Liberté d'expression, Parole libre et Vérité
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Liberté d'expression, Parole libre et Vérité
Texte de Julian Assange
Lors de son premier discours en tant que directeur de la CIA, Mike Pompeo choisit de déclarer la guerre à la liberté d’expression plutôt qu’aux véritables adversaires des États-Unis. Il s’en est pris à WikiLeaks, dont je suis le rédacteur, qu’il a nommé « agence de renseignements adverse non étatique ». Selon la vision mondiale de Pompeo, dire la vérité au sujet de l’Administration peut être un délit – comme le souligna rapidement l’avocat général Jeff Sessions en décrivant mon arrestation comme étant « prioritaire ». Des agences de presse ont annoncé que les procureurs fédéraux s’ingéniaient à trouver des incriminations et à porter des accusations contre des membres de WikiLeaks – incluant probablement le complot, le vol de biens gouvernementaux et la violation de l’Espionage Act.
Lorsque le directeur de la CIA, qui est un fonctionnaire non élu, diabolise un éditeur tel que WikiLeaks avec des mots tels que « frauduleux, lâche ou ennemi », il alerte tous les journalistes, ou le devrait. Le point suivant du discours de Pompeo, infondé, définissant WikiLeaks comme une « agence de renseignements hostile non étatique », est un poignard pointé vers le droit constitutionnel des Américains quant à la réception d’informations correctes concernant leur gouvernement. Cette accusation reflète de la même façon les atteintes qui ont été de tout temps organisées par des bureaucrates en même temps que l’échec des discours destinés à criminaliser révèle, lui, leurs propres échecs.
Le président Theodore Roosevelt avait compris le danger d’abandonner à ces « idiots ou traîtres qui travaillent à transformer en délit le fait de dire la vérité au sujet d’une Administration lorsqu’elle est coupable d’incompétence ou d’insuffisance ». Cette « tentative est elle-même un délit contre la nation », avait écrit Roosevelt. Le président Trump et ses collaborateurs devraient tenir compte de ce conseil.
Pompeo a pourtant été un fan de WikiLeaks. Le 24 juillet 2016, cet homme politique qui nous soutenait à l’époque avait twitté avec fierté « Besoin de preuves supplémentaires que le scandale atteint le Président Obama ? 19 252 e-mails du DNC publiés par WikiLeaks ». Pompeo aimait WikiLeaks quand il concevait que nous publiions des informations révélant les insuffisances de ses rivaux politiques. Ce n’est que lorsque nos publications ont atteint les propres intérêts de Pompeo que WikiLeaks est devenu sa cible. Il a ensuite supprimé le twitt mais a appris que la vérité est difficile à cacher à l’heure digitale. On ne peut pas aimer la vérité un jour et chercher à la taire en incarcérant son rédacteur le jour suivant.
Trump alors candidat avait twitté : « Incroyables informations fournies par WikiLeaks, très peu reprises par des médias malhonnêtes ». Le président avait mentionné WikiLeaks 164 fois pendant le dernier mois avant l’élection et s’épanchait en twittant : « J’aime WikiLeaks ».
Tous les gouvernements démocratiques sont dirigés par des êtres humains qui ne sont pas parfaits. Les autocraties sont bien pires – le « dictateur bienveillant » est un mythe. Ces êtres humains, qu’ils soient démocrates ou autocrates, font des erreurs et commettent des délits, ils se servent souvent plus qu’ils ne servent leurs pays. Ainsi, ils sont l’objet des publications de WikiLeaks.
Les enjeux fondamentaux de la liberté d’expression, de la liberté de parole et de l’interaction entre la liberté et la sécurité, datent du fondement de la République. Ceux qui croient en la persécution et la suppression de la vérité pour atteindre leurs objectifs individuels sont inévitablement oubliés par l’histoire. Dans un combat à la loyale, John Milton constatait que la vérité gagne toujours.
Julian Assange,
fondateur et rédacteur de WikiLeaks