

Chapitre 39 : Amour et Célébration (Fin : partie 3)
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Chapitre 39 : Amour et Célébration (Fin : partie 3)
La nuit fut longue, calme et pleine de promesses.
Chacun attendait impatiemment la fête, et les préparatifs étaient presque terminés.
Incapable de s’endormir, Blake regardait le visage de Poema, l’air perdu dans ses pensées.
- Poema ? Tu dors ? chuchota le prince d’une voix inquiète.
- Non, pas encore… Quelque chose te tracasse ?
- Non, enfin si…
- Tu peux tout me dire, tu sais ? lui dit-elle en souriant, prenant la main de son bien-aimé afin de la poser sur sa propre joue.
- J'ai juste... peur que demain, je n'arrive pas à rassurer mon peuple... Tout s'est passé si vite que je crains encore la réaction des habitants de notre royaume, d'autant plus que les sirènes seront aussi présentes... Je me rends bien compte de mon importance en tant que chef dans cette situation, et mon frère ainsi que Morgan doivent ressentir les mêmes peurs que moi. Sauf s'ils sont plus occupés par leurs retrouvailles que par ce qui se passera durant cette première célébration... Et c'est normal, car ils ne devront des explications au peuple que lors de leur propre fête qui suivra la nôtre : j'ai l'impression d'être le premier à passer durant un examen, eux n'auront qu'à suivre mon exemple, tandis que moi... Tu me comprends ?
- Oui. C’est toujours difficile la première fois, mais si ça peut te rassurer, vu la réaction des habitants terrestres à ton retour, alors même que tu avais abandonné ton royaume, je ne pense pas que tu doives te faire du souci. Et puis, je serai là, alors les sirènes seront forcément de ton avis vu que nous sommes fiancés. Quand un souverain est juste et bon envers son peuple, ça se sent. Voilà pourquoi tout le monde t’aime, y compris moi. Maintenant, dors, tu dois être en forme pour demain.
- Tu as raison… Encore merci, Poema. Sans toi, je ne suis rien. Tu sais toujours trouver les bons mots pour me rassurer, tu es née pour être reine.
La sirène lui sourit à nouveau et l’enlaça avant de s’endormir contre lui, heureuse de voir que son fiancé semblait s’être calmé.
Le soir venu, après avoir consacré toute la journées à préparer la fête, vint l'heure de celle-ci. Grâce à l'aide des mages, un courant d'eau brillant d'or fut créé vers la surface depuis le château des mers, servant d'ascenseur aux habitants de la partie aquatique du royaume.
De nombreuses lumières brillaient au palais terrestre, rendu encore plus beau par le coucher de soleil et les nombreuses décorations florales qui l’ornaient. Un orchestre jouait une musique douce et sereine à l’intérieur, invitant les gens à entrer.
L’après-midi précédent cette belle soirée, Aaron et son frère s’étaient retrouvés pour parler de leur discours respectif : ils avaient conclu qu’il valait mieux ne pas faire leurs discours la même journée, et laisser le prince des mers parler lors de la seconde fête.
Lohan et Aliénor faisaient partie des premiers arrivés au palais terrestre, vêtus d’une tenue encore plus belle que lors de leur précédente entrée, impressionnant les quelques invités venus en avance.
La jeune fille portait une robe vert-émeraude, parsemée de fleurs d’un rose plutôt pâle, tandis que son amant portait une tenue de la même couleur, ornée de nombreux motifs dorés ainsi que des pantalons blancs. Ils avaient tous les deux les cheveux tressés, pleins de fleurs et de poussière magique, ainsi que des gants blancs élégants et des boucles d’oreille dorées où pendaient des émeraudes. On aurait dit les souverains d’une forêt enchantée, le roi des elfes et la reine des fées. Avec eux était venu le clan des mages, dont les membres étaient moins nombreux que ceux des deux parties du royaume.
Après eux arrivèrent les pirates, dont Jack et Coralia, suivis de Moonlight et Serenn qui se tenaient par la main en souriant. Serenn avait fini par mettre une robe noire, encouragé par son bien-aimé, ainsi que des talons hauts (Coralia lui avait appris à marcher avec juste avant la fête, et le garçon avait très vite appris comment faire, surprenant la jeune fille - c'était d'autant plus étonnant lorsque l'on savait que lors de sa vie antérieure, il n'y était jamais parvenu).
Enfin, aux côtés de nombreuses créatures marines entrèrent Aaron et Morgan, ce qui suscita l'étonnement de la plupart des invités, frappés par la ressemblance du prince terrestre et de cet inconnu (le peuple marin avait eu la même réaction précédemment). Les seules différences entre eux étaient qu'Aaron avait les cheveux plus longs, était plus grand et semblait légèrement plus âgé et musclé que son jumeau. Étant enfermé depuis des années, il avait eu largement assez de temps pour s'entraîner et devenir plus fort. C'était à cause de l'ennui qu'il ressentait, mais aussi grâce à l'espoir qui l'animait de sortir un jour de cette prison, jusqu'à ce qu'il cesse d'y croire. C'est revoir Morgan qui lui avait redonné vie, et ça, jamais il ne l'oublierait.
Pour la fête, Morgan s’était laissé coiffer et habiller par son prince. Il n’était pas habitué à se faire beau, et ne participait jamais aux fêtes d’habitude, trop occupé à haïr celui qu’il pensait être son ami d’enfance. Maintenant qu’il avait enfin retrouvé son véritable amour, il avait envie de changer, envie d’essayer de nouvelles choses et passer plus de temps avec Aaron. Gêné par son bras manquant et par le fait qu’il devait se retransformer en humain pour participer à la fête, il avait laissé l’amour d’Aaron le rassurer, lui qui l’aimait sous toute forme. Il n’avait plus honte de ne plus avoir de bras, de ne plus être un triton : son prince l’observait avec les mêmes yeux remplis de désir que d’habitude, de façon pas du tout discrète et montrant à tous les invités que Morgan lui appartenait.
Comment arrêter de le regarder ? Morgan était si beau dans sa chemise blanche mi-ouverte, maintenue par un corset qui mettait en avant sa taille fine, avec ses pantalons noirs simples mais serrés... Ses cheveux sombres grisâtres luisaient d'argent sous les lumières de la salle, ses yeux d'un bleu plus glacé que la banquise scintillaient de curiosité, et sa peau, qui semblait avoir la couleur de la lune et qui était parsemée de grains de beautés, rougissait de plaisir de se trouver là avec Aaron, l'un près de l'autre. Le prince trouvait cela très séduisant de pouvoir distinguer si clairement les rougissements de son amant qui avait la peau si pâle. D'autres pouvaient trouver cela repoussant car il semblait presque mort à cause de sa pâleur, mais Aaron s'en moquait. Bien au contraire, il aimait à quel point le triton était différent de lui. Il bronzait très vite au soleil contrairement à Morgan, seulement, après avoir passé des années en prison, il n'avait pas encore repris toutes ses couleurs (d'où sa ressemblance encore plus flagrante avec son frère, qui avait habituellement la peau plus claire que lui).
Aaron s'était raclé la gorge, se reprenant de justesse. Il avait failli l'embrasser devant tout le monde tant Morgan lui faisait envie. Il n'arrivait pas à sortir de sa tête le dos nu de son amant, qu'il avait pourtant vu de nombreuses fois, et aurait voulu arracher sa chemise et tirer sur les fils de son corset, rien que pour revoir les grains de beauté qui y étaient marqués. Il voulait graver chaque emplacement dans son esprit.
"Morgan voulait tellement participer à cette fête, et moi... Je ne pense qu'à le refaire avec lui, je suis pathétique... Je devrais renverser un sceau d'eau froide sur ma tête, mais même avec ça, je pense que ça ne suffira pas... Je devrais l'aider à se sentir en confiance devant tous ces gens au lieu de l'observer comme un fou..." avait-il pensé, se sentant coupable.
Mais il ne put se concentrer davantage sur cela, trop occupé à fixer son amant.
On disait dans les légendes que les grains de beauté étaient les marques d'amour qu'on aurait reçues dans sa vie antérieure, mais comme Morgan était seul lors de celle-ci, pourquoi en avait-il tant ? Peut-être s'agissait-il des marques d'amour laissées dans l'au-delà lorsque leurs deux âmes ne formaient qu'une avant d'être séparées à cause d'une erreur de l'univers ? Ou étaient-elles apparues après qu'il lui avait fait l'amour dans leur prison, où il faisait trop sombre pour y voir clair ? Peu importait la cause : ça le rendait jaloux dans tous les cas car il ne savait pas d'où venaient ces marques, et aurait voulu les voir apparaître lorsqu'il l'embrassait pour être totalement sûr d'en être l'auteur.
Incapable de ne plus y penser, Aaron finit par craquer et se rapprocha de Morgan afin de glisser sensuellement son bras autour de sa taille, le faisant trembler. Ah, ce corset… Il avait le sentiment que le nœud de celui-ci le narguait : il devait être si simple à défaire !
- Qu’est-ce que…
- Pardonne-moi, je ne peux plus me retenir… J’ai besoin d’au moins te sentir contre moi, je peux ?
Morgan rougit aux mots d’Aaron et acquiesça en silence.
- Merci… Allons saluer mon frère.
Et il entraîna le triton avec lui, sans arrêter de caresser gentiment la taille de Morgan tout en le serrant de plus en plus fort, oubliant complètement ce qu'il voulait dire à son frère.
Un peu plus tard, une fois tout le monde arrivé, Blake inspira un bon coup, et réclama l’attention de la salle. Son discours pouvait enfin commencer.
- Bonsoir, chers amis. Je suis très heureux de vous accueillir ici ce soir après les évènements mouvementés que nous avons vécu tous ensemble. Premièrement, je voudrais m'excuser d'avoir quitté le royaume sans prévenir, vous laissant seuls ici durant cette période si compliquée. J'ai conscience que c'est un luxe pour un prince de se permettre de choisir sa vie privée plutôt que le bien du royaume, mais cette fuite m'a permis de trouver une solution afin de sauver mon peuple. Je comprends que je suis encore trop jeune pour devenir le dirigeant officiel de ce royaume, et je possède bien des défauts, mais je peux vous promettre une chose : jamais je ne vous ferai de mal, car je ne souhaite que votre bonheur. J'ai toujours fui mes responsabilités, mais quand j'ai vu que la guerre se préparait à détruire le royaume que j'aimais tant et où j'ai grandi, j'ai tout de suite fait tout mon possible pour éviter la catastrophe et vous sauver des mains de cet enfer. Je comprendrais si vous ne souhaitez pas que je devienne officiellement prince, car je suis vous déjà éternellement reconnaissant de m'accepter parmi vous à nouveau.
Il n'eut pas besoin de continuer : le peuple était presque entièrement d'accord pour le nommer prince, si bien qu'il n'y eu même pas besoin de faire des élections. Cette fête devait être celle de son couronnement, et elle le serait. Mais à sa grande surprise, quelqu'un proposa de le nommer directement roi, et c'est ce qui fut décidé ! Même si Blake voulait d'abord devenir meilleur pour remplir ce rôle, il n'avait pas à s'en faire : la plupart des gens n'attendait que ça, et il était parfaitement digne d'être leur roi.
- Enfin, j'aimerais me présenter à nouveau devant vous, car je me suis fait appeler pendant des années par le prénom de mon frère, Aaron.
Il eut des murmures surpris dans la salle, et malgré le fait que tout se passait très bien, Blake ne put s’empêcher de paniquer face à l’idée de révéler sa véritable identité. Mais lorsqu’il posa ses yeux sur Poema, tous ses doutes s’évaporèrent comme neige au soleil.
- Moi-même je ne le savais pas il y a encore quelques temps, mais je ne suis pas Aaron, et je ne l'ai jamais été. Les habitants du royaume terrestre se rappellent peut-être qu'Aaron avait une sœur, qui a disparu du jour au lendemain il y a une décennie environ ? Eh bien cette sœur, la princesse Perla, c'est moi. Il y a eu une erreur : c'est mon frère Aaron qui a disparu ce jour-là, et c'est moi qui suis resté, prenant sa place grâce à la magie. Je n'ai pas menti : je pensais être Aaron de tout mon cœur, trompé par la magie, mais je n'étais en réalité que sa sœur, incapable de régner à cause de son genre. Mais là n'est pas le problème, si je le voulais, je serais devenu votre princesse en changeant cette règle idiote, seulement...
Il s’arrêta un instant avant de continuer :
- J'ai toujours su que j'étais un homme. Mon frère vient d'être nommé dirigeant de la partie aquatique du royaume en compagnie du frère caché de la princesse des mers, ma chère Poema. Alors si vous voulez bien m'accepter malgré mon passé, je vous en serais très reconnaissant. Mon frère a pris la décision de veiller sur la mer, et ne souhaite pas régner sur ces terres. Son avis, le mien mais aussi celui du peuple aquatique coïncident, nous n'attendons donc plus que votre accord.
- Mais Votre Altesse, quel est votre nom, si vous n’êtes pas Sa Majesté Aaron ? Votre ancien prénom ne vous convient sûrement pas, n’est-ce pas ? s’exclama quelqu’un dans l’assemblée.
- Je m’appelle Blake.
Avant que quelqu'un ne puisse protester, Aaron s'avança, et se plaça aux côtés de son frère.
- Bonsoir à tous, je suis Aaron. Je sais que c'est dur à accepter, mais un bon roi doit être jugé sur sa capacité à régner et non pas sur son passé. Je suis désolé d'avoir moi aussi délaissé ce royaume, mais j'y fus contraint à cause du roi triton. Si cela peut influencer votre avis, sachez que mon frère a toujours été plus motivé que moi à régner. Certes il n'aimait pas être enfermé au palais, mais depuis son enfance, il voulait devenir prince à ma place. Je pense que le destin à bien fait les choses, et a fait en sorte qu'il puisse régner malgré tout, m'écartant du trône. Celui qui aidait son peuple depuis ces dernières années, c'est lui, pas moi. Il ferait un excellent roi, tout comme il a été un prince presque parfait. S'il est parti, c'est uniquement à cause du rejet de sa bien-aimée, qu'il n'a pu laisser partir seule. Durant sa fuite, il a veillé à ses devoirs royaux, choisissant de vous protéger malgré la situation. Oui, il a des défauts, mais qui ici peut affirmer n'en avoir aucun ? Tout est arrivé grâce à un coup du destin, n'est-ce pas un signe ? Je suis pour le nommer roi, qu'en pensez-vous ?
Après quelques minutes de silence, la majorité des invités fut d'accord sur un point : Blake avait été un prince plus que bon pour son royaume. Malgré les protestations de certains, nombreux étaient ceux qui partageaient le même avis : il serait bête de ne pas le laisser continuer son règne simplement pour son passé, d'autant plus que le véritable héritier du royaume, Aaron, le voulait comme roi lui aussi.
- Tu vois, Blake ? Je crois que la grande majorité du peuple terrestre est d'accord avec moi. C'est ton peuple et il le restera, lui sourit Aaron.
Blake dut retenir ses larmes pour ne pas pleurer de bonheur devant tout le monde : il était si heureux d'avoir un frère aussi génial que le sien !
Après cela, il expliqua en détails ce qu’avait fait la prophétie, s’assurant que tous et toutes avaient bel et bien retrouvé la mémoire et avaient compris ce qu’il s’était passé il y a quelques années et lors de sa fuite, expliquant la situation actuelle du royaume. Il parla de l’alliance avec le clan des mages, ainsi que de l’union entre les deux parties du royaume, mentionnant son frère et Morgan. Il parla enfin des pirates, mettant la lumière sur tout ce qu’ils avaient fait pour le peuple dans l’ombre, sans jamais être récompensés, craints à cause de leur position entre terre et mer. Il rétablit la vérité sur eux, promettant de leur offrir un meilleur statut et plus de pouvoir au sein du royaume.
Ensuite, il rassura chacun du mieux qu'il le put, promettant d'être là pour son royaume, et s'assurant que personne ne soit mis à l'écart. Même si tout n'était pas parfait, il trouverait une solution grâce aux nombreux amis qu'il s'était fait durant son voyage, et surtout grâce à Poema. Lui qui aidait tout le monde, il lui fallait aussi une personne pour veiller sur lui lorsqu'il se sentait dépassé par les évènements, et elle seule y parvenait.
Et comme elle allait enfin devenir la reine officielle du royaume à ses côtés, ils pourraient se répartir équitablement les tâches royales et veiller ensemble sur ces terres. Poema ne méritait pas de n'être là que pour lui donner des conseils, ou pour servir de décoration : elle était née pour régner !
Si chacun acceptait Aaron, c'est parce qu'ils savaient qu'il était le seul à pouvoir leur offrir cette paix dont ils rêvaient tous, sans aucune guerre, et lui seul avait trouvé tant d'alliés durant son voyage, unissant tout le monde. Un peu à la manière des mages et des sirènes, il avait changé d'apparence, quel mal y avait-il à cela ?
Les gens aux palais avaient été odieux envers la femme qu'il avait choisie, et pourtant, il était revenu pour les aider et était parvenu à terminer le conflit en soudant les deux peuples, ainsi que le cercle des mages : c'est ce qu'il fallait retenir.
- Merci de m’avoir écouté. Je ne pouvais pas rêver d’un meilleur royaume que celui-ci.
Quelques minutes plus tard, les membres du conseil du royaume entrèrent, portant la couronne du précédent roi sur un coussin pourpre. La cérémonie fut courte mais pleine de sens, et la couronne, une fois posée sur la tête de Blake, lui allait à ravir. Personne ne pouvait nier le fait qu'il était bel et bien le fils de son père.
Lohan s'avança alors, se rappelant de l'ancien roi :
- Petit à petit, vous allez vous souvenir de l'histoire de ces terres, mais comme cela risque de prendre du temps, j'aimerais ajouter quelque chose. Blake vous a déjà expliqué en grande partie ce qu'il s'est passé, et vous commencez à retrouver la mémoire, mais j'ai des informations qui vous sont sûrement encore inconnues. Après la séparation des royaumes, le chef du clan de la lune devint le premier roi terrestre : il s'agissait du père de Blake et Aaron. On pensait qu'il venait d'une lignée de rois, mais en réalité, il était devenu dirigeant seul, utilisant sa force et son intelligence sans aide extérieure. Tout comme lui, ses deux fils ont hérité du courage et des capacités de meneur qu'ont pratiquement tous les membres de leur famille. Enfant, je l'ai vu diriger ce clan, dont faisaient partie les sirènes avec le plus fort lien terrestre. Étant l'une des causes de la séparation des royaumes, je souhaite prendre mes responsabilités en vous venant en aide et en répondant à toutes vos questions. Vous savez déjà que tous les habitants du royaume terrestre faisaient partie du clan de la lune. Cela explique pourquoi votre roi était le dirigeant de ce clan. Si Blake n'en a pas parlé lors de son discours, c'est parce que lui-même n'était pas au courant pour son père.
Intrigués, nombreux furent ceux qui posèrent des questions au mage, les deux fils du précédent roi en firent de même, heureux d'en savoir plus sur leurs parents, morts dans leur jeunesse.
Après cela, Blake demanda le silence aux invités.
- J’ai une dernière annonce à vous faire, si vous voulez bien m’écouter. Poema, peux-tu me rejoindre sur l’estrade ?
La sirène rougit mais acquiesça, et s’avança vers son prince, maintenant devenu roi.
Quand elle le vit s’agenouiller devant elle, une petite boite dans les mains, elle ne put s’empêcher de pleurer, émue. Elle savait ce qu’il allait lui demander, et elle n’attendait que ça depuis leurs fiançailles.
Il ouvrit la boite et en sortit une bague magnifique en or blanc, ornée d’un diamant taillé en forme de cœur.
- Poema. Dame de mon cœur, princesse des sirènes, j'aimerais passer toute ma vie à tes côtés. Je suis enfin roi, et je ne peux pas repousser cela un instant de plus. Tout le monde ici présent te voit déjà comme une reine, j'en suis sûr. Alors afin de sceller l'alliance entre les deux parties de ce grand royaume, et surtout pour sceller notre amour... Veux-tu m'épouser ?
- Oui... J’accepte avec plaisir, Blake ! s'écria-t-elle en se jetant à son cou, manquant de peu de le renverser.
Ils se mirent à rire enlacés sous les exclamations de joie des invités, les félicitant pour leur mariage prochain. Blake la fit tourner dans les airs, puis la déposa au sol afin de glisser la bague sur son doigt.
- C’est toi qui l’as faite, j’en suis sûre, sourit la sirène, les larmes aux yeux.
- Oui, c’est moi. J’aimerais d’ailleurs l’annoncer à vous tous également : je suis roi, mais j’ai moi aussi des passions, et j’aimerais ouvrir une bijouterie au village pour y vendre mes créations, mais aussi celles d’autres artisans, si vous êtes d’accord…
- Je trouve que c’est une très belle idée, Votre Majesté, répondit l’un des gardes.
- Merci. Membres du conseil, apportez la couronne de ma défunte mère. Avant notre mariage, j'aimerais nommer Poema reine aujourd'hui, car tout s'est fait grâce à elle !
Une fois la couronne apportée, Blake continua :
- Et maintenant, profitons tous de la fête ! Une longue vie de prospérité et de paix nous attend ! Poema, m’accorderas-tu cette danse ? demanda-t-il en tendant sa main vers sa reine.
- Avec plaisir, fit-elle en riant.
Et ils s’élancèrent ensemble sur la piste de danse, aussi beaux l’un que l’autre.
Blake portait des habits royaux et la robe de Poema brillait sous les lueurs qui éclairaient la pièce alors que la nuit commençait à tomber dehors, enveloppant chacun de son voile de magie et de mystère.
Lohan dansait avec sa bien-aimée, observé par ses parents qui les regardaient avec amour, assis dans des fauteuils au fond de la salle.
Les pirates s’amusaient un peu plus loin, organisant un concours de danse dans lequel participaient Jack et Coralia, ainsi que Moonlight et Serenn. Ces deux derniers s’amusaient tellement que l’esprit finit par porter Serenn dans ses bras afin de gagner la danse, faisant éclater de rire le garçon.
- Moonlight !! Stop ! Arrête, tu n’es pas possible ! s’exclama-t-il en riant.
- Pas question ! lui répondit l’esprit en courant dans la salle.
Malgré le monde qui remplissait l’endroit, il y avait assez de place pour courir librement au palais. Le seul problème était qu’ils risquaient d’être pris pour des fous, mais ils s’en moquaient éperdument, bien trop concentrés l’un sur l’autre pour s’en soucier.
Bientôt, ils partiraient explorer le monde ensemble, puis rentreraient s'installer au royaume à nouveau après leur voyage. Moonlight voulait écrire des romans, tandis que Serenn voulait se mettre à la couture. Planifier un avenir ensemble était pour eux la plus belle preuve d'amour. Pour Moonlight, savoir que son amant le voyait dans son futur revenait à une énième déclaration, et Serenn pensait de même.
Jack et Coralia avaient décidé de partir en voyage également, mais à bord du bateau des pirates, car ils aimaient tous deux la sensation de voguer en pleine liberté, et être bercés par les vagues de la mer.
Lohan et Aliénor prévoyaient de prendre soin du clan des mages. Ils faisaient partie des sorciers les plus puissants de leur cercle, et cela leur tenait à cœur de rester proches de la magie. Lohan était chef du clan depuis longtemps, mais depuis qu’Aliénor était là, il prenait de meilleures décisions et ne se sentait plus seul, conscient de se trouver à la bonne place, là où il était destiné à être en tant que mage du jour de la prophétie.
Quand le jeune sorcier vit Morgan, mage de la nuit de la prophétie, il s’approcha de lui.
- Tu n'avais pas dit vouloir étudier la magie à mes côtés ? Surtout depuis que tu as appris que le sorcier qui devait te servir de mentor est mort ? demanda-t-il en lui tapotant l'épaule.
- Oh, pardon, je ne t’avais pas vu… murmura le triton en rougissant.
Il était en train d’enlacer Aaron, et venait à peine de se rendre compte de la présence de son ami mage.
- Ce n’est rien… Je te demandais simplement si tu t’étais décidé à venir étudier la magie avec moi, vu ton potentiel.
- Ah, ça m’était complètement sorti de la tête ! Je…
- Pardonnez-moi de vous interrompre, mais tu devras venir au royaume marin si tu veux lui apprendre la magie, ou m'autoriser à participer à votre cours si tu veux être son professeur, intervint Aaron, relâchant quelque peu son étreinte.
Lohan éclata de rire.
- Comme tu veux, ce ne sera pas long de toute façon. Je vous laisse, passez une bonne soirée, fit le mage avant de les quitter, rejetant ses longs cheveux blonds en arrière.
Immédiatement, Aaron se tourna vers Morgan, le serrant à nouveau plus fort contre lui, sans se soucier du regard des autres.
- Je suis vraiment désolé... murmura Aaron, glissant son nez dans le cou de son amant pour inspirer son parfum.
- Ah ? Pourquoi es-tu désolé ? s’étonna le triton.
- Je suis trop possessif… Je… Je n’ai pas envie de te laisser seul… Si tu veux, ne m’écoute pas et pars voir Lohan sans moi…
- Non, je ne veux pas y aller sans toi… Tu as bien fait de dire ça…
Le garçon se redressa, prenant le visage de Morgan entre ses mains.
- Vraiment ?!
- Oui, vraiment… soupira le triton en souriant.
Soudain, Aaron le prit par le bras et l’entraîna hors de la salle.
- Où est-ce qu'on va ? s'enquit-il, surpris.
- Une minute… Tu verras… Tout le monde est trop occupé à danser, je pense que les jardins sont déserts.
Ils traversèrent de nombreux couloirs jusqu'à arriver à la cour arrière du palais, où se trouvait le plus beau petit jardin de l'endroit. Une fontaine coulait sous les étoiles, maintenant bien visibles dans le ciel.
- C’est… commença Morgan.
- Oui… C’est l’endroit où nous nous sommes vus pour la dernière fois avant que le roi triton ne m’enlève… Tu te souviens quand je t’ai dit que je voulais revenir pour te proposer de m’enfuir avec moi ? Je suis triste de ne pas avoir pu réaliser mon rêve à ce moment-là, mais je suis content de ne pas l’avoir fait. Parce que si je l’aurais fait, le roi triton t’aurait enlevé toi, et comme tu es son véritable fils, il t’aurait tout de suite tué.
- Non… Tu ne peux pas dire ça… À cause de moi…
- Ne dis pas un mot de plus, Morgan, chuchota Aaron.
Il posa son doigt sur la bouche du triton avec délicatesse, le regardant avec amour. Il se mit à caresser les lèvres de Morgan de son doigt, faisant soupirer celui-ci.
- Je ne regretterai jamais de t'avoir sauvé, jamais. Cela a contribué au fait que nous sommes ensemble aujourd'hui, et c'est quand j'avais abandonné tout espoir de te revoir que tu m'es apparu tel un ange dans ma cellule noircie par la mort. Même si c'était ton visage et non ton bras que ton père aurait détruit, je t'aimerai toujours de la même manière, car c'est ton âme et ton cœur que j'aime, plus que ton apparence. Oui, je t'aime depuis le jour où je t'ai rencontré sur la plage. Oui, j'ai profité du fait que tu voulais quitter le village pour te ramener avec moi au palais. Oui, je voulais t'emmener partout avec moi, même si je savais que j'étais égoïste de ne penser qu'à mon bonheur. Alors sache que ça n'a jamais été de ta faute, mais toujours de la mienne.
Il se blottit contre Morgan, l’enlaçant de sa chaleur.
- Ne pense plus à rien et dis-moi… Es-tu revenu ici, après mon départ ?
- Bien sûr que je suis revenu ici, idiot. On se retrouvait souvent près de cette fontaine tous les deux, et même si je ne savais pas que tu avais disparu, ta présence me manquait tellement que j'avais du mal à dormir... Je sentais que tu t'étais éloigné de moi, mais je pensais que c'était parce que tu m'avais volontairement effacé de ton cœur, pas parce que tu ne te trouvais plus au palais... Je sais que tu ne m'as jamais oublié, mais s'il-te-plaît, ne m'oublie pas comme j'ai cru que tu l'avais fait, quand ton frère a pris ta place... Je... J'aurais dû te faire confiance, mais mes insécurités ont pris le dessus... Je n'ai pas pensé un seul instant que tu n'aurais jamais pu m'abandonner, car je m'attendais déjà à être séparé de toi. Même maintenant, j'ai encore peur alors que je sais que tu es sincère. J'avais peur d'être avec toi, peur parce que je pensais qu'un jour, tu allais m'abandonner, et quand ce que je redoutais le plus est arrivé, cela m'a beaucoup affecté. Parfois, je voulais m'éloigner de toi pour ne pas avoir à souffrir dans le futur, seulement, c'était déjà trop tard : j'avais déjà des sentiments pour toi quand tu m'as quitté, et le mal était fait. Je crois que je t'aime beaucoup trop, Aaron... Continue à m'enlacer comme tu m'enlaçais presque toutes les nuits, quand nous étions enfants... Il n'y a que ça qui parvient à me rassurer...
- Comme ça…? murmura Aaron en glissant ses mains sous la chemise de Morgan, le caressant lentement.
- Je suis sûr que ce n’étais absolument pas comme ça que tu le faisais à l’époque avec ton amour innocent d’enfant ! s’écria Morgan en rougissant.
- Tu en es sûr ? demanda le prince en le fixant dans les yeux.
- Bien sûr que j’en suis…
Aaron ne le laissa pas terminer et l’embrassa avec ardeur, l’obligeant de son poids à s’asseoir sur le bord de la fontaine.
- Aaron… gémit Morgan en enveloppant ses jambes autour de son amant.
Tandis que le prince l’embrassait dans son cou, le triton rejeta sa tête en arrière afin de lui faciliter l’accès. Aaron le prit par les cheveux, le forçant à rester ainsi alors qu’il continuait à déposer des baisers partout sur lui, le tenant par la taille d’une main, et tenant l’une de ses jambes de l’autre.
Au bout d’un moment, il s’arrêta essoufflé pour regarder Morgan dans les yeux encore une fois.
- Je peux défaire ton corset…? Je veux toucher ton dos…
- Ah…? Oui, vas-y…
Aaron ne se fit pas prier et tira d’un coup les fils du corset sans attendre, ce qui arracha un cri de surprise à Morgan, mais il n’eut pas le temps d’y penser que le prince avait déjà passé ses mains dans son dos, jetant le corset à terre.
- A-Aaron, arrête-toi… Nous sommes encore au palais…
Celui-ci se passa la main dans les cheveux, mordant ses lèvres de désir à cause du visage rouge de son amant essoufflé. Puis il sembla se rappeler de quelque chose et s'arrêta, tenant encore Morgan par la taille d'une main.
- Ah ! J’ai failli oublier pourquoi je t’avais amené ici… Tu vas finir par me rendre fou, même si je crois que c’est déjà le cas…
Il fouilla dans sa poche en sortit un petit sachet de soie bleue.
- Donne-moi ta main, demanda-t-il à Morgan.
Celui-ci s’exécuta, perplexe. Aaron déposa le sachet dans la main du garçon, l’air gêné.
- Qu’est-ce que c’est ?
- Attends ! Ne regarde pas son contenu... Hum... Ah... C'était tellement plus simple quand je m'entraînais cet après-midi avec mon frère !
- De quoi…? Qu’est-ce que…
- Morgan, je… le coupa le prince, tremblant légèrement.
Il parvint enfin à croiser à nouveau son regard avant de continuer :
- Je ne suis pas le meilleur des hommes, mais je t’aime… Je t’aime comme je n’ai jamais aimé personne… Es-tu d’accord… pour passer le restant de tes jours avec moi ?
- Tu… Tu es bien en train de me demander ce que je pense que tu me demandes ?
- Oui… Je veux t’épouser, Morgan… Acceptes-tu de…
Pour toute réponse, le triton l’embrassa en riant, le serrant de son bras valide.
- Comment pouvais-tu penser que je ne serais pas d’accord ?! Bien sûr que je veux t’épouser !
- Tu es sérieux ?!
- Oui, je suis on ne peut plus sérieux. Tu penses être le seul à me désirer ? Moi aussi, je veux t'avoir pour moi seul ! Je n'aurais plus besoin de m'inquiéter, car c'est la preuve que tu ne m'abandonneras plus jamais. Rendre notre relation publique, c'est enfin me débarrasser des personnes qui te regardent avec envie alors que tu es à moi. Enfin... Ils devaient déjà s'en douter, vu que nous allons régner ensemble sur le royaume marin...
Aaron crut fondre sous le regard déterminé de Morgan. Même s’il savait que le triton l’aimait, le voir si sûr de son amour pour lui le fit rougir de plus belle.
- Et le fait que nous soyons deux hommes ne te gêne pas…?
- Tu sais bien que je n'en ai rien à faire ! C'est vraiment le dernier de mes soucis... Ce que les autres pensent de ma vie n'a plus jamais eu d'incident sur moi depuis que je t'ai rencontré. Ton regard est la seule chose qui m'importe, et je l'ai vite compris le jour où j'ai pensé que tu ne me regardais plus de la même façon... Quand j'ai vu l'indifférence à mon égard dans les yeux de ton frère, pensant qu'il s'agissait de toi, j'ai eu si peur que j'ai cru mourir sur place... C'était comme si mon pire cauchemar était devenu réalité : même toi, tu t'étais détourné de moi... Je ne sais pas ce qui m'a pris, mais j'ai eu l'impression d'être devenu fou à cet instant... J'étais tellement pétrifié par ces yeux si froids et si différents que j'ai abandonné tout espoir, moi aussi. C'est de ta faute : tu m'as littéralement envoûté, alors prends tes responsabilités !
- Morgan... murmura le prince, la bouche entrouverte.
Il se sentait incapable de répondre à cette déclaration qu’il trouvait si belle, et le triton lui parut encore plus beau que d’habitude ce soir, si c’était possible d’être plus beau qu’il ne l’était déjà.
- Ils peuvent bien tous me regarder avec mépris et dégoût pour ma folie et pour le mal que j'ai causé, tant que tu me regardes avec amour, je n'ai besoin de rien d'autre...
Après quelques minutes à s’observer sans rien dire, Aaron brisa le silence en s’exclamant :
- Tu… Tu n’imagines pas combien je suis heureux de t’entendre dire ça…! Si je savais que tu m’aimais comme moi je t’aime… Ah… Je ne veux plus perdre un instant à tes côtés, fit-il en le soulevant dans les airs.
- Moi aussi... Je suis si heureux d'être avec toi...! lui sourit Morgan, le cœur vibrant de bonheur.
- Regarde le contenu du sachet avant, tu ne l’as même pas encore ouvert !
Disant cela, il l’aida à l’ouvrir, conscient que Morgan allait avoir du mal à le faire d’une seule main. Ce que le triton vit à l’intérieur du sachet le remplit de joie : c’était une bague argentée, avec une pierre bleu-glacé en son centre.
- C’est pour moi ?
- Oui.
- Elle est magnifique, je l’adore !
- Veux-tu que je te la mette au doigt ?
- Oui, avec plaisir !
Il glissa la bague sur le doigt de Morgan avec douceur avant d’ajouter :
- Tu sais, je l’ai faite moi-même cet après midi avec mon frère… Je voulais absolument te faire un cadeau de mes propres mains, et comme je n’arrivais pas à créer une bague avec un cercle parfait, il m’a conseillé de tordre les contours encore plus. Voilà pourquoi cette bague à des rebords en forme de vague. Concernant la pierre, c’est de tes yeux dont je me suis inspiré… J’avais peur qu’elle ne te plaise pas, mais ton visage m’a tout de suite rassuré.
- Non seulement elle est belle et originale, mais en plus tu en es l'auteur... Comment pourrais-je ne pas l'aimer ?
Aaron embrassa la main de Morgan, avant de caresser sa joue.
- Ce n’est pas tout… Le collier que tu m’as offert et qui porte ton nom, j’en ai fait un pour toi avec mon nom dessus, comme on se l’était promis… Le voici.
Il tendit le bijou dont la fine chaîne scintillait d'or vers Morgan, et celui-ci rougit de plaisir, ému.
- Merci, Aaron. Tu es la plus belle chose qui me soit arrivée… Tu peux me le mettre ?
Le prince acquiesça et passa le collier autour du cou de son amant, les mains tremblantes. Quand il le referma, il ne put s'empêcher de continuer à caresser la peau de Morgan, jusqu'à l'embrasser à nouveau.
- Pourquoi n’ai-je pas remarqué que tu es si fort que ça ? observa Morgan quelques minutes plus tard, touchant les muscles du torse d’Aaron.
- Si j’avais su que tu aimerais ça, je me serais entraîné encore plus !
- Tu n'es pas croyable... Mais tu sais, j'ai pensé à un truc tout à l'heure, dans la grande salle... J'ai finalement décidé de rester sous forme humaine dans l'eau, comme le fait notre ami sorcier avec sa magie... Mais seulement de temps en temps. Grâce à toi, je ne suis plus si dégoûté que ça de ma forme humaine, même si je préfère nettement rester triton...
- Vraiment ? C’est grâce à moi que…? Alors il faut que je te répète que je t’aime plus souvent, dans ce cas. Sache que tu es beau sous toutes tes formes, ne l’oublie jamais… Si seulement tu pouvais te voir à travers mes yeux… Tu n’es donc plus dégoûté des hommes…?
- Oui... Et puis... Tu es si beau en humain... Comment pourrais-je continuer à les détester ? En vérité, cela fait un moment que je ne ressentais plus de haine, mais il me restait du dégoût envers ma propre forme humaine, peut-être à cause des moqueries que j'ai subies... Quand je détestais les hommes, c'était en réalité moi que je détestais plus que tout. Je croyais en leurs insultes, me pensant affreux. C'est probablement à force de t'entendre me dire à quel point je suis beau si souvent qui m'a permis de moins me détester, alors pourquoi ne resterais-je pas humain de temps en temps ? Ma haine n'était due qu'à mon traumatisme, je suis tombé amoureux d'un humain, après tout. Si je ne te déteste pas, je ne déteste pas non plus les autres.
- Tu as le droit de détester ceux qui t’ont blessé, mais ne te déteste pas toi-même à cause d’eux…
- Tu vois, tu trouves toujours les bons mots pour me rassurer.
- Je ne m'arrêterai jamais de parler si cela te fait tant de bien...
Après un instant de silence, le prince s’exclama :
- Ah, j'ai failli oublier ! Tout à l'heure, nous n'avons pas vraiment eu l'occasion de danser tous les deux, peut-on danser maintenant ?
- Mais… c’est parce qu’avec mon bras, ça serait un peu compliqué, je…
- Tu veux danser avec moi ? répéta Aaron en souriant.
- Oui, je veux, mais…
- Si tu le veux, c’est l’essentiel…
Aaron l’aida à se lever et lui proposa sa main en s’inclinant devant lui.
- Acceptez-vous de m’accorder cette danse ?
- Avec plaisir, mon prince…
Et Aaron l'enlaça avec délicatesse, l'entraînant dans une valse lente au rythme de la musique que l'on entendait de loin, venant de la salle principale du palais. Ils s'embrassèrent longtemps en dansant l'un contre l'autre, oubliant tout.
Enfin, il souleva le triton dans ses bras, et l'emmena hors du palais. Ils s'éclipsèrent sans se soucier des autres, incapables de se quitter du regard.
- Ce soir, je pourrais enfin observer ton dos nu, couvert de tes magnifiques grains de beauté, lorsque je te ferai l'amour, Morgan... Tu n'imagines pas combien j'en ai envie depuis le début de cette soirée...
- Je l’imagine très bien, vu comment tu as jeté mon corset… Ah, mon corset ! On l’a laissé là-bas ! Que va-t-on penser si on le voit ? J’étais le seul à en porter un, ils vont…
- Ils vont enfin comprendre que tu es à moi. N'y allons pas... Je ne veux pas perdre de temps à revenir au palais... Je vois encore la scène où tu es sorti de l'eau, te transformant en homme... Je savais que tu serais beau, mais pas à ce point ! Surtout que comme tu ne portais qu'une chemise sans rien... Je...
- Tais-toi ! Heureusement qu’on avait pensé à prendre des pantalons pour après notre transformation… Tu…
- J’ai failli me jeter sur toi de nombreuses fois aujourd’hui, alors je ne pense pas pouvoir attendre encore. Tu as accepté ma demande en mariage, alors nous sommes officiellement en lune de miel ! le coupa le prince en l’embrassant avec passion avant que Morgan ne puisse protester.
Il se dépêcha d’emmener son amour au château des mers, désert comme tout le monde se trouvait au palais terrestre, et l’embrassa sans attendre dans le couloir, profitant de l’absence des habitants de la cour.
- Mon frère devrait organiser ce genre de fêtes plus souvent, comme ça je peux te prendre au beau milieu de la salle principale, marmonna Aaron en plaquant son amant contre le mur, le bloquant en attrapant le bras valide de Morgan pour le placer au-dessus de lui, embrassant son torse à peine caché par sa chemise ouverte.
- Je… Je préfère dans notre chambre, j’aurais bien trop peur que quelqu’un nous surprenne ici…
- Alors accroche-toi à moi, et allons-y, lui sourit Aaron en l'enlaçant, continuant à l'embrasser jusqu'à ce qu'ils furent en face de leur lit.
Il jeta Morgan sur celui-ci et l’observa de haut en bas, brûlant de désir.
- Tu es tellement beau, allongé comme ça… Triton ou homme, je ne peux détacher mes yeux de toi, murmura Aaron en grimpant sur le lit à son tour jusqu’à se retrouver au-dessus de son amant.
Il baissa les yeux sur le torse nu de Morgan et entreprit de lui arracher sa chemise.
- Tu vois, pas besoin de se transformer sous l’eau, on peut dire que la magie de ce sorcier est bien utile, n’est-ce pas ? fit-il en le couvrant de baisers.
- Mmm…
Entendant son gémissement, Aaron le retourna brusquement.
- Qu’est-ce que…?!
Sans répondre, le prince glissa ses mains sur le dos de Morgan, rêveur. Il essayait de compter ses grains de beauté, comme si son dos était une galaxie couverte d’étoiles.
Le jeune homme se laissa faire par son prince, calmé par ses mains si agréables qui touchaient son cou, son dos, puis ses jambes. Il frissonnait de partout, mais ce n’était ni la peur, ni le froid : c’était simplement parce qu’il s’agissait d’Aaron.
Quand le prince commença à lui faire l'amour, comme ils l'avaient fait de nombreuses fois déjà sans s'en lasser depuis leurs retrouvailles, tout parut avoir plus de sens qu'avant. Leur rencontre était écrite dans les étoiles, leur rencontre était une évidence, et ils ne pouvaient faire qu'une seule chose : se laisser emporter par le flot si puissant et fort qu'était leur amour, se laisser submerger par leurs sentiments et ne plus jamais regarder en arrière, se concentrant uniquement sur la chaleur qu'ils ressentaient au plus profond de leurs corps enlacés.

