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Chapitre 12

Chapitre 12

Publié le 28 sept. 2024 Mis à jour le 28 sept. 2024 Romance chick-lit
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Chapitre 12

J’ai travaillé toute la journée. C’est bientôt l’heure de retrouver mes petits. Et le voisinage.

Les jours d’avant aujourd’hui, comme hier ou avant-hier ou même les semaines et les mois qui poussent avant les jours d’avant, Ogron s’installe un laboratoire culinaire. Il veut tester un nouveau régime alimentaire à l’anti-base de Ducon. Son balcon est une cuisine extérieure. Tous les jours après avoir récupéré ses enfants à la fin de l’école, il sonne chez moi pour me demander un bout de graine de moutarde, un zeste de citron pétrifié, un centimètre d’huile de raisin, une capsule de lait de brebis rance. Puis il revient quelques heures après, le scalp en pétard et la barbe parsemée de rebuts nutritifs. Le sourire édenté d’Ogron vaut alors toutes les émeraudes des rivières célestes. Il m’offre tous les soirs un extrait de ses expériences. J’ai pour mission de goûter et de donner mon avis. Souvent l’expression de mon faciès suffit à comprendre la situation. Parfois je m’embourbe dans des explications pleines de douceur. Ou bien je n’arrive pas à me contrôler et j’expectore la mixture de préférence dans la poubelle si j’y parviens à temps, sinon sur la porte de l’ascenseur du palier. Invariablement Ogron me salue en courbant son corps de géant. Il me remercie de ma sincérité. Il est simplement heureux de concocter des petits plats hallucinants. Je suis son fusible avant qu’il ne présente ses plats du dîner à sa femme et à ses enfants. Ogron se transforme en bon cuisinier. Ses préparations sont parfois agréables au palais. Selon la durée de ses expérimentations gustatives, Ogron passe un certain temps chez moi. Il m’avoue préparer une surprise pour sa femme. Laquelle ? Ogron reste mystérieux. Une parenthèse dans le tumulte quotidien.

Ainsi, en  cette fin de journée, chacun des coups de raclette d’Ogron, dessine dans les larges gouttes d’eau encanaillées de produits pour laver les vitres, des détails incroyables de sa personnalité. Je suis là, plantée au milieu de mon salon, à divaguer dans une immobilité insolite tandis qu’Ogron racle les fenêtres et que nos bambins construisent dans le salon une immense ville en kaplas peuplée de playmobils et d’animaux sauvages d’une autre époque. Dinosaures et micro-hommes cohabitent en toute fluidité. Sans question. C’est ainsi. La paix.

Entre deux minuscules secondes sans bruit, j’entends un hurlement percer les murs.

Je regarde Ogron. Je me tourne vers les enfants en posant mon index sur mes lèvres. Chut. J’écoute à nouveau. Le hurlement n’en finit pas. Il ne s’éteint que pour reprendre de plus belle. Glaçant. Je suis remplie d’effroi à l’idée qu’un meurtre vient peut-être de se produire. Je me rends compte alors que le hurlement qui emplit tout le jardin provient des fenêtres ouvertes de Dune à l’étage du dessous.

 Nous sonnons sans sommation chez Dune, les petits ne peuvent s’empêcher de hurler aussi :

– Ouvre, ouvre vite ! crient-ils, submergés par la terreur.

Ogron tambourine sans discontinuer à la porte jusqu’à ce que Dune nous ouvre en pleurs. Des sillons rougeâtres marbrent la peau de son visage zébrée par ses ongles.

– C’est horrible, abominable, ma pauvre chérie. Comment va-t-elle survivre dans cette jungle ! se lamente Dune comme une bête blessée. Elle a sûrement déjà la rage !

- De quoi parles-tu ? à la fois heureuse de la voir entière, et impatiente de comprendre la raison de son hurlement inhumain.

– Ana, tu as lu son dernier mail ? Non ? Venez voir… nous presse-t-elle vers son ordinateur ouvert. J’aurais préféré qu’elle m’appelle. Ça fait dix fois que je le relis.

Effectivement, le facteur électronique a posté un nouveau mail d’Ana en cours de journée. Une fois que je suis embarquée sur le paquebot de mon travail, je n’ouvre plus mes mails de la journée. Je lis aussi  les messages d’Ana à mes enfants, qu’ils adorent comme une grande soeur. Un jour ils iront certainement en Inde à la recherche de leurs origines ancestrales, c’est ce que je me dis sans leur en parler explicitement.

Coucou Caméliope,

Comment vous allez tous à Capcity-le-Soubresaut ? Ici, on a la pêche et on continue de découvrir le pays. J’essaie de capter comment s’organise la vie quotidienne ici, pas facile.

Il s’est passé un truc horrible cette nuit. On se demandait d’où venait un bruit étrange depuis quelques jours. J’ai enfin compris quand j’ai senti les griffes d’un rat se balader sur mon bras pendant que je dormais ! J’ai eu le réflexe de balancer mon bras violemment. Ce matin, on a retrouvé le rat éclaté contre le mur. On s’est rendu compte qu’il  y avait carrément un couple de rats qui s’était reproduit sur l’étagère devant la porte, pas loin de là où on stockait la poubelle le soir.

En fait, on héberge une famille de rats ! Sympa non ? Je pense qu’on va descendre maintenant les poubelles trois fois par jours et qu’on va traquer ces sales bêtes pendant quelques jours encore à coups de tapettes. Maman doit hurler en me lisant ! Pas vrai, Caméliope ?

Ça reste quand même une broutille, faut relativiser.

Dire qu’il va falloir que j’enlève les rats attrapés et déchirés par la tapette, y aura peut-être des morceaux qui vont rester dessus !

C’est rien maman, t’inquiètes! Avec Brianne, on est super douées pour leur faire la fête.

Du coup, j’essaie de comprendre comment sont traités les déchets. Au début, on dirait que c’est le foutoir mais en fait c’est organisé. Les rues indiennes sont propres ou immondes, je n’ai pas encore compris pourquoi. L’intérieur des maisons est super propre. Tous les matins, on entend les femmes jeter des seaux d’eau entiers pour nettoyer les sols. Je change beaucoup d’avis depuis que je suis ici. Je me plante souvent dans mes interprétations.

Bisous

Ana

Ana avait bien anticipé la réaction de sa mère. Elle cherche aussi à la déstabiliser en se moquant légèrement de ses phobies.

– Je ne mettrai jamais les pieds dans cet horrible pays, on n’aurait jamais ces histoires de rats chez nous !

 Dune tremble encore.

– T’inquiète, je suis là ! On se détend et gare à la vermine, nous crie Ogron.

– Pfft, quelle mauviette, un rat c’est qu’un animal !

Ma voisine fusille du regard la déclaration de Peter.

– Ouais, t’es une peureuse Dune. Franchement, t’as la honte, c’est toi la mère, et c’est toi qu’a peur ! En plus, tu nous as dérangés !

Première cerise sur le gâteau avec la dernière réplique de Tolstoi, un des petits frères jumeaux de Peter.

– Venez Tolstoï et Peter, on va rajouter des rats dans notre ville !

Deuxième cerise sur le gâteau avec cette fois-ci Sacha, le frère jumeau de Tolstoï.

– Dehors, les morpions, dehors ! hurle de plus belle Dune au bord de l’hystérie.

– On y va les enfants, dans le calme et sans un mot, dis-je à mes enfants en les poussant vivement vers la porte.

Je comprendrai par la suite l’importance des rats dans l’engouement d’Ana pour le traitement indien des déchets.

 

 

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