la nuit n'est pas tombée
elle s'est installée
comme une vieille parenthèse
que personne n'oserait déranger
ton sommeil est un lac si profond
qu'il a avalé le moindre de tes doutes
dix-sept fois cent soixante-douze
le compte s'est écrasé
je compte les minutes
qui refusent d'être des moutons
mon regard est lourd, tu es légère
dans ce théâtre sans bruit
mon esprit déraille en rêveries élémentaires
si j'étais la lumière
je ne serais pas le projecteur brutal d'un lundi matin, non
je caresserais le creux de ton cou
pour te délivrer, doucement
de la tyrannie du troisième rappel d'alarme
une caresse, pas un ordre de se lever
si j'étais le son
je serais la contre-mélodie précise
échangeant mes plus lourds mots de vérité
contre les miettes d'incertitude
que tu ramasses devant ce miroir
un murmure :
tu es. tu suffis.
si j'étais la gravitation
je t'ancrerais moins au plancher
qu'à l'instant même
pour que jamais tu ne puisses t'échapper
de ta propre présence
tu es le centre calme de ta propre galaxie
si j'étais l'électricité
je serais la charge lente
le potentiel pur, silencieux
celui qui court-circuite le « non »
et active ton « oui » intérieur
sans fusible
une force tranquille
si j'étais l'eau de ta douche
j'emporterais la fine poussière
des petites trahisons du jour
laissant ta peau simple
réinventée, vierge de l'hier
si j'étais le dieu des rêves
j'écrirais le scénario où ton moi le plus actualisé
est déjà là, sans condition
un espace vide où tu peux respirer ta propre grandeur
si j'étais les antalgiques
je ferais sauter le câble électrique, pour toujours
adieu ces migraines inutiles
qui te rappellent que tu as trop donné
si j'étais un poète
je construirais une langue nouvelle
où le mot « peur » n'a plus de sens
tes faiblesses deviendraient des strophes sacrées
des atlas de vérité
si j'étais silence – un vrai, un complet –
je serais le vide riche
l'espace exact où ta propre voix
celle qui sait tout, pourrait enfin se glisser
une écoute totale
si j'étais karma
je serais le retour immédiat et brutal
de la beauté que tu donnes sans compter
un déluge de gratitude sur ton seuil
aurais-je le courage de dire tout ça
en te regardant dans les yeux
le matin, avec l'odeur du café et la vérité nue ?
évidemment non
j'ai choisi l'adresse directe à l'inconscient
au grand gardien de ton temple
pour qu'il sache, au moins
dans le lieu où les règles n'existent plus
qu'il y a là, penché
un homme qui voudrait être toutes ces forces élémentaires
pour toi
mais il n'est qu'un homme
lourd d'un sommeil non trouvé
un simple point sur ta ligne d'horizon
un organisme fait de chair et d'intentions qui trébuchent
incapable d'être
la lumière sans interrupteur
le son sans fausse note
la force sans l'ombre
un homme qui compte mal.
— dato
Angie Rodride il y a 2 heures
Très original, j’aime bien ! Merci, pour ce partage.
Dato il y a 1 heure
Merci à vous !