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Le silence comme issue

Le silence comme issue

Publié le 14 août 2025 Mis à jour le 14 août 2025 Santé
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Le silence comme issue

Je l’avais vécue en euthymie cette pandémie.


Comme beaucoup, j’avais été grisée par la liberté au moment où l’on n’en avait le moins. Je n’ai su l’expliquer. Nous étions tous rassemblés dans le même marasme, nos droits bafoués pour une cause commune. De cela avait émergé une pulsion de vie déroutante. Le champ des possibles plus réduit nous ramenait à l’essentiel. 17 mars 2020. Le soleil est éclatant. Il n’y aura pas de giboulés cette année. Tout est au ralenti. Des personnes meurent, on ne sait rien et pour autant le soulagement est palpable. Le rythme effréné d’une vie qui coure plus vite qu’elle ne le peut a soudainement diminué. Maintenue sur pause, elle permet au monde de souffler un peu. La course n’en est plus une, on décroche et on profite d’un temps plus mesuré.


La lassitude, tandis qu’une seconde vague et un nouveau confinement ont rempli l’espace, a achevé l’idée que l’humain était capable d’un changement interne durable. Anxiété, dépression, rien ne va plus. Ce sentiment de vide retrouvé a l’effet d’un boomerang, d’un violent retour à une réalité déformée, transformée structurellement.




Je l’ai vécue dans un état aussi de conscience altérée, enfermée là où personne n’a envie d’aller.


J’avais déjà été "confinée", cela m’était déjà arrivé. Peut-être que je savais trop bien ce que c’était, que j’y étais habituée. Des droits de visite limités et de sorties encore plus restreints, des horaires de lever, de coucher, de repas et de médicaments, c’était ma vie et ça m’allait. A cet instant, j’étais contenue et rassurée. L’enfermement n’était pas le plus difficile. L’ennui l’était plus. J’étais malgré tout assez animée intérieurement pour ne pas ressentir un vide trop intense. La bulle dans la bulle, j’étais soumis régulièrement à des tests. La promiscuité, le vase clos et le manque de discernement faisait craindre un taux de contagion plus élevé. Je m’en moquais complètement. Le covid avait disparu de ma vie. Les craintes que je pouvais avoir avaient été remplacées par mes délires construits autour de thèmes, toujours les mêmes, à chaque hospitalisation. Des informations me viennent de l’extérieur. Comme souvent, chaque fait me concerne, vient alimenter un esprit encore centré sur lui-même. Curieusement, aucune interprétation n’était faite sur cette pandémie. Elle était bien extérieure à moi et ne faisait aucun écho intérieur. J’aurais pu me dire par exemple qu’on m’avait inoculé le virus pendant mon sommeil ou bien que les personnes se transformaient après avoir été infectées. Tout était normalement objet de délire et venait l’alimenter. C'était surement trop simpliste et attendu.


La réalité c’est que l’élastique s’était tendu jusqu’à rompre. Tous ces bouleversements, ces ascenseurs émotionnels ont eu raison de ma santé mentale. Comme beaucoup, fragilisés déjà, la pandémie a fait des ravages. Ma vie sous covid s’apparente à des montagnes russes les yeux fermés, tous les virages n’ont pu être anticipés. La mer tranquille semble lointaine, ça viendra...


Aout 2025 – Je relis ces quelques lignes et me dis encore une fois qu’il est bien difficile de parler de santé mentale quand bien même on est touché soi-même. Faudrait-il dire que les spécialistes sont les plus aptes ou faut-il se dire que l’imaginaire est le plus bel espace dans lequel une expression de la folie est possible. J’ai essayé à de maintes reprises d’expliquer, de narrer quelque chose qui une fois passé n’est accessible que dans un état de nouveau altéré. Faut-il écrire dans ces moments, j’ai essayé. En vain. Les malades psy ont beaucoup à dire et beaucoup peuvent amener de la connaissance nécessaire à une compréhension je pense plus juste et plus fine. J’essaierai de nouveau, en espérant à la fois ne jamais pouvoir le faire. Cela me semble bien pale à chaque fois tandis que chaque crise est animée de tant d’émotions souvent contradictoires et pourtant cohérentes.

La conscience est tellement bien faite qu’elle chasse les souvenirs trop douloureux ou bien trop écartés d’une réalité partagée. Mécanisme de défense ou oubli nécessaire. Ou bien manque de cohérence d’une unité qui quand elle est clivée se rassemble ne laissant accès qu’aux jointures et cicatrices bien loin d’un cataclysme immergé.

La bipolarité est de plus en plus connue et narrée. Je ne m’y retrouve jamais. Peut-être parce qu’il est difficile d’y voir autre chose qu’un enchainement de phases, d’événements très ancrés dans une réalité qui doit faire sens pour tout à chacun. Peut-être parce que ça fait sale, ça fait fou, ça fait dangereux, ça fait à la marge et que c’est bien moins glamour de raconter ce qui fait complètement décrocher. Je suis très ancrée par ailleurs, pas plus ancrée je crois. J’ai un boulot qui me plait, qui s’y rapporte assez et dans lequel le sens de l’analyse et le principe de réalité est au plus haut. Accepter les malades passera aussi par une plus grande honnêteté. Elle est difficile pour les raisons expliquées plus hauts. Cela évolue et c’est assez génial. Il faudra dire malheureusement la vérité toute la vérité pour que la connaissance puisse servir l’acceptation et l’intégration. Il y a trop de zones d’ombre qui facilite encore le pouvoir de détracteurs. Encore du chemin… Un chemin dans lequel je ne suis pas tout à fait prête à poser mes pas. Ça viendra...


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