De Bach à N’to : La Belle Hélène, d’Offenbach
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De Bach à N’to : La Belle Hélène, d’Offenbach
Je ne pousserai pas ma cuistrerie jusqu’à déclarer qu’on ne présente plus les opérettes d’Offenbach mais, pour celles et ceux qui aiment la musique lyrique, il va de soi qu’ils connaissent la Belle Hélène.
J’ai une histoire particulière avec cette opérette. Lorsque j’étais enfant, nous n’avions pas beaucoup de cassettes dans la voiture familiale. Il y avait les grands airs tirés de la Belle Hélène, une compilation des plus grands titres des années 60 à 80 programmés sur Nostalgie, le Dixit Dominus de Haendel et bien sûr, Carmen. Ces cassettes, nous les avons entendues quarante mille fois lors des longs trajets qui nous menaient en Belgique ou à Perpignan, selon les saisons et les événements familiaux. Je crois que je connais encore maintenant toutes les musiques de ces quatre cassettes.
L’histoire de la Belle Hélène (le livret a été écrit par Ludovic Halévy et Henri Meilhac, les mêmes qui écrivirent le livret de la Carmen de Bizet) est une réinterprétation amusante de l’enlèvement d’Hélène, femme du roi Ménélas, par le berger Pâris, fils du roi Priam, enlèvement qui occasionna la fameuse guerre de Troie. Elle met en scène les rois grecs, passablement idiots, Hélène et Pâris. Il y a beaucoup de jeux de mots et de sous-entendus, et pour tous les amoureux de l’Iliade, et de la mythologie grecque, c’est un véritable bonheur. Les airs sont magnifiques, les textes sont très justes, et l’histoire tient toutes ses promesses.
En 2000, cette opérette a été jouée et diffusée dans les conditions du direct sur France musique. Je me souviens que je l’avais enregistrée sur deux cassettes (c’est assez long). Que j’avais ri ! Hélène était interprétée par dame Felicity Lott. J’ai beaucoup écouté cet enregistrement et un an ou deux plus tard, mes parents l’ont trouvé en DVD. J’ai ainsi pu voir ce que j’écoutais. La mise en scène était superbe et le talent des chanteurs pour jouer la comédie tout à fait remarquable !
Il y a de nombreux airs connus dans cette opérette, le Jugement de Pâris, Invocation à Vénus, Duo du rêve, etc. Il en est particulièrement célèbre, c’est la Marche des rois grecs. Chaque roi se présente à tour de rôle, sur le même air, et donne une citation de lui-même. Pour Agamemnon, cela donne, « Ce roi barbu qui s’avance, bu qui s’avance, bu s’avance, c’est Agamemnon. J’en ai dit assez je pense, en disant mon nom, ce roi barbu qui s’avance, bu qui s’avance, bu qui s’avance, c’est Agamemnon, Aga-aga-memnon… » C’est ridicule et très drôle. C’est devenu célèbre. Dans une émission de France Inter, le Fou du roi, animée par Stéphane Bern, à la fin de l’année 2002, François Raynaert, journaliste du Nouvel Observateur et chroniqueur dans l’émission, fit une blague directement en référence à ce vers. Ce fut un bide, personne autour de la table n’avait saisi de quoi il s’agissait. Difficile d’expliquer une blague en revenant sur une citation tirée d’une opérette. Il se fit copieusement chambré par ses camarades de micro, comme il était de coutume dans l’émission. Pris par un sentiment de justice, je me fendis qu’un petit message de soutien à François Raynaert, dont l’adresse mail figurait alors dans les pages du Nouvel Observateur. Il me répondit très gentiment et très rapidement. Plusieurs années plus tard, lorsque je commençais ma vie professionnelle au ministère de la Justice, nous avons déjeuné ensemble place du Marché Saint-Honoré. C’était fort sympathique. Comme quoi, la musique crée des ponts, et moi, le petit provincial tout juste débarqué à la capitale, je pouvais me targuer d’y avoir déjeuné avec un grand journaliste et romancier. La vie est étonnante. Merci Offenbach.
L'extrait en question : https://www.youtube.com/watch?v=2yBrRy2OLVY