Félicitations ! Ton soutien à bien été envoyé à l’auteur
Hommage à Anne Sylvestre, visionnaire des affres du confinement

Hommage à Anne Sylvestre, visionnaire des affres du confinement

Publié le 29 janv. 2021 Mis à jour le 29 janv. 2021 Musique
time 4 min
1
J'adore
0
Solidaire
0
Waouh
thumb 0 commentaire
lecture 40 lectures
1
réaction

Sur Panodyssey, tu peux lire 30 publications par mois sans être connecté. Profite encore de 29 articles à découvrir ce mois-ci.

Pour ne pas être limité, connecte-toi ou créé un compte en cliquant ci-dessous, c’est gratuit ! Se connecter

Hommage à Anne Sylvestre, visionnaire des affres du confinement

(Texte écrit dans les premiers jours du confinement de Mars 2020)

Chacun est en train de se retrouver avec soi. Et ceux qui n’ont pas l’habitude de cette rencontre, ceux qui ont dédaigné ou oublié la nécessité de ce point de rendez-vous avec soi, sont déjà nombreux à être en perte totale de repères : le travail, le rythme établi, le stress, les réseaux sociaux terrestres...
Inoculés et éperdus des virus #rienpoursoi #sipeupoursoi #jemoublie, certains se sentent comme perdus. 
 
Et cette ère de confinement, où l’air habituel se raréfie, connait déjà sa chanson. 
Plus précisément celle des gens qui ne la connaissent pas. Ne LE connaissent pas. 
Ceux qui, certes épargnés par le virus, sont déjà touchés par les premières roquettes de la crise.
D’autres craignent une mine anti-personnel cachée lors du redémarrage : leur visage est fermé, craignant que leur entreprise n’en fasse de même. 
Des ressentis inhabituels, nouveaux, naissent dans la tête et le corps de nombre de ces personnes : l’optimisme paralysé, la cécité sur l’avenir, l’amour aux tremblements de Parkinson, absence de surdité aux inquiétudes, la migraine de gamberge. 
Tous ceux-là commencent à l’entendre cette petite chanson, à en subir les premiers désaccords, à l’avoir en tête, à la fredonner l’entonner, à ne pas pouvoir en couper le son. Pas plus aguerris à surfer les vagues à l’âme qu’ils ne possèdent l’âme exploratrice, ils vont à la découverte d’un Nouveau Monde : celui des gens dans le doute. 
Le Monde des Gens qui doutent. 
Rares sont ceux qui ont estime ou empathie pour leurs habitants. À l’époque d’Anne Sylvestre, ils étaient encore moins nombreux : elle déjà rare. 
 
Ces nouveaux migrants vont apprendre à vivre le doute, à parler le doute, à ne plus partir au mois d’août, à redouter chacun des autres mois. À compter, à devoir compter sur les autres et décompter les cagnottes, à contempler puis fermer les yeux devant les difficultés, à enchaîner les gadins, voir vides les gradins, à être économes de force : avant ils n’étaient que radins. 

Le Monde des Gens qui doutent est un univers froid, très froid, il y fait rarement beau, on ne s’y trouve pas beau. Comme les habitants des autres mondes ne chauffent ni ne réchauffent ce Monde   il est recouvert de glace. 
On les reconnaît vite ces anciens conquérants, aux allures de cons errants, minés par la peur du Vide&Co. Auparavant ils turbinaient, usinaient, contaminaient. Désormais il va leur falloir ramer. Non, patiner plutôt. Ici même le changement climatique est à l’envers et les dessert. 

Dans ces nouveaux «doutants», il n’y en a pas encore mais il y viendront : des  patineurs de vitesse déchus de toutes compétitions, les futurs « ex- maîtres de l’Economie » se dévident ici aussi  .
Dans leurs précédents jeux de piste à sens unique, ils étaient groupés au départ face au mauvais coup du pangolin. Ils se sont éparpillés dès le premier pic de vitesse. Et déjà des premières chutes : pas de gants, pas de rambarde assurée. Les prévisions annoncent que la glace pourrait tellement fondre qu’ils deviendraient nageurs, ou plongeurs, ou noyés. Mais pour douter et l’assumer, il leur faudra enlever le masque. Ce sera contre nature pour eux. 
 
Migrent d’ores et déjà des patineurs artistiques qui évoluaient en couple : ils ont moins bien réussi les figures, ont chuté sur les triples, raté trop de salchow. 
Le redoutable entraîneur chinois Koro Nah les a fait s’entraîner quotidiennement dix fois, vingt fois plus qu’à l’habitude. Objectif : préparer les JO se déroulant à Lafin, dans la province Dukönffinhement en Finlande. Ceux qui débarquent sont ceux qui n’ont pas tenu le choc : trop de programmes imposés, pas de programme libre, toujours le même partenaire. 

Alors pour eux c’est changement de catégorie : retour au patinage individuel. Sa pratique oubliée est nettement moins artistique, plus merdique, et c’est chacun sa technique. Le doute s’installe. Non il s’est installé. 
« Patineurs, patineuses, unissez-vous » : l’appel est répété, martelé toute la journée sur la vielle sono défectueuse de la patinoire géante. Où on entend :
« Quoi ?  Comment ? Je ne sais pas faire seul, mais c’est quoi s’unir ? C’est comme s’aider ? Ah céder, d’accord… »
« S’aimer c’est par où ? Ah il faut semer d’abord … » 
Beaucoup restent au vestiaire ou se cachent, car encore plus froide est la glace dans cette partie du Monde : pour ceux qui tombent les os se cassent, les tenues sont moins classe, les patins moins aiguisés, voir à la place de vulgaires godasses. 
 
Depuis les autres mondes où hommes et femmes confinent, des cordes tendues d’équilibriste reliant au Monde des Gens qui doutent risquent de se multiplier. Pas besoin de visa, porte d’entrée facile d’accès, mais une porte de sortie au bout d’un labyrinthe parfois plus long et sinueux que ne le fit Dédale pour y perdre le Minotaure. 
Si tant est que de ce fil ils n’aient pas chuté avant. Dans le vide. 


lecture 40 lectures
thumb 0 commentaire
1
réaction

Commentaire (0)

Tu aimes les publications Panodyssey ?
Soutiens leurs auteurs indépendants !

Prolonger le voyage dans l'univers Musique
Il s’appelle Ziggy
Il s’appelle Ziggy

    Pas question de l’avatar de David Bowie ici, mais d’Un gar&ccedi...

Benjamin Mimouni
2 min

donate Tu peux soutenir les auteurs qui te tiennent à coeur