le sens de ce que je traversais, alors que je me retrouvais sans boussole sur mon radeau au milieu de la tempête. Partagé entre un mental évanescent et coupé du monde, et ma conscience de l'importance d'habiter mon corps, de parvenir à me reconnecter à mes ressentis. La tête pense. Le cœur sent et sait. Et le corps l'exprime, aussi douloureux cela soit-il. Le mental n'est qu'un outil, mais dans l'obscurité, il s'agite encore plus et cherche à prendre tout le pouvoir, pour garder le contrôle et assurer sa survie. Et pourtant... C'est quand on tente de nager à contre courant du flux de la vie plutôt que de s'y abandonner quand celui ci devient turbulent que l'on s'épuise....
J'ai reçu, beaucoup reçu, de nombre d'entre vous. De l'attention, de l'écoute, du soutien, des conseils, de ces leçons de vie qu'on apprend avec le temps, mais qu'on oublie ou qui perdent de leur consistance quand on est en zone de turbulence. Surtout, j'ai reçu beaucoup de marques d'affection de générosité et de bienveillance. Et j'ai appris à recevoir, juste recevoir. Même si ce n'est jamais facile de se montrer dans sa propre vulnérabilité. Et savoir simplement faire preuve de gratitude en retour. C'est la raison d'être de cet article aujourd'hui.
Concert de Sigur Ros aux Arenes... ou mettre de la lumière sur les zones d'ombre..
Et alors, quand dans le tumulte j'ai réussi à me raccrocher à la confiance dans la vie, à me dire que je prenais une nouvelle et puissante leçon, et que plutôt que de me lamenter sur l'aspect chaotique de mon parcours il y avait un travail de fond qui s'opérait en moi et pour lequel il importait d'en éprouver reconnaissance et gratitude...Alors tout le paquet de nœuds et de doutes s'est rapidement délité, et c'est cadeau sur cadeau que j'ai alors reçu. Mon très cher Nouch me l'avait pourtant dit : "des fois, la vie nous amène à expérimenter l'exact opposé de ce qu'il nous convient pour mieux percevoir la voie qui nous correspond. Mais aussi inconfortable cela soit-il, on est toujours à sa juste place..."
Tout a commencé par un appel répété du fond d'un sac, suivi d'un week-end pour rencontrer son guide intérieur. Puis un message troublant d'une amie rencontrée lors de ma retraite au Pérou : « J'ai reçu un message qui m'a été adressé pour toi hier au cours d'une pratique. Je ne sais pas ce que ça veut dire, ça te parlera peut-être, en tout cas je te le transmets, fais en ce que tu en voudras : quand on se sent étriqué dans une situation, il faut voir plus loin, plus large, plus vaste. » Immédiatement après, de multiples messages et témoignages d'amis évoquaient la Réunion. Et j'ai alors senti cette petite flamme intérieure se raviver à l'évocation de cette terre d'interculturalité qu'on avait souvent évoqué lors de mes études d'interculturel. J'ai en tout cas très vite retrouvé ce fil conducteur que j'avais perdu, en traçant un pont entre ma casquette de soignant et celle d'interculturaliste.
J'ai procédé à mon déménagement, avec l'aide précieuse de mon frère et de mes plus proches amis. J'ai tourné définitivement la clef dans la porte, fait mes adieux au passé et repris ma propre route en regardant droit devant. Quand j'ai vu toute ma vie stockée sur 4 palettes, plutôt que de déplorer la fin d'une déconstruction, je me suis rappelé cette intention posée, et je l'ai perçu comme un appel, une invitation à partir, « plus loin, plus large, plus vaste», libre désormais de tout attachement contraignant, comme me l'avait rappelé ma chère mère.
J'ai passé deux coups de fil. Envoyé deux CV. J'ai rappelé une semaine plus tard, une demi heure tout juste après le désistement d'un médecin, et trouvé un remplacement en urgence d'un mois en HAD débutant 10 jours après, frais de transport, de location de véhicule et d'hébergement entièrement pris en charge. Une demi heure encore après, l'équipe mobile de soins palliatifs initialement contactée m'informait du non renouvellement d'un médecin de leur équipe, et d'un poste disponible à partir de début novembre. J'apprenais ensuite la date de vente définitive de la maison au 25 septembre. Mon contrat se finissait officiellement fin septembre. Tout était parfaitement aligné, et toutes les pages se clôturaient exactement en même temps. Je n'avais plus qu'à accepter l'invitation et déménager ma petite chambre meublée dans mon chouette coliving. La vie m'appelait ailleurs, et il faut juste savoir laisser les questions et les doutes de côtés, lâcher le contrôle et l'emprise, et simplement suivre l'appel ressenti. Le lendemain, je trouvais une sous location dans une colocation sur les hauteurs de Saint Denis, et comme un surprenant bis repetita, je passais à nouveau par l'écovillage de Sainte Camelle pour participer au Mantrafest, magnifique festival de chants et danses sacrés du monde où j'ai reçu un extraordinaire cadeau de renaissance, avant de m'envoler 10 jours après pour la Réunion et écrire ce nouveau chapitre. La suite, je vous la raconterai au fur et à mesure de ce que je vais vivre ici ?!...
Et la même, 20 ans avant (un peu plus jeune, un bel uniforme et avec un peu plus de cheveux..;-))
La vie est étrange. Elle alterne des phases où tout est fluide et déroule avec une insolence extraordinaire, et d'autres où tout est rude, grince et bloque, sans que l'on ne comprenne vraiment pourquoi on passe d'un extrême à l'autre. Mais chaque phase je crois a sa raison d'être, son enseignement à tirer. Je crois intimement que nous sommes tous des êtres avant tout doués d'une conscience, qui doit s'éprouver pour pouvoir s'élargir. Même si cela fait de la vie un fleuve qui n'est pas toujours tranquille. En tout cas, il est plus turbulent pour certains que pour d'autres...;-)
Je vous embrasse.
Au plaisir de lire comment se déroule votre propre flux de vie...:-)