Episode 51 : Brisé
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Episode 51 : Brisé
J’étais un homme brisé, avec pour unique compagne une bouteille qui semblait ne jamais être assez remplie…
L’opération s’était bien passée, d’après Joe. Il était fier de lui. Aucune complication. Aucun dommage collatéral. Il avait réussi à retirer cette putain de puce GPS de ce muscle bionique qui battait dans ma poitrine. Une intervention sans accro qui me laissait une magnifique cicatrice sur le thorax. L’alcool m’avait bien aidé. Comment ? Aucune idée et je ne voulais pas savoir. Semi-conscient, je ne ressentais plus rien. J’étais incapable du moindre mouvement. La lumière blanche imprimée sur mes rétines. Mon cerveau en boucle, ruminant toute cette histoire.
– Incroyable. Tout simplement incroyable…
Joe était sorti de son labo après des jours d’analyses. Il avait pris de nombreux clichés de mon corps et admirait l’ingéniosité de la machine. Tout mon squelette était fait d’un métal rare, aussi léger que de l’os, mais beaucoup plus solide. D’après lui, certains tissus étaient d’origine animale ou humaine et d’autre d’origine synthétique. Il semblait fasciné… L’œil sur son microscope, il me décrivait le fonctionnement de mon organisme. Détails que je préférais ne pas entendre. Alors, dès que mes jambes me l’avaient permis, je m’étais éclipsé pour aller me bourrer la gueule. Heureusement pour moi, le bar était bien fourni !
Il s’était approché de moi et, sans me demander quoi que ce soit, souleva mon tee-shirt et décolla mon pansement. La balafre était vraiment moche. La couture n’était clairement pas un de ses talents ! Mais visiblement, tout allait bien. Je cicatrisais… et lui n’en revenait pas. Il nettoya la plaie, changea les compresses et me regarda enfin dans les yeux.
– J’ai une bonne nouvelle. J’ai étudié votre cerveau et je crois pouvoir activer certains des super pouvoirs de synthé, comme vous dites.
– En quoi c’est une bonne nouvelle ?
Joe haussa les épaules, déçu par ma réaction sèche et désabusée.
– J’ai pensé que cela vous aiderait à mieux accepter la situation. Vous pourriez être connecté à l’IAC, entrer en contact avec notre chère Léila et peut-être même repérer Florigan.
– Pourquoi je voudrais entrer en contact avec Léila ? Elle a clairement choisi son camp ! Ce serait con de ma part de lui dévoiler notre cachette !
Joe m’observa quelques secondes avant d’ajouter d’une voix extrêmement sérieuse :
– À mon humble avis, ce n’est qu’une mascarade pour surveiller l’enquête et avoir accès à toutes les pièces à conviction.
– Quoi ? C’est une sacrée comédienne, alors ! Parce qu’entre l’état dans lequel elle a laissé le bunker et le rapport à charge qu’elle a monté contre moi, je ne vois pas ce qui vous permet de dire qu’elle est de notre côté !
– Elle aurait pu nous tuer.
Cette phrase me fit l’effet d’une grosse baffe. Il avait raison, elle aurait pu nous tuer. Elle aurait même dû le faire… Lui était la preuve de la folie de mon père et moi, l’ennemi public numéro un. Les ordres étaient clairs, en ce qu’il me concernait. Je devais être ramené aux autorités, mort ou vif. Alors pourquoi s’être échappée après avoir réduit en miettes le matériel informatique et mis le feu à une poubelle au niveau -2 ? Surtout, qu’elle aurait très bien pu nous assommer tous les deux et nous traîner à travers le désert, direction la ville.
– Alors, Moridan. Vous êtes prêts à développer pleinement votre potentiel ?
Mon potentiel… Je n’étais pas certain d’en avoir réellement envie. J'éprouvais une telle aversion pour les synthés, jusqu’à ce que je rencontre Léila, qu’il m’était difficile de concevoir que j’en étais un moi-même. Mais sans l’emprise de la technologie sur mon corps, je me sentais un peu humain. Alors, si mon cerveau se mettait à tourner comme un ordinateur continuellement connecté au réseau, l’illusion ne serait plus possible.
Texte de L.S. Martins (45 minutes chrono, sans relecture).
D'après Image par intographics de Pixabay : Homme Destruction Double - Image gratuite sur Pixabay