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Madame La Député (2017)

Madame La Député (2017)

Publié le 23 juin 2020 Mis à jour le 23 juin 2020 Culture
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Madame La Député (2017)

A l'heure où le soleil se couche sur la brousse, où les animaux descendent au marigot pour boire, où l'homme blanc fatigué d'avoir braillé comme un âne et poursuivi des chimères durant tout le jour, je m'asseyais, un bol de cacahuètes bouillies à la main devant le téléviseur et l'allumais.

Après avoir vu quelques nouvelles sans importances, une information me bouleversa.

Une "Madame la Députée" expliquait sur un des réseaux sociaux dont elles sont si friandes que, se sacrifiant corps et âme, elle avait laissé son travail dans le privé pour servir la république. Cette pauvre femme écrivait que depuis son sacrifice, elle était obligée de manger des pâtes  et ne pouvait pratiquement plus sortir. Sur ce, le journaliste nous indiquait que le salaire d'un député était de 5000 Euros / mois plus une indemnité de 5300 Euros/mois non imposable.

J'étais fracassé.

Cette mère-courage, que dis-je, cette sainte, aurait pu tomber dans la mendicité, ou dans la prostitution en allant vendre son corps au plus offrant à Barbès ou à Château rouge. Elle aurait pu danser toute nue au Macumba pour des marins largués qui cherchent la bagarre.

Non ! Mesdames et Messieurs, cette femme admirable de dignité a su rester une mère modèle et élève son enfant d'une façon admirable.

Je l'imagine, dans son squat de 10 m² sans eau et sans électricité avec les toilettes au fond du jardin. Si on peut appeler "toilette" ce trou infâme où grouillent les asticots avec, suspendu à un crochet, les tracts de la dernière campagne électorale remplaçant le papier hygiénique qu'elle n'a jamais pu s'offrir. Je l'imagine aussi lavant son enfant dans une baignoire après avoir fait chauffer l'eau en brûlant des vieux morceaux de carton ayant servi à emballer les jouets des enfants riches. L'eau fume, il fait très froid car ils n'ont pas de chauffage. Malgré cela, le joli bambin blond frisé aux yeux bleus gazouille gentiment pendant que sa maman lui frotte énergiquement le dos. (Vous remarquerez que dans toutes les histoires tragiques, les bambins n'ont pas des tronches de bougnouls ou de mauricot - ça casserait le mythe). Ils sont heureux car leur amour est le plus fort et qu'ils savent que leur sacrifice ne sera pas vain.

Il est 13 heures du matin, son mari qui travaille aussi dans la politique rentre d'une harassante journée continue de 2 heures. Il tape ses galoches contre le mur extérieur pour faire tomber la boue qui s'y accroche. Le chemin qui mène à leur modeste demeure n'est pas goudronné. Il a reçu sa paye mensuelle de 8000 Euros et la dépose délicatement, de ces grosses mains calleuses rougies par le froid, sur la caisse en bois qui leur sert de table, à coté de la petite bougie qui se consume lentement en fumant. Avec ces 2 maigres salaires, ils espèrent, en se privant pouvoir payer une banane comme cadeau de Noël à leur petit chérubin.

Il est heureux, la pensée de ce fruit jaune à tâches noires, légèrement cintré  ramassé par des hommes qui souffrent comme lui, là-bas sous les tropiques, le remplit de bonheur. Il se dit que la misère est moins pénible au soleil. Son esprit s'évade un instant et il rêve aux travailleurs de la politique de ces républiques démocratiques  en train de s'enrichir sans aucun contrôle et que si Dieu n'a pas choisi de le faire naître dans ces pays paradisiaques, c'est simplement pour éprouver sa sainteté. Le Tout Puissant en a fait son élu.

Lui n'a rien, eux ont tout :

    Le hummer full option, pour aller à la messe ou au temple le dimanche afin de remercier Dieu de leur en avoir beaucoup donné et si possible de continuer.

    Une Mercedes de couleur différente, assortie à celle du costume de grande marque pour chaque jour de la semaine.

    Eux n'ont pas une souillon en guise de femme mais 4 ou 5 bureaux (maîtresses) dont la plus vieille n'a pas 25 ans, toutes habillées par Givenchy, Cardin, YSL... Vêtements qui valent le prix d'une école et qui leur vont généralement comme des bretelles à une sardine.

   Comme leur générosité est sans limite, ils ont offert à chacune de leurs concubines un magnifique 4x4 ou un cabriolet dernier cri. La préférée a même une Ford Mustang dernier modèle. Elle ne sait pas conduire mais ce n'est qu'un détail étant donné que dans ces pays de cocagne, il n'y a pas de route.

Mais que se passe-t-il ? Il délire. Comment a t il pu avoir des pensées aussi immondes envers son épouse ? Elle si méritante…le surmenage sans doute. Car, contrairement à beaucoup de ses collègues, il est très assidu aux séances de l'assemblée. Il est présent à une sur dix environ et ne dort pas, enfin les 2 premières heures. Lui aussi, aurait pu tomber dans le désespoir, l'alcoolisme, la délinquance ou pire le Front National. Mais non, ils s'accrochent tous les deux désespérément à ce métier qu'ils aiment tant en espérant qu'un jour, leur salaire sera triplé ou quadruplé afin qu'ils puissent avoir enfin la vie modeste mais digne qui leur est due. Un crucifix  avec le rameau de laurier fané accroché au mur veille sur cette famille si pieuse. Ils savent que Dieu ne les abandonnera jamais car leur combat est juste. Même Emile Zola n'aurait pu imaginer pire. Les "Gueules noires" du XIX ème siècle sont des bourgeois richissimes comparé à ces miséreux.

Ensuite, le journaliste interpelle un de ces pauvres diables de l'assemblée. Celui-ci explique que non seulement ils ne pourront plus employer des personnes de leur famille mais ils ne pourront plus exercer plusieurs métiers (ils appellent ça des mandats). Déjà qu'ils n'arrivaient pas à s'en sortir comme ça !

La différence entre un métier et un mandat est assez simple. Quand tu as un métier, tu as des comptes à rendre. Tu dois aussi être présent un certain nombre d'heures sur le lieu de travail pour générer de la valeur ajoutée. Un mandat, c'est comme un métier, sauf que tu n'as pas besoin d'aller sur ton lieu de travail, tu n'as pas de compte à rendre, tu n'as même pas besoin de travailler. C'est comme qui dirait un travail où tu n'as pas besoin de travailler ni de créer de la valeur ajoutée.

Pédagogiquement : Tu visualises une gonzesse à poil sur ton ordinateur. Elle est sur l'écran mais elle n'existe pas à l'intérieur de la machine. T'as beau démonter ton ordi, y a rien dedans, rien walou! Pas de gonzesse, même pas une toute petite, et encore moins à poil. Elle est virtuelle. Le travail dans un mandat c'est pareil. Tu crois le voir mais il est virtuel, il n'existe pas.

L'avantage, c'est qu'en plus d'être moins fatigant qu'un métier, tu peux avoir tout un tas de mandats aux mêmes horaires dans des endroits différents. Tu peux être député d'une circonscription en France mais aussi être député européen ou n'importe quel travail dans la politique. Un autre avantage est que tu peux embaucher du personnel pour t'aider. Heu, aider à faire quoi au juste?….Ben, aider tout court, c'est tout, aider quoi! Faut tout expliquer ici….

Bien sur, les plus consciencieux auront des comptes sur plusieurs réseaux sociaux où à grands renforts de balivernes, de carabistouilles et de lieux communs, ils expliqueront qu'ils font un travail formidable d'une grande utilité pour la société. (Aller à l'enterrement de Johnny, se pavaner aux comices agricoles de St Pierre de Echaubrognes, visiter un home de vieillards, se montrer au concert de Jojo le rappeur dans le neuf deux… venir expliquer aux mecs qui ont perdu leur boulot comment s'en passer, ect, ect…). Les plus actifs pourront en plus de leur mandat avoir un métier (Joueur de pipeau, marchand de vent à la Pointe du Raz, bouffon, chef d'entreprise bananière, Miss France, Titre Honorifique…). Oui, oui, Titre Honorifique c'est un boulot aussi, et pas un petit.

Pour revenir à nos moutons (ou à nos brebis), c'est vrai qu'il y a eu des emplois fictifs, il y a toujours des brebis galeuses. Mais la plupart du temps, Madame, embauchée pour un salaire de misère comme assistante parlementaire, assumait pleinement son rôle. Elle préparait le repas, allait faire les courses, s'occupait des enfants, nettoyait la maison, faisait des gâteaux, recevait les invités, ect, ect,…. Et en plus, elle apaisait les tensions glandulaires excessives une ou deux fois par semaine, ceci pour les députés les plus jeunes ou pour ceux n'ayant pas une secrétaire assez impliquée dans son travail. Il faut vraiment avoir l'esprit mal tourné pour dire qu'elle ne remplissait pas pleinement sa fonction d'assistante parlementaire.

O! Toi le besogneux, le métallo, le smicard nanti qui te plaint constamment et qui crache ton fiel  sur notre élite politique, sache qu'il existe en France des gens admirables qui ont tout perdu afin que vive notre démocratie chérie.

Je dédis ce modeste article à mes amis François et Pénélope ainsi qu'aux autres martyrs (passés, présents et futurs) qui ont tout donné afin que nous vivions dans  notre belle France égalitaire telle que nous la connaissons aujourd'hui.

 

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