

Va-t-en-guerre
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Va-t-en-guerre
La guerre était fixée.
Prévue, établie.
Marquée au feutre sur le calendrier gris,
Une croix rouge, un jour emprisonné.
Il n’y avait pas vraiment de causes précises.
Nous ne savions pas contre qui.
Mais il fallait écourter nos rancunes, armer le bout de nos canines, aiguiser nos ongles et endurcir nos vieux poumons.
Cela nous le savions et c’était convenu. Il en serait ainsi.
La guerre était fixée.
Les mercenaires aux bras puissants, à l’ombre des palisses
Aiguisaient de longues sarisses, le regard lent.
Ils n’avaient peur aucune des passants.
Pelles en mains, les fossoyeurs se tenaient prêts à en découdre avec d’inertes ennemies.
Les hôpitaux étaient propres, et les draps blancs et repassés.
Il y avait largement de quoi recoudre nos corps nus.
Les choéphores échauffaient déjà leur voix d’ivoire.
Les prêtres blonds administraient de jolis sacrements.
Les amoureux se mariaient prestement pour faire l'amour et puis tuer.
L’excitation buvait son comble au mois de juin, les bières étaient foison.
L’équipage avait prévu deux ou trois capitales de repli.
Les trains de fer étaient déjà fleuris.
La guerre était fixée.
Même l’armistice était déjà connu de tous.
La paix elle-même était prévue.
On savait qu’elle arriverait au bout du fil.
Mais il était prévu de saigner, avant. De saigner longtemps.
Il fallait purger cette lassitude. Se défaire de l’indolence.
Il fallait une ordalie, quelque grand feu d’artifice et de sang
Quelque canon pour jeter l’orgueil comme un bouquet de flammes.
La guerre était donc prévue, épinglée.
Là, sur le calendrier, la guerre était déjà fixée.
Il n’y avait pas de cause précise, mais comme tout était déjà prêt...
Il ne manquait plus que le carnage.

