Etes vous hybride ?
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Etes vous hybride ?
A la confluence du management par projet, de l’implantation d’outils numériques et des trajectoires professionnelles se différenciant des carrières , émerge le concept d’hybridation des compétences.
Avant que ce qualificatif un tantinet à la mode aujourd’hui soit employé, le travail hybride était déjà pratiqué.
Deux exemples d’hybridation non nommée.
Dans les années 58-68 mon père qui comprenait le français et s’exprimait dans un mélange de catalan, castillan et français occupait une fonction polymorphe chez Facom. Ouvrier professionnel ajusteur outilleur au service entretien, il bénéficiait de grandes marges de liberté. Il assurait la maintenance et réparation des machines dans tous les ateliers. Il exerçait plusieurs expertises. Les ouvriers postés spécialisés bénéficiaient d’un très faible rayon d’action et répétaient les mêmes gestes. J’en fus témoin lors de deux stages dans cette entreprise.
Alain Touraine , analysant ce type de configuration professionnelle n’employait pas le terme hybride. Néanmoins il décrivait des professionnels heureux et ayant du pouvoir, en se déplaçant partout, et en agissant dans des organisations molles où les pannes n’étaient pas prévisibles.
En 1995, lors d’un voyage Cegos aux Etats Unis dans le cadre du TQM (Total Quality Management) nous avions observé deux jours le fonctionnement du Ritz Carlton de New York. Leur crédo était : « we are ladies and gentlemen serving ladies and gentlemen ». Si un client signalait un incident électrique à une femme de ménage ou un maitre d’hôtel, ces derniers répondaient : « oui, nous allons nous en occuper » et surtout pas : « appelez le service des électriciens ».
L’émergence du concept.
C’est par la suite qu’émergea le concept d’hybridation. Chacun était invité à sortir de sa case définissant précisément ses fonctions pour assumer des rôles globaux. La communication symétrique chère aux experts s’est enrichie de communication complémentaire reliant des métiers divers sur des projets transversaux. La coopération, loin d’être une valeur morale, suppose d’intégrer des modèles du monde techniques et culturels .
Dans de nombreux écosystèmes d’affaires, les acteurs hybrides travaillent à distance, en mode asynchrone et multiculturel. Les statuts diffèrent et ils coopèrent parfois avec des concurrents à la demande d’un donneur d’ordre. Ces hybrides intègrent à la fois un mode de raisonnement en « une cause produit un effet » et des « équivalences complexes » où les déterminismes, s’ils existent sont multi-factoriels.
Alain Minztberg préconisa que nous promouvions des valeurs féminines dans le management. Reprenant en la connaissant ou pas la thèse d’Elisabeth Badinter sur la part féminine dans l’homme et la part masculine dans la femme.
Les sphères de vie, auparavant étanches s’interpénètrent : professionnelle, privée, sociale, politique.
Comme « par hasard », l’hybridation émerge dans une société liquide, où la maitrise de flux l’emporte sur la gestion des stocks et des immobilisations, où les organisations doivent être agiles, et où les statuts et procédures figés font l’objet d’enjeux de pouvoirs.
Et puis, l’avenir est peut être à l’hybridation des personnes avec des algorithmes , de l’intelligence artificielle et des robots.
Jean Louis Muller-Garcia travaille et réfléchit au sein du groupe ECOSYSTEMIC’S avec Eva Matesanz, Minh-Lan Nguyen, Stéphanie Flacher, André de Chateauvieux, également présents sur Panodyssey, Loïc Deconche, Vincent Gascon et Christophe Martel.