Rhétorique
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Rhétorique
Rhétorique
– L’époque est attaquée par trois types de virus qui sont les facteurs contaminant et concomitants d’une même maladie du langage.
– L’euphémisation, l’apocope et l’hyperbole !
– Quelque chose comme ça. Nous ne sommes plus licenciés nous sommes remerciés.
– Nous ne sommes plus infirmes, nous sommes handicapés.
– Nous ne sommes plus clochards (cette dignité de Boudu !) nous sommes Sans Domicile Fixe.
– Nous ne sommes plus pédés, nous sommes gays.
– Nous ne sommes plus Nègres nous sommes blacks.
– Il semble que la douleur en soit atténuée.
– Les réducteurs de tête des sms étêtent les mots et les équeutent jusqu’à leur faire perdre toute racine et toute saveur. Ce bouillon de culture indigeste rendrait sympathique le lyrisme sec du morse.
– Et d’ailleurs a-t-on besoin de tant de mots ? Une bonne centaine suffira pour dire le prix de toutes choses, êtres et sentiments.
– Et cet usage des hyperboles qui ne disent en creux que le vide ! La petite épicerie du coin est Hypermarché City sans cesser d’être épicerie gardoise et s’enorgueillit d’être si ventrue et bonne à tout faire.
– Dans les Villes hyperactives aux périphéries urbaines, des mégacommerces sont accroupis, la gueule ultrabéante, cavernes d’Ali Baba qui sont d’ignoblissimes magasinasses dont le Supersésame est notre stupidissime esprit gigamoutonnier poussant son con de caddy.
– Te souviens-tu ? C’était autrefois. Nous étions avec quelques amis dans un troquet pékinois de la Cité interdite. Quelqu’un a demandé à Confucius ce qu’il ferait s’il avait le pouvoir.
– Ah oui. Il s’emploierait à redonner du sens aux mots. C’est loin, tout ça, mais bien de notre temps !
Jean & Jean, souliers de satin