On rencontre toutes sortes de personnes en faisant ce boulot. On prend parfois le temps de discuter avec des marins, des dockers, des parents et leurs enfants, des gens de passage, des habitués… certains deviennent des amis comme Lonnie et Candice, les proprios du Saxo, le club voisin, ou encore Janice, Lucille et Doyle de l’équipe du jour qui nous tiennent parfois compagnie après leur service. Et puis il y a les employés du Loop. Mais je ne peux pas dire que je les porte dans mon cœur. Ces gars-là consomment autant qu’ils consument. Ils viennent, commandent, avalent et partent sans un regard, sans un bonjour ni un au revoir. Et si, par malheur, l’attente leur semble trop longue, ils ne se privent pas de le faire savoir.

Le Loop est l’entreprise la plus importante de la ville. Bien qu’on ne sache pas vraiment ce qu’elle fabrique. Le secret professionnel est respecté à la lettre par celles et ceux qui y travaillent. On dit que l’existence même de Fallentown dépend du bon fonctionnement du Loop. Alors personne ne cherche à comprendre. Et les questions que l’on ne pose pas ouvrent la voie au sentiment d’impunité qui encourage la mise en œuvre de tout ce qu’il est possible d’imaginer.