Boy Meets Girl (Leos Carax, 1984)
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Boy Meets Girl (Leos Carax, 1984)
Naissance d'un auteur de 24 ans: Leos CARAX avec ce premier film traversé de fulgurances poétiques et de trous d'air comme le seront les suivants, la jeunesse en prime, sous le signe de la lune plutôt que du lion* bien "que l'on soit de la balance ou du lion, on s'en balance, on est des lions" pour reprendre la citation que l'on entend dans le film extraite de la chanson "Vingt ans" de Léo FERRÉ. Errance nocturne décalée dans Paris d'un jeune homme qui ressemble à Leos CARAX comme un frère (normal, il s'appelle Denis LAVANT et a presque le même âge, 23 ans). Il faut dire qu'il a une conception toute personnelle de "la carte du tendre", dissimulant sous un cadre un tracé de la ville de Paris où sont localisés les faits saillants de sa vie en forme de parcours spatio-temporel depuis sa naissance: la bohème, l'art, l'amour et la mort y occupent une place privilégiée de même que la Seine et le Pont-Neuf. Mais il ne se passe pas grand-chose dans ce film quelque peu irréel où l'intérêt est ailleurs: dans la manière de jouer sur le sens des mots et des expressions. "Payer un café" est par exemple interprété au sens littéral comme le font les personnes atteintes de troubles du spectre autistique. "Peureux" y résonne comme "heureux". On y "caresse l'idée de caresser" et on préfère "revivre ses rêves" que les réaliser. On s'y espionne "comme un étranger, comme un corps étranger" tant il est vrai que l'ancrage parisien dissimule le fait de ne pas se sentir de ce monde "Essaye encore, terrien!" est le mantra qui scande la fin du film, braqué vers la lune et les étoiles, figurées au travers du clignotement d'un jeu de flipper ou bien dans l'émission pour enfants "Bonne nuit les petits" projetée à un parterre de bébés (et oui, l'association enfance et rêve spatial est présente dès ce film et on voit bien la filiation avec "Annette" (2021) de même qu'avec David BOWIE l'extra-terrestre au coeur d'une des séquences les plus mémorables de "Mauvais sang") (1986).
* "Le Signe du Lion" (1959), premier long-métrage de Éric ROHMER décrit l'errance dans un Paris brûlant et déserté en plein mois d'août d'un musicien américain privé de ressources. Même si les critiques considèrent que "Boy meets girl" est placé sous le signe de Jean-Luc GODARD, je le trouve personnellement très rohmérien parce que Rohmer est un cinéaste de l'errance (dommage que comme tant d'autres cinéastes, on lui ait collé une étiquette qui dissimule la richesse de ses films).