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Wolf paranoia

Wolf paranoia

Publié le 3 mai 2021 Mis à jour le 3 mai 2021 Culture
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Wolf paranoia

La goûteuse d’Hitler traînait sobrement dans ma PAL* depuis des mois. Il m’arrive souvent d’acheter compulsivement un tas de livres et arrivée chez moi, de les délaisser pour en lire d’autres. En fait, ce livre m’attirait et me rebutait en même temps. Envie de l'acheter, mais pas envie de m’y attaquer. Envie de sujets légers. Bref, je reculais le moment. Et puis il a bien fallu me rendre à l’évidence, ma pal s’est vite amincie alors je m’y suis collée. Et bien, je ne le regrette pas.

* = pile à lire, acronyme découvert sur bookstagram et intégré rapidement à mon vocabulaire par mimétisme béat

De quoi s'agit-il ?

1943. Rosa quitte Berlin sous les bombes pour se réfugier à Gross-Partsch, où vivent ses beaux parents. Son mari, Gregor, ingénieur devenu soldat de la Wehrmacht, est parti sur le front de l’Est repousser le vilain bolchevik, en promettant gentiment de revenir pour Noël. 

Il se trouve que le village en question jouxte la Tanière du Loup, le QG d’Adolf Hitler. Le Führer, claquemuré et obsédé par l’idée qu’on puisse l’empoisonner, fait recruter dix femmes qui lui serviront de goûteuses. Rosa est enrôlée de force. Elle est ramassée par les soldats zélés tous les jours pour aller déguster les plats destinés au chef suprême (qui serait devenu végétarien - apprend-on au détour d’une phrase -  par amour immodéré des bêtes ...).

Nous suivons son quotidien, fait de peur, de résignation et d’instinct de survie, ainsi que l’évolution chaotique de ses relations avec les neuf autres enrôlées.

La capacité d'adaptation est la principale ressource des êtres humains, mais plus je m'adaptais et moins je me sentais humaine.

Ce que j’en pense

Le roman est bien construit, il se déroule avec fluidité. On suit avec intérêt le cheminement confus d’une femme allemande, prise au piège d’un régime autoritaire qu’elle ne soutient pas, mais qu’elle ne combat pas non plus. Une bonne Allemande dévouée par naissance à la cause, et qui va subir les évènements en tentant de trouver un sens à ce qui n’en a pas. Elle avalera les plats, malgré la peur d’en mourir, malgré le dégoût, malgré les nausées. Avec toujours la pensée obsédante que grâce à ce travail, elle a la chance d’avoir le ventre plein alors que tant d’autres n’ont plus rien à manger. La culpabilisation est un puissant levier d’acceptation. Rosa se soumet.

Le roman explore la complexité des réactions d'un individu face à ce qu’il ne maîtrise pas. Par le biais de ce personnage de jeune femme esseulée, l’auteure ausculte les paradoxes de l’être humain et rend compte de son incroyable capacité d’adaptation. Rosa navigue constamment entre la colère, le rejet, le désir d'être aimée, l’acceptation de son sort, la passivité, la culpabilité, l’envie de mourir et la survie. Elle va trouver dans sa relation intime avec un SS une échappatoire à sa condition. Une bulle sensuelle hors du temps pour tromper la mort. Cette relation charnelle, faite d’attraction et de répulsion, est dérangeante et même assez peu crédible. A-t-elle vraiment eu lieu ? Qu’importe, on parvient à admettre facilement la possibilité de cette parenthèse entre deux adultes psychologiquement brisés.

Le roman de Rosella Postorino est inspiré de l'histoire vraie de Margot Wölk. Où commence la réalité ? Où s'arrête la fiction ? J'ai envie de dire que cela ne revêt pas une importance capitale dans l'intérêt du récit. Le livre déroule une petite histoire méconnue dans cette grande Histoire affreuse. On en sort convaincu (si besoin en était !) que la guerre est une saloperie sans nom qui détruit absolument tout sur son passage.

J'ignorais si le reste de l'espèce humaine préférait vivre une vie misérable plutôt que mourir ; s'il préférait vivre dans la privation, la solitude, plutôt que de s'enfoncer dans le lac de Moy, une pierre au cou. S'il considérait que la guerre est un instinct naturel. L'espèce humaine est tarée : il ne faut pas favoriser ses instinct

Photo de couverture ©Christelle Bordet

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Commentaires (4)

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Julien Guyomard il y a 2 ans

C'est particulièrement le contenu plutôt que le rythme des publications. Je sature de la fréquences élevées des contenus publiés aujourd'hui. Idem pour les newsletters quotidiennes, les vidéos de 10 minutes chaque jours etc.

Ce que je trouve dans ce que tu écris, c'est un résumé personnel de l'histoire, les grandes lignes / questions du livre. Tu n'en parles pas de façon impersonnel en te cachant derrière une analyse plus ou moins bancale qui sert souvent plus à faire mousser la personne qui écrit, que de partager l'expérience de lecture.

Un peu comme si le livre était quelque chose qu'on observe à distance, comme si il n'y avait rien en jeu derrière tout ça. J'observe ça aussi dans la musique (je suis surtout musique) et avec les films. Et tu ne tombes pas dans l'amateurisme non plus.


Ton gros point fort, c'est que tu nous permets de vivre une partie de ton expérience de lecture. Et c'est justement ça qui nous donne une idée de ce qu'on pourra découvrir si on lit le livre ou pas.
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Christelle Bordet il y a 2 ans

bah merci, je suis passée du vert au rouge ^_^. Le contenu, c'est effectivement tout ce qui compte dans ce monde ultra connecté où tout va trop vite.
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Julien Guyomard il y a 2 ans

Franchement t'es "fiche de lecture" sont top ! Merci pour la découverte livresque !

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