Mes cheveux blancs se comptent par milliers

Ils ne sont pas au nombre de mes trente et quelques années

Mais sont les téméraires témoins d'un temps passé

Et d'autant d'obstacles fièrement surmontés.

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Certes, ils ne se font pas bien discrets

Sur ma tête bouillonnante de mille et un projets

J'imagine qu'ils sont aussi quelque part le reflet

Des nuits blanches que je préfère passer à rêver.

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C'est qu'ils ont pris l'audace de s'implanter

Déjà très jeune, à l'époque sombre et tourmentée

De l'adolescence difficile et contrariée

Tandis que sur mon front ils préféraient alors briller.

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Ils sont les compagnons de mes vies passées

Toujours plus nombreux, fidèles et enracinés

Quand parfois je me sens lasse et déracinée

Ils me ramènent à un port d'attache imaginé.

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Sur mon crâne j'affiche fièrement mes trophées

De m'être relevée très tôt de choses compliquées

Ne dit-on pas d'ailleurs que l'on se fait

Des cheveux blancs à trop s'inquiéter ?

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C'est ainsi qu'ils me rappellent avec quelle férocité

J'ai choisi de mener une vie folle et illuminée

Laissant de côté les idées noires du passé

Quand jusqu'à leurs pointes, j'ai choisi la clarté !

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Sous eux, c'est la tempête enflammée !

Un album photos d'incroyables contrées !

Un esprit vif plein de souvenirs éclairés !

Qui viennent peupler ma tête de reflets argentés.

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Pour toutes ces raisons, quelle idée de vouloir cacher

Ces précieux atouts qui me donnent l'air assuré

D'un sage bien avant l'âge, et dont on peut admirer

Le chemin parcouru et les leçons tirées ?

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Et d'ici vingt ans, après tant d'histoires partagées,

Toute de blancheur auréolée, je réciterai

Un vers de ce Baudelaire que j'aurai tant admiré :

« J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans », qui sait...

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Peut-être avait-il à trente ans,

Lui aussi des cheveux blancs ?