Page 12 - Paradoxes et les Murs de la Pensée
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Page 12 - Paradoxes et les Murs de la Pensée
Paradoxes de notre Existence
J'ai grandi avec le sentiment de ne pas être fait pour ce monde.
Pendant mes jeunes années, je me suis conformé aux règles établies par ceux qui étaient là avant moi et prétendaient savoir ce que j'ignorais. Les parents, les grands-parents, les professeurs... les adultes en général. Je me suis retrouvé plus d'une fois dans des situations inconfortables et malaisantes, côtoyant des buveurs, des racistes, des machos, des homophobes... certains réunissant même plusieurs de ces traits. J'ai aussi rencontré des personnes bien, selon moi, ouvertes d'esprit et empathiques. J'ai fait le tri dans ce bazar et me suis forgé ma propre personnalité, ma propre vision du monde. Il ne m'a pas fallu longtemps pour comprendre que la femme est l'égale de l'homme et que la couleur de peau ne définit pas une personne. J'ai compris que l'histoire et le vécu de chacun façonnent la personnalité, au même titre que la culture, mais qu'aucune culture n'est supérieure à une autre. J'ai appris que l'amour n'a pas de sexe et que chacun est libre d'aimer sans être jugé. Tout comme chacun est libre de croire, ou de ne pas croire, en telle ou telle divinité, sans que personne n'ait la légitimité de condamner ses croyances. En somme, j'ai compris très jeune que l'homme, la femme, l'Africain, l'Asiatique, l'Européen, l'homosexuel, ou le musulman... avaient tous en commun d'être humains et de partager la même planète. Personne n'est supérieur à un autre, et ce n'est pas parce qu'on sait quelque chose que l'autre ignore qu'on a le droit d'exercer un quelconque pouvoir sur lui.
Malheureusement, tout le monde ne partage pas ce point de vue.
J'ai souvent été confronté à l'intolérance avant de réaliser qu'on ne peut prétendre être ouvert d'esprit si l'on rejette les opinions divergentes. On ne peut pas se dire humaniste tout en souhaitant la disparition de ceux dont les idées nous déplaisent. Alors, avec le temps, j'ai appris à laisser dire et laisser faire, exprimant mon désaccord tout en nuançant mes réactions pour laisser de l'espace à chacun.
Les années ont passé, et je suis devenu père. Aujourd'hui, je fais partie de ceux qui affirment savoir ce que d'autres, mes enfants notamment, ignorent. Logiquement, j'ordonne et ils exécutent. Mais je déteste ce rôle. Je me retrouve dans le genre de situations inconfortables que j'ai toujours cherché à éviter. J'ai donc opté pour une approche différente : la franchise. Admettre que l'on ne sait pas tout et chercher les réponses ensemble. Voir les choses sous un autre angle, inspiré, parfois, par mes enfants. Depuis, je m'efforce de leur donner des clés de compréhension pour affronter ce monde avec un esprit critique et une bonne dose de second degré.
J'ai encore beaucoup à apprendre, d'autant que la société évolue constamment, même si je ne suis pas toujours en accord avec ses directions. J'accepte de ne pas tout comprendre, de ne pas tout savoir. Les frustrations, les incompréhensions, la colère, je les couche sur le papier pour m'en libérer et prendre du recul, évitant ainsi de me laisser ronger par mes aigreurs. Mais je reste un homme. Un homme blanc, hétérosexuel, athée, en bonne santé, approchant la quarantaine et français de naissance, issu d'une longue lignée d'hommes et de femmes tout aussi français. Selon ce que j'entends, lis, et ce qui se dit ici et là, cela fait de moi un privilégié. Je n'ai pas subi le racisme, l'homophobie, la misogynie, ni les violences conjugales... Pour autant, je n'ai pas l'impression d'être à l'abri de la souffrance, du harcèlement ou de la violence. Nous vivons dans une époque binaire, dépourvue d'esprit critique et de second degré, incapable de prendre du recul. Aujourd'hui, tout est noir ou blanc. Le gris n'existe plus. Pourtant, c'est dans le gris que réside la vie quotidienne. Les bonnes personnes peuvent faire du mal, et les mauvaises peuvent accomplir de belles choses. Tous les étrangers ne sont pas dangereux, mais certains violent, volent ou tuent, tout comme certains Français ont aussi du sang sur les mains. Tous les musulmans ne sont pas des terroristes, même si certains commettent des attentats au nom de leur dieu et de leur interprétation de leur religion, tandis que certains prêtres catholiques abusent d'enfants. Tous les hommes ne sont pas violents avec leurs femmes, mais un seul coup porté est déjà un coup de trop. Toutes les femmes ne détestent pas les hommes au nom d'un féminisme exacerbé, et celles qui ne partagent pas ces convictions n'en sont pas moins féministes à leur manière. Il serait peut-être temps d'arrêter de mettre en avant la couleur de peau, le sexe, l'origine, la culture ou la religion d'une personne pour expliquer ses actes. Pour tenter de les légitimer, de les comprendre... Le problème vient simplement de la mentalité humaine et des émotions que nous n'avons pas appris à contrôler. La jalousie, l'envie, la frustration, la colère, l'amour, le dégoût, la tristesse, la joie, l'anxiété, la pudeur, la peur... Tous ces sentiments qui nous animent et nous envahissent. Qu'on nous a demandé de taire, d'oublier, de cacher... parce qu'on ne savait pas quoi en faire, et que les adultes, qui prétendaient tout connaître, ignoraient eux-mêmes comment les gérer.
La société actuelle s'est égarée dans la bien-pensance. Une pensée unique nous est imposée, où toute personne qui n'adhère pas à ce que l'on considère comme le bien est automatiquement perçue comme faisant partie du camp du mal et doit donc être réduite au silence. On prône la tolérance avec intolérance. On aspire à ce que tout le monde soit libre et égal, mais on met sans cesse en avant les différences de chacun. Les caractéristiques ethniques, religieuses, culturelles prennent le dessus sur la seule égalité qui devrait compter : nous sommes tous humains. Toutes et tous, d'où que nous venions.
Et si j'ai grandi avec ce sentiment d'être étranger à ce monde, c'est parce que ce monde a tout fait pour nous individualiser, nous enfermer dans des cases. Et je ne me sens pas à l'aise dans la case qui m'a été imposée. Je suis considéré comme un privilégié, mais j'ai pourtant subi des moqueries sur mon poids, souffert en amour, été déçu par l'amitié, dû me reconstruire après un burn-out, couper les ponts avec un père alcoolique, été agressé à plusieurs reprises. Je n'ai pas toujours fait le bien, je vois mes comptes dans le rouge le 15 de chaque mois, et je m'inquiète constamment pour l'avenir de mes enfants...
Il est inutile de hiérarchiser les souffrances comme il est coutume de le faire ici-bas. Homme, femme, enfant, noir, jaune ou blanc, gay ou hétéro, religieux ou non-croyant, nous naissons et mourons de la même façon. Nos larmes coulent, nos plaies saignent, et nous foulons la même Terre. Et du point de vue de l'univers, nous ne sommes que poussière. Alors redescendons un peu, calmons le jeu, retrouvons un peu de second degré, d'esprit critique, prenons du recul sur les choses et apprenons à nos enfants et à nous-mêmes à mieux gérer nos émotions. Puisque, quoi qu'on en dise, on ne sait pas, on ne sait jamais.
La vie, l'amour, l'argent, les amis et les roses. On ne sait jamais le bruit ni la couleur des choses. (J.Gabin)
Face aux Murs de la Pensée : La Poésie comme Rébellion
Dans ce monde où tout est noir ou blanc, où le bien et le mal dansent en une valse sans fin, ceux qui se disent les gardiens de la liberté sont souvent ceux qui l’étranglent. Ils imposent leur vérité comme une loi, écrasant sous leur poids les autres voix, comme si chaque pensée différente était une trahison. Ils nous chantent des hymnes à la justice, mais leurs paroles, telles des chaînes invisibles, étouffent la liberté de penser. Leurs murs, discrets mais solides, excluent ceux qui osent regarder au-delà du cadre, forcés de plier sous la domination d'une seule vision du monde. Et dans ce tourbillon de certitudes, la liberté d'expression, jadis belle et fière, devient une fleur rare, réservée à ceux qui se conforment à l'unique vérité qu'on leur impose. La rébellion, dans ce jardin clos, n'est plus qu'un souffle qui tente de briser le silence.
Mais dans l’ombre de cette tyrannie du conformisme, une lueur persiste. Il suffit parfois d’un mot, d’un geste, d’une pensée pour faire trembler les murs de l’intolérance. La liberté, bien que cachée, n’est jamais vraiment éteinte. Elle sommeille, prête à renaître au cœur de ceux qui refusent de la fermer.
Et dans un monde qui cherche à nous faire taire, la poésie est l'arme secrète de ceux qui osent encore penser librement.
Tant que la poésie existera, la liberté ne pourra jamais être totalement asphyxiée. Dans chaque vers, dans chaque mot qui se faufile hors des chaînes, elle renaît, inflexible et indomptable, prête à rappeler au monde que la pensée est un terrain de lutte où les voix libres ne se laisseront jamais réduire au silence.
Oren⚓