

"La Horde du contrevent" par Alain Damasio
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"La Horde du contrevent" par Alain Damasio
« La Horde du contrevent » par Alain Damasio
J’ai découvert Damasio avec « La zone du dehors », j’ai adoré son originalité typographique dans « Les Furtifs » mais, « La Horde du contrevent », je l’avais tenté 3 ou 4 fois et abandonné très vite, alors que beaucoup s’accordait à dire que c’était son meilleur roman.
J’ai donc retenté récemment et, contrevent et marées, j’ai tenu les premières pages dans lesquels je me perdais à chaque lecture, soufflé par des vents contraires, balayé par ce monde si diffèrent du nôtre, perdu dans un ouragan de complexité qui me semblait infranchissable.
Et, comme pour nos Hordiers qui doivent passer par des tempêtes pour avancer, il me fallait passer par ce vent de désintérêt que m’inspiraient ses premières pages. Car une fois cette longue introduction contrée, le roman (fantasy et/ou SF?) peut enfin nous offrir sans compter l’avalanche de plaisir, de philosophie, des personnages attachants et de moments marquants qu’on attend de lui. C’est donc un roman qui « se mérite » comme certains disent. Un roman qu’il faut apprivoiser avant de pouvoir en profiter.
Mais alors, qu’est-ce qu’il a de si génial me diras-tu ?
De mon propre avis, son génie réside dans son univers créé entièrement à partir de vent. Car ici, le vent est vu comme le créateur de tout, il est l’énergie vitale de chaque être, il est l’épreuve à surmonter, il fait tourner les technologies, effraye les uns, passionnent les autres ; parfois même divinisé par l’un ou l’autre personnage…
Le vent est aussi le socle sur lequel Damasio va poser tous les concepts philosophiques dont il veut nous parler à travers son roman. Utilisant cet élément pour nous faire passer, à travers ses personnages, les concepts tirés de Deleuze, Nietzsche ou Spinoza.
Chaque personnage ayant sa propre vision du monde, sa propre façon de parler, sa propre philosophie de vie ; tout contre le vent pour mettre à l’épreuve leur vision des choses et atteindre un but qui leur est propre.
L’écriture quant à elle est, comme dans chacun de ses romans, la grande force : chaque personnage prenant, à tour de rôle, la parole pour nous conter leur périple. Chacun ayant une voix particulière, un phrasé particulier, un rythme personnel. Brutal et vulgaire pour l’un, analytique et détaché pour l’autre, douce et empathique pour une troisième… Au bout d’un moment, juste à lire une ligne de dialogue, on devine qui parle sans se tromper, ce qui permet de profiter pleinement de la richesse des dialogues. Le tout, à grands renforts de néologismes nombreux et très inspirés, accentuant le sentiment de dépaysement total qu’apporte cet univers.
Par contre, je préfère prévenir, ce n'est pas un livre « pause cérébrale », loin de là ! Ce livre est écrit pour nous pousser à réfléchir sur nos fonctionnements, sur le sens de notre vie, sur ce qu’on est prêt ou non à sacrifier pour nos objectifs. On lit, on cogite, on avance, on réfléchit, on déguste un passage, on se remet en question. C’est une lecture qui cherche à nous bousculer et qui, encore une fois, demande un bon investissement cérébral pour l’apprécier à sa juste valeur.
Mais, si tout cela ne te fait pas peur, fonce rejoindre la horde et affronte les vents à leurs côtés. Goûte aux doutes et aux plaisirs de la vie et laisse-toi embarquer loin, très loin à la recherche de l’Extrême-Amont, là où les réponses t’attendent…

