Chapitre 21
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Chapitre 21
Il m’ouvre et je monte dans l’ascenseur qui semble m’attendre. Au cinquième étage je tourne sur la droite et vois la tête de Rick qui me guette.
— C’est ici, chantonne-t-il en me voyant regarder dans le couloir.
Le sourire s’affiche sur mon visage et je sens qu’il n’est pas prêt de s’effacer.
— Toc toc, je fais en m’essuyant les pieds sur le paillasson.
— Entre, j’étais justement en train de nourrir mes ogres.
Je referme la porte et découvre un appartement très bien rangé et ordonné. Rien ne traine. Il vient au-devant de moi, me fait la bise et récupère la tarte pour l’emmener dans la cuisine. Sans réfléchir, je profite d’avoir les mains libres pour retirer mes chaussures et les laisse devant la porte. En chaussettes, je piétine tranquillement dans le couloir. J’arrive à peine dans le salon, que je vois l’immense aquarium contre le mur et j’ouvre la bouche dans un grand « waaaw ! » Mon manteau toujours sur le dos, je m’approche et détaille les poissons qui nagent gracieusement.
— Je vois que tu as déjà trouvé les stars.
— Ils sont trop beaux ! Magnifiques ! Je savais qu’ils étaient beaux, mais là, ils le sont encore plus qu’en photo.
Je les suis de l’index en essayant de me souvenir de leurs noms.
— Anémone et Corail, je me souviens en voyant les discus. Et les scalaires, que je réfléchisse… Mia ?
— Mao, Emi et Yori. Mais tu n’étais pas si loin.
Fascinée, je ne les quitte pas des yeux.
— Les ogres sont à côtés. Tu devrais leur dire bonjour, sinon ils risquent d’être contrariés.
Je pivote sur la gauche et vois le deuxième aquarium un peu plus petit, où Bubulle et Coco nagent paisiblement.
— Je suis impressionnée. Ils me rendent toute chose, je confie en m’émerveillant. Ca me donne encore plus envie d’acheter sa copine à Surimi. D’ailleurs j’aurais besoin de tes conseils, mais on a le temps d’en discuter.
J’enlève finalement mon manteau et le pose sur une chaise. Rick me regarde et je souris presque mal à l’aise.
— Jolie coiffure. Ca te va bien.
— Oh, merci, je fais en caressant mes cheveux courts des deux mains.
— Besoin de changement ?
— Tout à fait.
— Tu as eu raison.
J’ouvre mon sac et en sors les dvd pour masquer mon embarra face à ses compliments.
— Et voilà les deux trésors du jour, je dis en sortant les dvd.
— Ca fait longtemps que je n’ai pas passé un après-midi à regarder des Disney. Ca va me faire retomber en enfance.
Après être restée dix bonnes minutes devant chaque aquarium, sous le charme des poissons de Rick, je m’assois sur le canapé pendant qu’il lance le monde Némo.
— Je ne l’ai vu qu’une seule fois et ça fait des années. Je vais le redécouvrir.
— Non, c’est impossible. Tu adores les poissons et tu ne l’as regardé qu’une fois ? Je ne comprends pas ta logique.
— Le côté enfantin des Disney qui a dû me bloquer. J’ai perdu mon âme d’enfant. Mais grâce à toi, elle va revenir.
— Je suis très fière de réveiller l’enfant en toi, je dis en croisant les jambes.
Le film commence et j’ai déjà presque la larme à l’œil en sachant que Corail va se faire tuer par un barracuda. Mais je ne vais pas pleurer devant Rick. Alors je serre les mâchoires et regarde discrètement Bubulle et Coco à gauche de la télévision. Une fois que la scène est passée et que l’histoire commence pour de bon, je retrouve mon sourire face à un Némo excité d’aller à une sortie scolaire.
A la fin, j’ai les jambes repliées contre moi, ravie de voir que les trois héros se sont retrouvés et qu’ils regagnent l’océan. Plusieurs scènes m’ont fait se plier de rire, même si je les ai déjà vu plusieurs fois. Rick finissait par rigoler avec moi, rien qu’en m’entendant.
Quand le générique commence, j’avance au bord du canapé et repose les pieds parterre.
— J’adore ce film d’animation ! clamé-je en levant les bras.
Rick est content de me voir si enthousiaste. Me voir comme ça le fait sourire, j’égaie sa journée.
— Je ne voudrais pas faire l’affamée, mais est-ce qu’il n’est pas temps de prendre le goûter ?
— Justement je me disais qu’il fallait y penser, avant de louper l’heure de ta tarte. Je te laisse te mettre à la table.
Il part dans la cuisine et revient avec la tarte.
— Tu as besoin d’un coup de mains ?
— Je gère, dit-il en repartant chercher des assiettes à dessert.
Je coupe la tarte en quatre parts et Rick me demande si je compte recouper chaque part en deux.
— Heu, non. Pourquoi ?
Il me montre la largeur de chaque part et je pouffe de rire.
— Tu ne vas pas me faire croire que tu es impressionné par la taille de la part de la tarte.
— Même pas peur. Je suis un ventre. Mais elle va vite être mangée à ce rythme.
— Tant-mieux, je l’ai faite pour qu’on se régale.
Je lui sert une part dans son assiette et en glisse une deuxième dans la mienne.
— Un café ? Du thé ?
— Je veux bien juste un peu d’eau. Je fais un régime de boisson à l’eau.
— Eau pétillante, plate ou du robinet ?
Ses questions m’amusent et je ne retiens pas mon envie de rire.
— Un verre d’eau plate sera parfait.
En même temps que nous dégustons la tarte je lui montre sur mon portable les aquariums que j’ai repéré.
— Tu crois que ceux-là feront l’affaire ?
— Certainement. Après je trouve ça presque dommage que tu investisses dans un deuxième aquarium qui sera ensuite non utilisé.
— Il ne faut pas que je le laisse en route, pour en cas de besoin ?
— Logiquement si. Mais dans les faits, peu le font. C’est de l’entretient et un coût en énergie, pour un bac vide. Tu devras faire les changements d’eau toutes les semaines, vérifier les taux de l’eau. Alors que tu n’auras peut-être jamais besoin de le réutiliser.
Sa remarque me laisse perplexe. Est-ce que ça signifie que je ne dois pas prévoir d’aquarium de quarantaine ?
— J’aurais bien un aquarium à te prêter si tu veux. Il fait soixante litres, avec un filtre et l’éclairage. Il pourrait te dépanner le temps de la quarantaine de la copine de Surimi.
— Ce serait très gentil de ta part, mais tu n’en as pas besoin ?
— Je l’avais acheté le temps d’intégrer les scalaires avec Anémone et Corail. Depuis trois ans il est dans un coin de ma cave, à prendre la poussière. S’il peut te rendre service ça ne me gêne pas du tout de le prêter.
— J’accepte volontiers. Et je te le rendrais dès que sa copine sera avec Surimi 1er .
— Ca marche, dit Rick en me faisant un clin d’œil.
Un problème de réglé. Et cette solution me convient parfaitement.
— Et pour cette histoire de changement d’eau ? J’aurais besoin que tu m’expliques.
— C’est très simple. Même si j’ai eu l’impression de t’avoir fait paniquer avec mes quelques explications.
— Paniquer, non, pas du tout, je mens en faisant un sourire forcé.
— Tu dois vider environ dix pour cent de ton eau. D’ailleurs j’ai déjà mis une pompe de côté. Tu aspires les saletés qui traînent au fond du bac en même temps. Autant en profiter pour faire un petit nettoyage des graviers. Tu gardes l’eau de ton bac dans un seau pour nettoyer des décors ou le filtre si besoin. Ne décape pas tout chaque semaine. Tu peux par exemple rincer les éponges et la ouate du filtre une fois tous les quinze jours. Et nettoyer les décorations, et un peu les graviers une fois par mois maximum. Tu n’as qu’un seul poisson pour le moment, donc ton aquarium n’a pas de raison d’être sale. Il faut faire plus attention en cas de surpopulation ou si l’eau est mal traitée.
— Et je ne dois pas nettoyer avec l’eau du robinet ?
— Non, jamais. Ca risquerait de tuer tes poissons. Sur les décors et surtout dans le filtre, il y a ce qu’on appelle les bonnes bactéries. Elles sont essentielles au cycle de l’eau et à l’équilibre de tes poissons. En rinçant à l’eau du robinet, tu vas détruire ces bonnes bactéries et ça peut provoquer des pics de nitrates et nitrites.
— Oh, je vois. Donc jamais d’eau du robinet. Mais j’utilise quelle eau pour remplir mon bac après ?
— Là tu prends de l’eau du robinet, me répond Rick. Pour ne pas provoquer de nouveau pic, tu as deux solutions. La première, tu prépares l’eau la veille. En vingt-quatre heures les substances nocives vont s’évaporer, ça te permettra aussi que l’eau soit à température ambiante. Il ne faut pas ajouter de l’eau froide. De mon côté je remplis des bouteilles vides la veille de mon changement d’eau. Mais sinon tu peux utiliser les conditionneurs d’eau. Ce sont les mêmes que ceux que tu as acheté pour mettre en route ton aquarium. Tu en mets dans ton bac au moment de changer ton eau et ça détruira toutes les substances dangereuses pour le milieu aquatique.
— C’est tout ?
— Je t’avais bien dit que ce n’était rien n’insurmontable.
— Et je dois faire ça combien de fois ?
— L’idéal c’est toutes les semaines. Les poissons rouges sont réputés pour être des gros pollueurs, alors… à la limite tu peux envisager un changement tous les quinze jours, mais pas plus.
— Hum, ok. Une fois par semaine. Ca devrait être possible. Et je devrais faire ça aussi avec l’aquarium de quarantaine ?
— Oui Madame, me répond Rick très sérieusement. En sachant que la durée recommandée de la quarantaine varie entre quinze jours et un mois.
— Tu avais séparé tes poissons combien de temps ?
— En ce qui concerne Bubulle et Coco je n’ai pas fait de quarantaine. Je l’ai eu en même temps, donc ils ont été mis dans le grand bain ensemble. Mais pour Anémone et Corail, j’ai laissé les scalaires en quarantaine. J’ai d’abord introduit Mao, puis Emi et enfin Yori. Chacun a une semaine d’intervalle. Chaque nouveau poisson peut déséquilibrer le bac, il vaut mieux éviter autant que possible d’en introduire plusieurs à la fois.
Je suis toujours autant impressionnée par toutes ses connaissances.
— J’y pense. Rien à voir avec les poissons, ni les changements d’eau et encore moins avec le monde de Némo. Mais j’ai terminé acide sulfurique d’Amélie Nothomb.
— Oh, génial ! je m’écrie en m’avançant sur la table. Alors ? Ton avis ?
— Original. Et son scénario est tellement probable. La téléréalité est devenue si célèbre. Les gens sont des voyeuristes qui se distraient par les petits et grands malheurs d’inconnus. Je suis certain que ce genre d’émission aurait un grand succès. Malheureusement.
— Je pense comme toi. Pourvu que personne n’ai jamais l’envie d’essayer. Si mes comptes sont bons, il ne t’en reste plus qu’un.
— C’est ça. Antéchrista.
— Il faudra que je t’en prête d’autres. J’ai tous ses livres sans exception. Il est même possible que j’en ai certains en double exemplaires. Juste parce qu’ils n’ont pas la même couverture.
Rick rit et me propose de lire un de ses livres fétiches.
— Du moment que ce n’est pas du Franck Thilliez…
— Karine Giebel.
— Quoi ? Non, non. A la bibliothèque des personnes disent qu’elle est encore pire que Thilliez. J’ai déjà des difficultés à dormir depuis que le médecin m’a arrêté les anxiolytiques, tu vas me rendre insomniaque.
— Tu es obligée de lire au moins un livre de ce genre, sinon je serais dans l’obligation de te rayer de ma vie. Comme tu aurais pu le faire si je n’avais pas cédé avec Amélie Nothomb.
Je doute presque qu’il me fasse une farce. Mais il tend le bras vers l’un des meubles où un livre était posé.
— Voilà l’heureux-élu. C’est le premier que j’ai lu d’elle et il vaut vraiment le coup.
Juste une ombre. Le titre me dit quelque chose, il doit être rangé dans l’un des rayons de section polar-suspens de la bibliothèque. Je lis rapidement le résumé. Arrivée à la dernière ligne, mes yeux se lèvent et croisent ceux de Rick.
— Tu veux vraiment que je lise ça ?
— Absolument.
— Donc, tu veux ma mort ?
Il éclate de rire et m’assure que ce ne sera pas si terrible.
— Finalement, je préfère peut-être en retenter un livre de Thilliez.
— Non. J’ai décidé que ce serait celui-ci.
— Moi je t’ai laissé entre plusieurs livres, je me défends.
— Si tu y tiens, je peux te proposer deux autres de ses livres.
— De Karine Giebel ?
Il acquiesce et récupère un autre livre, proche de l’emplacement où était le premier.
— Tu avais deviné que je voudrais avoir le choix, je dis amusée.
Il me répond juste par un sourire et me tend le deuxième livre.
— Les morsures de l’ombre, je lis sur la couverture. J’ai un troisième choix ?
— Le maitre du jeu. Ce sont deux nouvelles.
Les trois livres devant moi, je relis plusieurs fois chaque résumé pendant que Rick débarrasse nos assiettes vides.
— Nous sommes d’accord sur le fait que rien ne m’oblige de lire les trois ? Même si toi tu le fais. De ton plein gré.
— Je te défie d’en lire un et de ne pas enchainer avec les autres, me lance-t-il de la cuisine.
Dans sa voix, je devine de l’amusement et presque une légère provocation. Est-ce qu’il a aussi deviné que j’adore les défis ? Et je ne vais certainement pas me laisser intimider par des livres. Oh que non. J’ai une réputation de rat de bibliothèque à tenir.
Il revient et ne peut renier le sourire qu’il a sur le visage.
— Défi accepté Monsieur. Je peux garder les trois ?