Le Grand bain (Gilles Lelouche, 2018)
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Le Grand bain (Gilles Lelouche, 2018)
Un film dont la devise est "réveille la fille qui est en toi" ne pouvait que me plaire. Car il tient ses promesses: c'est toute une vision de la vie qui s'en trouve retournée, celle de la "start-up nation" dans laquelle les protagonistes de l'histoire ne trouvent pas leur place. Tous sont des losers dont la virilité est mise à mal. Mais parce qu'ils sont sept (plus le pilier), chiffre de l'union des contraires, ils sont coachés par des filles elles aussi frappées par l’adversité. Et ils cherchent la femme qui est en eux c'est à dire la forme parfaite, celle de l'homme de Vitruve de Léonard de Vinci qui réunit le cercle et le carré, c'est à dire l'homme et la femme. La métaphore du cercle et du carré qui cherchent à s'emboîter ouvre et ferme le film. Les figures de leur prestation de natation synchronisée alternent l'une et l'autre de ces deux figures. Ces hommes cherchent une harmonie, une paix intérieure qui passe certes par un peu de reconnaissance mais au vu du sport "de fille" qu'ils pratiquent, cela ne peut en aucune façon les faire briller au-delà de leur cercle d'amis et de leur carré d'initiés. Mais c'est suffisant pour redresser la tête et prendre une revanche sur tous ceux qui dans leur entourage se moquaient d'eux. Particulièrement la sœur et le beau-frère de Claire (Marina FOÏS) qui considèrent son mari dépressif Bertrand (Mathieu AMALRIC) comme un minable et feignent de la plaindre… de ne pas être partie en vacances depuis deux ans. Ou encore l'équipe de water-polo qui a fait de Thierry (Philippe KATERINE), le ramasseur de bouées de la piscine sa tête de turc.
Outre la mise en scène incisive et un véritable soin apporté à la photographie notamment lors des scènes de ballet aquatique, c'est le casting qui est décisif dans la réussite de ce film choral. Voir des acteurs venus d'horizons si divers jouer avec une telle générosité donne du baume au cœur. Outre Mathieu AMALRIC qui a enfin lâché ses rôles de bobos (je ne suis pas allergique à Godard et j’aime bien Rohmer mais Desplechin par contre...) le numéro déjanté de Philippe KATERINE (qui porte bien son patronyme!) est un atout maître. Benoît POELVOORDE offre lui aussi une excellente prestation en patron ripoux ainsi que Jean-Hugues ANGLADE en musicien raté obligé de travailler dans la cantine de sa fille pour subsister. Le fait de ne plus cantonner les acteurs dans une seule case est une excellente nouvelle pour l'avenir de la comédie en France.