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Chapitre IV : "La Famille Esterion"

Chapitre IV : "La Famille Esterion"

Publié le 26 juil. 2022 Mis à jour le 26 juil. 2022 Curiosités
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Chapitre IV : "La Famille Esterion"

Après que le médecin soit parti, je demande à Noémie de retourner surveiller nos affaires pendant que Théodore et moi partons questionner la famille Esterion. Bon sang, je suis en train de me dire que mes deux principaux suspects pour le meurtre du Capitaine sont innocentés, même s'ils auraient peut-être préféré ne pas l'être. Quoique ? Si cela se trouve, quelqu'un les a tués pour cette raison. Cette affaire se complique à chaque réflexion. Cela voudrait-il dire que nous avions plusieurs assassins sur le navire ? Récapitulons... D'abord, la mort suspecte du Capitaine. Il soupçonnait quelque chose, et je ne pense pas que sa crise cardiaque soit naturelle. Ensuite, ces deux imbéciles. Morts dans des circonstances tout aussi étranges. Il n'y avait pas de traces de pas, donc Marcus et Herman n'avaient pas engagé de fuite. Marcus a tenté de tirer sur leur assassin, mais sans succès. La balle a du heurter un arbre et le fou qui les a tué est venu redéposer sa balle près de lui. Seulement, ces deux là avaient l'air assez costauds, je doute qu'ils auraient pu se faire tuer ainsi sans riposter. Peut-être que la lame qui les a tués était celle d'une épée.  

- Bon sang, on va finir par ne plus avoir de suspect, pestais-je. 

- Qui nous reste-t-il ? demande Théodore. La croyante ? Le bourgeois ? 

- Ah non, je ne pense pas. Une croyante ? Impossible. 

- C'est peut-être juste un déguisement. 

- Peut-être, mais rien n'est sûr. Et le Bourgeois était en train d'écoper lorsque le Capitaine est mort. 

- Parmi les nôtres, il ne reste donc que cette charmante femme qui n'avait pas l'air inquiète, cet enfant clandestin et le musicien, liste Théodore. 

- Bon sang, à part Marcus et Herman, je ne vois pas qui aurait pu assassiner le Capitaine. Peut-être que les deux crimes ne sont pas liés ? Peut-être que c'est un membre de cette île qui n'a pas aimé leur présence ici ? 

- Cela me parait probable, personne n'a vraiment l'étoffe d'un meurtrier, parmi le reste des survivants. 

Nous arrivons finalement près du manoir de la famille Esterion. Il est tout de même assez délabré. Aucune rénovation n'a donc jamais été effectuée ? Je toque à la porte, un homme vient nous ouvrir. 

- Que voulez vous ? demande l'homme, sur un ton assez hostile. 

- Nous aurions des informations à vous donner et à vous demander. Pourrions nous entrer ? demandais-je en retour. 

- Quel genre d'informations ? 

- Deux personnes sont mortes, répond sèchement Théodore. 

La personne hésite, puis nous fait rentrer. Elle se présente sous le nom d'Arthur. Le bois grince sous certains de nos pas, voilà qui indique une fois de plus l'ancienneté de cet endroit. Nous passons devant plusieurs miroirs, certains sont brisés. Les couloirs possèdent tous une porte en bois lourdement renforcée, ce manoir est encore moins accueillant que son occupant. 

- Edith ! Edith, ma chérie, nous avons des invités ! lance Arthur. 

- J'arrive, répond une voix que je reconnaissais. Iris, ne sors pas de ta chambre, je ne veux pas te voir !  

Lorsqu'Edith, la femme que j'avais déjà vu la dernière fois en venant ici, arrive, je commence à leur expliquer ce qu'il s'est passé. 

- Marcus et Herman, deux brutes qui étaient présentes sur notre navire, viennent d'être assassinées, lançais-je d'entrée de jeu. 

- Assassinées ? demande Arthur. 

- Oui, répond Théodore. Ce n'est pas une bête sauvage qui leur a fait ça. 

- Pourquoi êtes vous ici ? Seriez vous en train de nous soupçonner ? demande Edith. 

- Le médecin nous a conseillé de vous poser des questions à vous, répliquais-je. Il en a marre de veiller sur votre secret. Nous pensons que vous savez de quoi il retourne. 

Les deux membres de la famille semblent légèrement sous le choc de la nouvelle, mais impossible de savoir si c'est à cause du secret qui se dévoile ou bien parce qu'ils sont soupçonnés de quelque chose. Ils finissent par se rétracter. 

- Navré, lance Arthur. C'est regrettable pour ces deux malheureux, mais nous ne savons rien. 

- Je vois, répondais-je, lassé de leurs secrets. Et combien y'a-t-il de personnes, dans ce manoir ? Par simple curiosité. 

- Seulement les membres de notre famille, explique Edith. Nous deux et mon père Aden, qui commence à être rongé par l'âge. Il y a aussi Edward, mon frère, et sa compagne, Marilyn. Ils ont un fils, Mathew, qui doit avoir la vingtaine. 

- Dans ce cas, qui est cette Iris à qui vous parliez, tout à l'heure ? demande Théodore, curieux. 

- Oh, oui, c'est vrai. J'oubliais notre idiote de fille. 

- Pourrions nous aller les voir ? demandais-je. 

- Bien sûr, vous devriez les trouver dans les étages supérieurs. Prenez garde à ne pas vous perdre. 

Sur ces mots, nous partons à la recherche des autres. Bigre, elle fait bien de prévenir. Non seulement il y a plusieurs étages, mais aussi plusieurs couloirs à chaque étage. Au deuxième étage, nous croisons quelqu'un sur une chaise grinçante, endormi. Sûrement le grand-père de la famille, vu son âge. Inutile de le réveiller pour des questions macabres. Au troisième, nous trouvons le fils, Mathew, en train de nettoyer ce qui semble être une salle d'armes. Une magnifique collection, tout de même. Collection qui nous intrigue, Théodore et moi, quand on se dit que le meurtrier possédait peut-être une épée. Mais après réflexion, cela parait peu probable que l'assassin ait eu le temps de revenir ici et de ranger l'arme correctement après les deux meurtres. Mathew se demande ce que nous faisons là. 

En montant au quatrième étage, le dernier, nous arrivons à un étage terriblement isolé. Personne ne semble jamais venir ici. C'est même effrayant, les murs sont plus délabrés que les autres. Il semble y avoir une sorte de grenier, en haut... Mais je n'ai aucune envie d'y aller. Je doute d'ailleurs que quelqu'un y soit. Nous allions redescendre quand soudain, du bruit. J'aperçois une porte entrouverte. En me rapprochant, je découvre que quelqu'un est dedans. Une jeune femme, du même âge que Noémie, probablement. Ses vêtements semblent usés et sa chambre n'a même pas de lit, simplement une couverture sur le sol. Elle semble maigre. Sa seule distraction semble être la fenêtre qui lui donne une vue imprenable sur le village, elle reste assise devant, en position de tailleur. 

- Bonjour ? lançais-je, comme un saut dans l'inconnu. 

Aucune réponse. Elle se contente de regarder par la fenêtre. 

- Vous allez bien ? Demandais-je, inquiet de son silence. 

- Ce n'est pas une épée qui les a tués, répond-t-elle. C'est lui. 

Elle regarde toujours le village... Je regarde Théodore. Sa réponse, aussi étrangement donnée soit-elle, m'inquiète encore plus que son silence. 

- Qui ça, "Lui" ? demandais-je. 

- Je ne peux pas vous le dire, répond-t-elle. Il le saurait. 

- Et comment.. 

- Il s'agite de plus en plus, j'ai du mal à le repousser, explique-t-elle en coupant Théodore. 

Je me rapproche lentement d'elle, en jetant un œil à la fenêtre. Je ne le remarque pas, mais ma respiration se fait légèrement plus paniquée. 

- Repousser... Qui ? demandais-je. 

- Trois jours, lance-t-elle en tournant son regard vers moi, les yeux dans les yeux. Il frappera à nouveau dans trois jours. 

- Qui ? s'impatiente Théodore. Que se passe-t-il, nom de dieu ! 

- Revenez demain, réplique Iris. Edward est en bas, dans la cuisine, si vous voulez lui parler. Leland, le médecin du village, risque d'avoir besoin de votre aide pour s'occuper de Dominique, le vieillard que vous aviez protégé des deux brutes. Ne dites pas à Arthur, mon père, que je vous ai parlé, il risquerait de dire à Rory, le cuisinier du village, de me préparer moins de repas. 

- Vous êtes sûre d'être en sécurité, ici ? demande Théodore, inquiet pour sa santé. 

- Je n'ai pas le choix, si je ne lutte pas, il deviendra trop puissant. Si je me rétablis trop, il deviendra plus fort, et je ne peux le permettre, explique-t-elle en nous laissant dans une autre incompréhension. 

Nous repartons à moitié angoissés et à moitié rassurés. Peut-être qu'enfin, nous aurons des réponses, mais bon sang, elle ne me rassure pas du tout. En redescendant les étages, nous arrivons à la cuisine, proche de l'entrée. J'y croise une nouvelle tête, qui se présente sous le nom d'Edward. Il n'est pas très à l'aise avec notre présence. 

- Que faisiez vous là-haut ? demande Edward. Mathew vous a entendu parler. 

- Nous... Ne faisions que réfléchir aux différents évènements. Ce fut un plaisir de vous rencontrer, mais il faut que nous partions. Nous repasserons peut-être ultérieurement. 

Sur ces mots, nous sortons du manoir de la famille Esterion... Théodore et moi avons la même réaction. Respirer un grand coup de l'air sain. Bon sang, quelle ambiance de mort, et surtout quel endroit ! J'avais l'impression d'étouffer. Nous retournons au village... Sur le chemin, alors que nous discutions d'éventuelles possibilités, un bruit nous interpelle. Un craquement dans les bois. Une invitation à la perdition. J'arme mon tromblon, que j'avais gardé sur moi. Je vise, à la recherche de quelque chose... Mais rien. Théodore ne trouve rien non plus. Inutile de s'attarder plus longtemps ici. Nous continuons notre chemin en restant prudents, puis arrivons enfin au village. Un mauvais pressentiment s'empare de moi quand j'aperçois plusieurs personnes agglutinées à un endroit. Je remarque des outils semblant appartenir à un médecin. Mince, que se passe-t-il? Noémie à la rescousse, je la remarque en train d'écarter tout le monde, ce qui me laisse voir un corp inanimé par terre, allongé dans une flaque de sang. Et merde, encore un? 

- Que se passe-t-il, ici ? demande Théodore. 

- Bien des choses, cet homme a été assassiné ! répond Leland, le médecin. 

L'enfant clandestin revient en tenant des outils appartenant au médecin. Ce dernier les avais probablement oubliés dans la précipitation, n'emportant que les premières nécessités. 

- Merci beaucoup, Forest, lance Noémie. En revanche, tu ne devrais pas rester là. Rejoins les adultes là-bas, tu veux bien ? 

- Tout ce que vous voudrez, m'dame ! répond Forest, qui ne semble plus avoir peur des morts. 

- Bon sang, mais... C'est ce vieillard ! réalisais-je, surpris. Dominique, si je ne m'abuse ? 

- C'est exact, répond le médecin. Comment connaissez vous son nom ? 

- On... On me l'a dit, c'est tout. 

- En tout cas, ce pauvre malheureux a eu la gorge tranchée... Personne n'a rien vu, il était trop à l'écart. Il y a un meurtrier qui rôde, sur cette île ! 

C'est étrange, il ne s'en inquiète que maintenant, cet imbécile. Heureusement qu'on ne lui confie pas l'enquête. La femme religieuse verse quelques larmes en s'apercevant de la dépouille. Théodore va la consoler. Je me penche près de la blessure fatale... La coupure est nette, propre. Ce n'est pas l'œuvre d'un débutant, mais de quelqu'un d'extrêmement calme et qui sait ce qu'il fait. J'aperçois quelqu'un passer à ce moment même. La femme qui garde son sang froid en toute circonstances, qui était sur notre navire... Je m'approche d'abord de la femme religieuse, que Théodore tente de rassurer. 

- Excusez moi, lançais-je. Quel est votre nom ? 

- Marie-Anne, répond-t-elle. 

- Marie-Anne, pourrez vous adresser une prière aux défunts ? 

- Bien sûr. 

Je reprend ma route pour m'approcher de la femme que je soupçonne. 

- Excusez moi, mademoiselle ? demandais-je afin de l'interpeller. 

- Qu'y a-t-il ? demande-t-elle tout en se retournant. 

Mazette, quel charme, il ne faut pas que je me laisse déconcentrer, c'est peut-être une tueuse. 

- Excusez moi de vous déranger, mais quel est votre nom ? 

- Je me nomme Rosemary. 

- Avez vous vu ce qu'il s'est passé ? demandais-je, curieux. 

- Non. Et vous ? 

- Hélas, non, j'étais au manoir, plus loin. Je n'étais même pas au courant de ce meurtre. Avez vous entendu quoi que ce soit ? 

- Non, à part le cri du malheureux qui a découvert la dépouille. Ce vieil homme est mort dans le silence. 

- Cela restera un mystère tant que nous n'aurons pas d'indices... 

Je repars voir Noémie. Rosemary n'avait pas de dague si d'objet tranchant sur elle. Bon sang, je ne dois pas refaire la même erreur que pour Marcus et Herman, je dois élargir mon champ d'enquête, ne pas me focaliser sur une personne. Je propose à Noémie de retourner voir l'épave du Navire, afin de voir si les vagues nous ont rapportées autre chose. Noémie prend sa carabine, je dépose mon tromblon. Cette caisse d'armes est vraiment très utile. Après une bonne marche bien désagréable, nous arrivons enfin à l'épave. L'eau nous a effectivement rendu quelque chose. Plusieurs cadavres. Nous trouvons de quoi rejoindre l'épave sans nous mouiller... Puis je trouve de quoi ramener un cadavre à nous. C'est assez étrange, car il est dans le même état que celui du Capitaine. Ce cadavre est desséché, la peau sur les os et il semble avoir un trou dans la poitrine. Sa puanteur nous empêche de l'observer bien longtemps. 

- C'est tout de même étrange, remarque Noémie, on dirait qu'il lui est arrivé la même chose qu'au Capitaine. 

- Pourtant, il n'a pas fait de crise cardiaque, si ? demandais-je. 

- Non, il se portait plutôt bien. Il faisait partie des marins qui nous aidaient à écoper. 

- Donc ce qui est arrivé à leur corp n'a rien à voir avec la façon dont le Capitaine a été tué. 

- Attends, Adam, ne faisons pas de conclusions hâtives. 

- Tu as raison. Cette affaire est assez compliquée et nous n'avons toujours pas les moyens de rentrer pour demander de l'aide. Il n'y a que le navire dont ils m'ont parlé, mais il ne passe que très peu, apparemment. 

- Nous verrons bien comment les choses évoluent. 

- Oui. Tiens ? 

- Qu'y a-t-il ? demande Noémie, curieuse. 

- Regarde, répliquais-je, pointant un papier à moitié déchiré. 

Le papier nous semblait inintéressant jusqu'à ce que l'on remarque un étrange nom dessus. Esterion. La surprise est de taille, elle révèle un détail qui pourrait tout changer. Un membre de l'équipage aurait donc un rapport, quel qu'il soit, avec la famille Esterion. Mais lequel ? Mystère, le papier est trop déchiré. Nous passons une heure à en chercher l'autre fragment, mais impossible. Nous finissons par rentrer au village, mais cette fois-ci, avec un indice. Ce n'est qu'un nom, certes, mais c'est le début de la résolution de toute cette mystérieuse affaire. 

Une fois la nuit passée et les corps enterrés au cimetière, Théodore et moi retournons au manoir afin d'avoir quelques explications. J'ai emporté le morceau de papier avec moi, au cas ou. Une fois là-bas, nous toquons à la porte. C'est Edith qui vient nous ouvrir. Le manoir est exactement comme la dernière fois : Froid, malaisant et tout sauf accueillant. Je montre à Edith le morceau de papier où l'on peut voir le nom de leur famille en lui expliquant qu'une discussion doit avoir lieu. Elle appelle Arthur, son mari, ainsi qu'Edward, Marilyn et Mathew. Nous nous asseyons autour d'une grande table. 

- Que se passe-t-il, encore ? demande Arthur. Si vous êtes venus nous parler de ce qu'il est arrivé à ce pauvre malheureux, sachez que le médecin nous en a déjà informés. 

- Arthur, mon amour, interpelle Edith en montrant le morceau de papier sur la table. 

- Que... Comment êtes vous entré en possession de ceci ? demande Edward. 

- Il était dans l'épave de notre navire, réplique Théodore. C'est un miracle qu'il ne soit pas tombé dans l'eau. 

- Nous ne pouvons pas savoir ce dont parlait ce papier, hélas incomplet, mais vous, vous le pouvez, continuais-je. Ce papier n'a pas l'air d'appartenir à une simple lettre. Il doit avoir de l'importance. 

- Comprenez que cela reste assez personnel, lance Marilyn. 

- Je ne vais pas vous mentir, explique Théodore, nous soupçonnons qu'un meurtrier fasse partie des rescapés de notre accident. Ce n'est qu'une hypothèse, mais il est plus probable que cela soit l'un des nôtres que l'un des vôtres. C'est justement pour cela qu'il est étrange que quelque chose venant de notre navire ait un rapport avec vous, qui vivez sur cette île pourtant compliquée d'accès.  

- Qu'y avait-il d'écrit sur cette lettre ? assénais-je, sans donner l'impression de leur laisser le choix. 

- Nous ne pouvons..

- Non, Arthur, interrompt Edith, c'est déjà trop tard. 

- Mais enfin, Edith ? demande Arthur, surpris. 

- Cela fait bien trop longtemps, il faut en parler, explique Edith. Cette lettre était destinée au Pape. 

Le choc me coupe la chique. Et elle annonce ça sans détour, bim, tout droit. 

- Au Pape ? demande Théodore. Mais pourquoi donc ? 

- Pour notre petite sotte de fille, voilà pourquoi ! peste Arthur. 

- En quoi le Pape pourrait-il donc l'aider ? demandais-je. 

Les membres présents de la famille Esterion s'observent, cherchant une approbation du regard... Au final, c'est Mathew, le fils d'Edward et de Marilyn, qui se décide à briser le silence. 

- Iris est habitée par le Diable

 

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