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Episode 19 : Le maître du jeu

Episode 19 : Le maître du jeu

Pubblicato 18 apr 2022 Aggiornato 18 apr 2022 Cultura
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Episode 19 : Le maître du jeu

Les Fjords. Une belle destination mon cul ! Ça puait la mort, même à travers le système de ventilation de cette satanée combinaison. Le ciel était tellement sombre et l’air chargé de poussière qu’on ne voyait même pas nos pieds. D’un autre côté, vu la gueule du paysage, ce n’était pas plus mal. Par moments, un coup de vent balayait la merde qui flottait devant nos yeux dévoilant des horreurs. Une véritable descente en enfer.

Des rochers, suintait un brouillard blanchâtre qui rampait vers nous. Une substance acide et corrosive aux relents de dégueulis. Tout simplement immonde ! Rien n’avait survécu ici. L’air était si toxique qu’aucune mutation, aucune évolution du génome, n’avait permis, à la flore comme à la faune, de s’adapter ici. Un milieu beaucoup trop hostile pour n’importe quelle créature. Alors, que pouvait-il y avoir de si intéressant ?

J’avais passé tout le voyage à réfléchir. L’évolution de cette affaire me troublait. Elle n’avait aucun sens. Elle avait démarré avec cette série de disparitions inquiétantes. Disparitions qui seraient passées totalement inaperçues sans les messages de ce taré. Des hommes, des femmes, des synthés… de tout âge. Leurs seuls points communs : des solitaires vivant sur la bague terrestre et possédant tous un tableau du même artiste. Un peintre adepte des paysages féeriques un peu glauques. Mais officiellement, aucune enquête n’avait été ouverte puisque je n’avais pas été fichu de trouver le moindre indice. Aucun corps, aucun témoin…

J’allais tout abandonner à cause de toute cette putain de pression de la haute sphère quand il s’en est pris à Léila. Même mise en scène lugubre, mais cette fois, le corps de ma coéquipière en était l’élément central. Quelques minutes de plus dans ces souterrains dégueu et elle y passait ! Pourquoi lui avoir laissé une chance de survivre ? Pas la moindre idée. Le pire était qu’elle n’avait aucun souvenir de ce qui lui était arrivée. Elle était persuadée d’avoir découvert un truc qui l’avait poussée à retourner dans les égouts, mais impossible de se rappeler quoi. J’osais même plus remettre ça sur le tapi devant elle, elle devenait complétement hystérique !

Le point positif, c’était que ça avait réveillé tous ces crétins en haut lieu. J’avais enfin le droit d’enquêter ! À partir de ce jour, les disparitions avaient diminué pour s’arrêter net. Mon instinct me criait que Gram était caché derrière toute sale affaire. Tout collait parfaitement. Les dates estimées des enlèvements correspondaient à ses jours de repos. Il avait une connaissance parfaite du terrain pour y avoir bossé quelques années avant d’atterrir ici. Il avait même identifié deux des victimes. Des gosses de riche qui avaient mal tourné et qui ne manqueraient à personne, selon lui. Pourtant, pas moyen de lui faire cracher le morceau. Il refusait de se mettre à table et restait muet durant des heures, un sourire pervers sur les lèvres. Les scientifiques fouillaient encore le chantier naval à la recherche de corps ou de preuves permettant de l’inculper, mais il était doué l’enfoiré. Putain de doué et méticuleux !

Et maintenant, je faisais le tour du monde, sous les ordres d’un inconnu qui semblait toujours avoir une longueur d’avance sur nous. Comme un putain de maître aux échecs… Je l’imaginais aisément derrière son plateau de jeu, l’air sérieux. Un verre de vieux scotch à la main. Et nous, pauvres cons, n’étions que ses pions. D’abord cet abruti de Gram, le fou qu’il n’hésita pas une seconde à sacrifier. Puis Léila, la reine qu’il avait mise en mauvaise posture pour obliger le roi, moi, à sortir de son trou ! Il avait bien joué son coup, c’était certain. J’étais devenu sa marionnette… et lui échappait me paraissait difficile. Pas sans renoncer à mon boulot.

– Fais gaffe, le bleu ! Je serais toi, je marcherais pas là-dedans !

Trop tard ! J’étais enfoncé jusqu’aux chevilles dans une putain de mélasse. Mes bottes commençaient à fondre et je n’arrivais pas à sortir de cette merde ! Et pour une fois, Léila ne se foutait pas de ma gueule. Elle avait même eu un sacré réflexe. Celui de me jeter au sol et de m’arracher de mes groles. Juste avant que ce liquide noir ne s’attaque à ma combi.

– Merci ! je t’en dois une belle !

– On a qu’à dire qu’on est quitte, le bleu.

– Ça me va…

– Ok, maintenant que tu fais plus la gueule, je peux savoir ce qui te préoccupe ?

L’image de ce joueur d’échec sûr de lui me revint en tête…

– Hé ! Moridan !

Je levai les yeux vers elle, surpris. C’était bien la première fois qu’elle m’appelait par mon nom.

Elle m’aida à me relever en me tirant par le bras droit, sans ménagement. Après une rapide vérification, tout semblait ok. Ma combinaison n’était pas percée et mon équipement fonctionnait toujours. J’avais juste l’air d’un con sans chaussure… mais, au moins, j’étais encore en vie.

– Tu penses quoi de toute ça ? Je veux dire de toute cette affaire…

– Que c’est une belle merde ! Pourquoi ?

– Je sais pas… il y a un truc qui me gêne. Pourquoi un mec que je connais pas s’amuse à m’envoyer des indices mystérieux ? C’est qui ? Un bon samaritain qui se fait trop chier dans la vie ?

– D’abord, qu’est-ce qui te fait dire que c’est un mec ? Ça peut très bien être une nana !

– Arrête ! Tu vois très bien ce …

Un cri épouvantable nous stoppa net. Avec toute cette roche, impossible de localiser d’où ça venait. Et bien sûr, nous n’avions nulle part où nous planquer. Léila me fit signe de la suivre. Je dégainais mon fusil à pompe et sur la pointe des pieds je lui collais au cul, les G.I. Joe juste derrière moi. Avec son ouïe surdéveloppée, elle avait pu repérer l’origine de ce bruit strident. Le hurlement d’une bête horrible qui se tenait sur les hauteurs, à droite de notre position. Cette fois-ci, nous étions foutus !

 

 

Texte de L.S.Martins (20 minutes chrono, sans relecture).
Image par Mark Frost de Pixabay : Masculin Portrait Gens Jeu - Photo gratuite sur Pixabay

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