Alors, ce vendredi soir, Elle se pelotonne devant la télé et regarde sans voir sa série préférée sur Netflix, la tête désespérément tournée vers Paris, aux prises avec des sentiments totalement contradictoires ; oscillant entre soulagement, culpabilité, colère contre Elle-même d’avoir manqué de courage et tous un tas de questions sur ce qui aurait pu être, si elle n’était pas Elle.

Cette nuit-là, Elle s’endort devant son petit écran, épuisée par cette guerre intérieure.

Le samedi matin, Elle essaie de meubler ses minutes de musique et de bruit, une fois n’est pas coutume, pour tenter de dissiper le vide que son absence laisse dans son quotidien. Les minutes sont laborieuses, Elle déteste déjà ce week-end qui commence à peine, ne pense qu’à Lui.
« Comment va-t-il ? Est-ce qu’il est vraiment fâché ? »
« Mais non, crétine, mon billet qu’il était avec Barbie hier ! »

En début d’après-midi, à l’heure où Il quitte l’agence, n’y tenant plus, Elle se décide à Lui passer un coup de fil. 

Lui décroche, visiblement contrarié, répondant brièvement au monologue d’Elle qui s’efforce de se montrer joviale pour désamorcer le malaise, la coupe et glisse :
– Alors, elle est là ta copine ?
– Euh, non, elle a eu un contretemps…
– Dommage dis-donc, bon, faut que je te laisse, on se rappelle ?
– Non mais attends ! Tu fais la tête c’est ça ? 
T’es vraiment bizarre aujourd’hui ! Tu es en colère ?
– Non, c’est pas ça….

Soudain, une voix métallique éclate dans l’appareil :

Le TGV à destination de Rennes va partir, prenez garde à la fermeture automatique des portes ! Attention au départ.

– Quoi ? T’es dans le train pour venir ici ?
– Merde, t’es chiante ! Oui je suis dans le train… Je sais quand tu mens, depuis le temps, tu sais !? J’ai BESOIN de te voir…

La suite ?

Elle commence sur un quai de gare et fait mentir les petites voix intérieures.
Tout arrive, même à Elle !