Je dois bien avouer que certains récits dont on nous abreuve pour expliquer l’Histoire et, au-delà des faits incontestables, nous donner un aperçu de ce qu’est la race humaine, me laissent un goût amer au fond de la gorge. Et parmi eux, se trouve en bonne place, le mythe d'Hélène et Paris. 

À la mention d’Hélène, cette figure éthérée, des images de palais splendides, de rivages ensoleillés et de cités en flammes nous viennent immédiatement à l’esprit. Une beauté si prodigieuse qu'elle aurait causé la guerre de Troie. Mais que cachent les reflets de cette légende chantée par les poètes pendant des millénaires et retranscrite si habilement par le grand Homère et sa plume prodigieuse ?  

Alors, si vous le voulez bien, grattons un peu sous cette surface étincelante, parce que parfois, une forme de colère, de revanche et de sororité mêlées me prend et m’englobe tout entière.

Il faut que je casse le mythe. Ou que je l’égratigne pour le recouvrir d'une touche de ce que d'aucuns qualifient de féminisme. Même si je ne comprends pas que l'on puisse ne pas être féministe, parce que cela équivaut, à mon sens, à se dresser contre l’humanité tout entière. Parce que sans femme, pas de vie, pas de vous et encore moins de mâles alpha...

Revenons-en aux protagonistes pour les observer d’un peu plus près: 

Hélène, une princesse dont la beauté surpassait toute imagination, devient l'épouse de Ménélas qui accède au trône de Sparte après la mort du roi Tyndare – son père. Leur union symbolisait l’alliance et la paix. Mais voici Paris, prince de Troie, qui arrive à Sparte sur intervention d’Aphrodite elle-même. Paris réussit à séduire la belle Hélène, déclenchant ainsi une guerre qui ravagerait des civilisations. 

Hélène, souvent perçue comme une simple victime de l'enlèvement par Paris, n'est en réalité qu'un pion dans un jeu de pouvoir bien plus vaste. Utilisée et manipulée par les dieux autant que par les hommes, elle symbolise l'objectification des femmes et leur instrumentalisation à des fins politiques. Sa beauté, vantée comme la cause ultime de la guerre, n'est qu'un écran de fumée, masquant des conflits de pouvoir et des rivalités anciennes. 

Paris, loin du romantique prince amoureux, est lui-même instrumentalisé par les dieux de l’Olympe. Influencé par la promesse d'Aphrodite, il agit plus par désir de gloire et par manipulation divine que par amour véritable. Son geste, loin d'être héroïque, catalyse un conflit aux ramifications tragiques. La soi-disant romance entre Hélène et Paris n’est donc qu’un prétexte, un coup de théâtre orchestré par les puissances divines pour jouer avec le destin des hommes. 

Quant à la guerre de Troie elle-même, elle est une illustration poignante des ambitions humaines et de la violence qu'elles engendrent. Une guerre déclenchée non par amour, mais par des jeux de pouvoir, des ressentiments anciens et la soif de domination, mais dont on préfère accuser les femmes et leurs artifices parce que l’homme a toujours fait ça, non ? 

En réalité, derrière chaque héros et chaque bataille, il y a des histoires de trahison, de manipulation et de souffrance, des conflits d’égo, de loyauté et de soif de pouvoir. 

Le rôle d'Hélène, souvent réduit à celui de la belle en détresse, est à mes yeux beaucoup plus complexe. Elle représente la résistance, la résilience, exprimant souvent des regrets et une douleur profonde. Elle n'est pas seulement une cause, mais avant tout une victime des circonstances et des machinations qu'elles soient divines ou humaines – parce que les dieux ne sont que ce que les hommes ont décidé d’en faire. 

Hélène n'est plus simplement la belle cause d'une guerre, mais un symbole de la complexité humaine, de la lutte contre les forces extérieures et du tribut souvent lourd à payer au cœur des conflits qui nous dépassent. 

Le mythe d'Hélène et Paris est bien plus qu'une simple histoire d'amour : leur rencontre, bien que souvent romantisée, est profondément enracinée dans les jeux de pouvoir et les machinations perfides. Elle illustre comment les désirs et les ambitions personnels peuvent avoir des répercussions dévastatrices et nous privent souvent d’un happy end. 

Ainsi, après des années de siège, les Grecs finissent par recourir à la ruse pour pénétrer les murs de la cité ennemie. Grâce à l'ingénieux stratagème d'Ulysse, le cheval de Troie, les soldats grecs cachés à l'intérieur réussissent à entrer dans la ville pendant la nuit. Troie est dévastée, incendiée, et ses habitants massacrés ou réduits en esclavage. Ça, on le connaît. 

Paris est tué par Philoctète avec une flèche empoisonnée, mettant fin à son rôle dans ce drame épique. Quant à Hélène, elle est retrouvée par Ménélas après la chute de Troie. Certains disent qu’il veut initialement la tuer par vengeance, mais qu’il finit par lui pardonner et la ramener chez lui, malgré l'humiliation et la douleur causées par son départ avec son fourbe rival. Ce pardon pourrait être interprété comme un acte de compassion et d'amour. 

Mais après tout, qui peut savoir avec certitude ce qui se cache dans le cœur des hommes ? 

Image réalisée avec l'aide de Copilot Pro et retravaillée avec Canva