Eclater aux oreilles du monde
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Eclater aux oreilles du monde
Troisième partie : rayonnement du maloya (4)
Afrobeat
Les musiques du monde parviennent parfois à s'extraire de leur zone géographique initiale pour éclater aux oreilles du monde, comme on a pu le voir avec le reggae ou le zouk. Mais il reste une autre possibilité, plus laborieuse et souterraine, qui consiste en un travail de longue haleine. Un seul artiste peut réussir, sans jamais réellement exploser, à emporter l'engouement général. Par la longévité de sa carrière et la constance de ses productions, sa rigueur, ses efforts, sa dureté au mal, sa foi, il peut se tailler une place de choix dans l'estime du plus grand nombre et ainsi faire exister sa musique du monde, c'est-à-dire la musique de son monde, intérieur autant que géographique. C'est ce qui compte vraiment. Le saxophoniste Fela Kuti est ainsi parvenu à faire de l'afrobeat un genre musical tangible et reconnu presque à lui tout seul.
Figure
Cela peut aussi être plus simple. Un artiste ou un groupe célèbre peut décider, pour se renouveler et trouver d'autres sonorités vivantes et authentiques, d'aller explorer cet ailleurs, ce vaste champ des possibles. C'est ce qu'ont fait les Beatles quand ils se sont rendus en Inde pour travailler avec Ravi Shankar et s'imprégner d'une autre forme de spiritualité. Du jour au lendemain, ce musicien et son instrument emblématique, le sitar, sont passés de l'ombre à la lumière, d'un ailleurs mythique du fait de son éloignement géographique au devant de la scène internationale. Toutefois cela reste très anecdotique. Il faut vraiment être les Beatles, ou Eric Clapton qui reprend I Shot the Sheriff pour parvenir à jeter autant de lumière sur un quasi inconnu.
Constat
À un moment ou un autre de son histoire, La Réunion est passée par tous les cas de figure que nous venons d'évoquer : elle s'est réinventée en redécouvrant son passé, en se le réappropriant et en le modernisant, elle a vu naître des groupes qui avaient l'ambition de s'imposer hors de ses frontières, des artistes reconnus sont venus chercher de son côté des sonorités spécifiques et ont essayé de les adapter au marché hexagonal, elle a enfin eu pour vitrine des artistes locaux qui sont parvenus à faire de longues et nobles carrières et à gagner ainsi une reconnaissance honnête et méritée, tels Ti Fock ou Danyel Waro. Alors pourquoi cela n'a-t-il pas pris ? Pourquoi le séga et le maloya ne sont jamais parvenus à s'établir de manière éclatante ou pérenne en métropole et ailleurs autrement que comme des modes apparaissant et disparaissant aussitôt, à intervalles plus ou moins réguliers ? Pour comprendre la situation actuelle il nous faut suivre les traces de ces deux courants voisins.
Merci à Eric Ausseil pour les petits papiers colorés.